@ACHIPatrick4
« J’ai été honoré d’être l’invité à #Paris hier & ce matin du @medef, de son président @GeoffroyRDB & de la #REF21 pour parler des succès de la Côte d’Ivoire, des défis de notre stratégie 2030 & de cette nouvelle Francophonie économique à bâtir pour produire + de richesses, mieux partagées ! »
Patrick Achi depuis Paris : « L’Afrique sera demain le cœur et le poumon du monde francophone »
Le Premier Ministre, Patrick Achi, a été l’invité à Paris (France) de Geoffroy Roux de Bézieux, président du Mouvement des Entreprises de France (MEDEF).
Le chef d Gouvernement lors de son adresse à la tribune indique avoir dit que, l’Afrique sera demain le cœur et le poumon du monde francophone ».
« L’Afrique sera demain le cœur et le poumon du monde francophone. Et plus que jamais, l’avenir est ici ! C’est ce que j’ai eu le plaisir de dire à Paris comme invité du MEDEF, de son président Geoffroy Roux de Bézieux & de la REF21. Avec les entreprises et les investisseurs francophones, tout à la fois français et européens, américains, asiatiques et évidemment africains, il nous faut bâtir, dans cet espace qui nous relie, une nouvelle Francophonie économique. Pour produire plus de richesses en commun, plus durables et, aussi, disons-le, bien mieux partagées ! Merci à eux pour cette tribune, la franchise et la richesse de nos échanges », a posté Patrick Achi, avant d’annoncer le prochain rendez-vous du MEDEF, à Abidjan en 2022.
Donatien Kautcha, Abidjan
Ci-dessous, le discours intégral du Premier ministre ivoirien, Patrick Jerôme Achi.
C’est un réel plaisir et un immense honneur que de participer à cette première rencontre des entrepreneurs francophones, organisée par le Mouvement des Entreprises de France.
Si notre forum s’inscrit dans les pas du sommet de la Francophonie de Dakar, il cultive son originalité par son format, concentré autour du secteur privé, et par son ambition : produire des résultats tangibles pour nos entreprises comme pour nos pays, grâce à ce trait d’union singulier qui nous relie et qu’Albert Camus avait si joliment résumé : « j’ai une patrie, la langue française ».
Oui, le monde francophone est aujourd’hui l’une des 5 grandes zones géopolitiques linguistiques, représentant près de 16% de la population et du PIB planétaire.
Compte tenu du dynamisme démographique de ses membres, notre espace commun devrait atteindre en 2050 plus d’1,5 milliard de personnes, dont 700 millions de locuteurs francophones. Et à cette échéance, 90% des locuteurs âgés de 15 à 30 ans, vivront en Afrique.
La Francophonie est donc un continent virtuel en plein devenir. Parce que cette langue qui relie les hommes, facilite évidemment les échanges et les investissements. Et les faits le montrent : au sein des pays de l’espace francophone, près de 20% de flux commerciaux supplémentaires sont créés, grâce au partage du même socle linguistique.
Dans le même temps, notre monde doit aussi se transformer et accomplir une profonde révolution culturelle. Notre histoire nous a en effet amenés, après 1958, à définir la Francophonie par la culture, avant de valoriser des relations économiques durables, profitables et équitables. C’est cette révolution que la Francophonie Économique se doit d’entreprendre, en osant clamer comme le fait le Commonwealth dans son propre nom, que notre projet est bien de créer une nouvelle « richesse commune » !
C’est pourquoi je me réjouis de l’initiative qui nous réunit aujourd’hui, portée par le Président Roux de Bézieux, le MEDEF et les patronats des pays francophones. Il est vivifiant de voir les acteurs clés de la production de richesse se saisir de cet enjeu, parallèlement aux gouvernants. C’est un véritable cap qui est franchi. Sachons le faire fructifier !
Mesdames, Messieurs,
Au moment même où la pandémie nous amène à réfléchir à de nouveaux circuits économiques, plus proches géographiquement et culturellement, mieux connectés par les modes de vie et les valeurs de leurs sociétés, je voudrais partager avec vous 4 convictions simples pour éclairer les progrès que nous devons accomplir pour bâtir ce qui est devenu une nécessité absolue : une véritable Francophonie économique.
L’Afrique change et c’est l’avenir en marche
Ma première conviction est une évidence. Qui, comme toutes les évidences, se doit d’être rappelée régulièrement : l’Afrique n’est plus l’Afrique, l’Afrique a changé.
Bien plus que tout ce que vous pourrez jamais imaginer. Et bien plus que ce que peuvent vous montrer des fenêtres médiatiques trop souvent concentrées sur des aléas conjoncturels. Il faut savoir aller au-delà de ce prisme réducteur pour voir cette Afrique nouvelle.
Oui, l’Afrique progresse, l’Afrique s’urbanise, l’Afrique se forme, entreprend et s’enrichit. L’Afrique se digitalise et s’industrialise. L’Afrique s’affirme et prend conscience de son potentiel immense, comme de ses défis extraordinaires. Elle acquiert une fierté commune, celle d’une terre de civilisation qui a faim de conquêtes positives.
L’Afrique, qui sera demain le cœur et le poumon du monde francophone, constitue ainsi un vivier extraordinaire de croissance. C’est le dernier continent où des investissements massifs dans les infrastructures, les services publics, les réseaux technologiques et le capital humain vont s’opérer.
Ce sera aussi, par la jeunesse de sa population, un foyer précieux de compétences, mais également un réservoir unique de matières premières qui devront demain être mieux intégrées dans les chaînes de valeur mondiales.
Enfin, et c’est directement lié, via l’amélioration des revenus de nos populations, un marché immense de consommateurs aux habitudes culturelles voisines se développera, sur lequel les opérateurs du monde francophone auront un avantage comparatif indéniable.
Ne soyez plus timides !
Face à cet avenir en marche, il nous faut faire un constat bien réel. En 20 ans, la France a perdu près de la moitié de ses parts de marché en Afrique, passant de 12 à 7% : les exportations des entreprises françaises ont ainsi doublé sur un marché qui a lui quadruplé.
Un véritable choc de conscience et d’action – et c’est ma seconde conviction – doit donc s’opérer. Et pour ce faire, il nous faudra mener 3 ruptures majeures.
La première, pour les acteurs économiques francophones, est de considérer enfin ce marché presque naturel, comme une terre prioritaire pour leurs investissements.
Ceux-là mêmes qui, hier, ont pu être détournés pour des délocalisations lointaines aujourd’hui questionnées par la pandémie. Pendant que d’autres acteurs, bien éloignés de notre communauté francophone, ont eu eux le flair de venir prendre les places qui n’étaient plus occupées.
Il est temps pour les entrepreneurs francophones ne plus craindre d’agir ou d’investir.
Et d’oser.
Oui, d’oser questionner certains de leurs choix passés. Et d’oser construire avec nous de nouveaux modèles de croissance juste, durable et rentable.
La seconde rupture doit être, pour nous tous, une libération. Celle du poids d’une Histoire complexe, faite de haut et de bas. Mais cette Histoire, elle est celle de nos pères. Pas la nôtre ni celle de nos fils. Eux attendent les investissements, les infrastructures, les emplois, le pouvoir d’achat. N’écoutez pas ces quelques voix qui parlent ici pour eux, sans rien connaître de cette Afrique nouvelle qui naît. Pour notre jeunesse, cette page n’est plus la sienne. Et elle vous attend pour écrire celles qui vont dessiner son avenir et transformer positivement sa vie.
La dernière rupture à opérer, elle, nous incombe. Nous connaissons les insuffisances de la gouvernance qui ont pu exister dans le monde francophone. Là encore, une page se tourne et notre pays, la Côte d’Ivoire le prouve. En doublant en 10 ans son PIB par habitant au sortir de 2 décennies de crise, au moyen d’une croissance de 8%/an jusqu’en 2019, les Ivoiriens ont accompli sous la gouvernance d’Alassane Ouattara, une œuvre collective que bien peu imaginaient.
Et notre résilience économique et sanitaire face à la pandémie, comme l’ampleur de notre rebond, viennent prouver la force de nos fondamentaux.
Pour atteindre nos objectifs 2030, consacrés par le projet Côte d’Ivoire Solidaire, c’est-à-dire doubler à nouveau notre PIB/habitant et réduire de moitié notre pauvreté, nous avons fait du développement du secteur privé notre priorité nationale absolue, avec une contribution cible du secteur privé à l’investissement de 25% du PIB d’ici 10 ans.
Et ce, tout en réformant en profondeur la culture de notre administration, pour en faire demain cet allié indispensable de la croissance des entreprises et plus jamais le frein réglementaire ou humain qu’elle peut encore être aujourd’hui, chez nous comme dans de nombreux pays du monde francophone.
Une politique de champions nationaux est enfin mise en place pour amplifier la création d’emplois, autour de filières puissantes dans l’agro-industrie, le textile et l’habillement, l’habitat, le numérique, le tourisme ou la culture… Ils seront demain ces partenaires stratégiques idéaux pour tous les investisseurs de la Francophonie.
Bâtir la Francophonie économique sur des projets
Mesdames, Messieurs, comme le projet européen a su le faire avec succès il y a 70 ans autour du charbon et de l’acier, nous devons hiérarchiser nos priorités d’action. C’est ma 3ème conviction.
Évidemment le soutien à l’entrepreneuriat doit être au cœur de notre stratégie, tout comme la transformation locale des matières premières ou les infrastructures.
Plus fondamentalement, nous sommes convaincus que la Francophonie économique doit se concentrer demain sur les couleurs des économies de l’avenir :
la verte, celle qui permettra de bâtir une croissance durable et de respecter les termes de l’Accord de Paris;
la bleue, centrée sur le potentiel incroyable de l’économie maritime, puisque la francophonie abrite plus de 20% de la ZEE mondiale ;
la blanche, issue de la révolution numérique, aussi avancée en Afrique – et parfois bien plus ! – que dans le monde occidental ;
la mauve enfin, qui fait des industries culturelles et créatives, des leviers majeurs du développement. Oui, il nous faut capitaliser sur la capacité d’attraction de la musique, du cinéma et des artistes francophones. Nous le vivons en Afrique de l’Ouest : notre scène créative irradie dans le sous-continent et partout ailleurs, grâce à la puissance des réseaux. Et c’est en faisant la promotion constante de cette énergie artistique de la francophonie que nous pourrons faire émerger des Netflix francophones. Nous en avons les talents, les industriels, les consommateurs. Ayons-en l’ambition !
Nos destins sont définitivement liés
Ma quatrième conviction relève d’un impératif catégorique. Nous devons faire grandir cette Francophonie économique, parce que nos avenirs respectifs l’exigent.
Face au sous-investissement dont souffrent nos économies, une fraction de notre jeunesse fait le choix douloureux de l’exil, pour aller chercher ailleurs un espoir qui se transforme hélas en chimère.
Et cette immigration clandestine pourrait demain, si les bonnes décisions n’étaient pas prises, constituer un facteur majeur de déstabilisation de nos États, comme de vos nations ici en Europe.
Développer le secteur privé africain, pour créer les dizaines de millions d’emplois nécessaires à l’inclusion de notre jeunesse, l’éloigner définitivement de la misère sociale et du démon du terrorisme, est ainsi le plus grand défi du monde francophone, de part et d’autre de la Mare Nostrum.
N’oublions jamais que seuls 14 kms séparent nos deux continents qui, en réalité, n’en font qu’un seul. Nos destins sont liés. Nos défis sont vos enjeux. Nos menaces, vos périls. Et nos succès, les vôtres.
Il faut enfin saisir que l’avenir de notre action collective contre le réchauffement climatique, se joue aussi dans les forêts africaines. Nul ne l’ignore, le bassin du Congo est le deuxième massif forestier tropical, après l’Amazonie. Avec ses 3 millions de km2 partagés entre 6 nations membres de la Francophonie, il est le poumon droit de notre Terre. Sans lui, et donc sans un développement équilibré de ces États, nous n’aurons plus jamais collectivement le même avenir.
Le parallèle européen
Mesdames, Messieurs,
« La loi de solidarité des peuples s’impose à la conscience contemporaine. Nous nous sentons solidaires les uns des autres dans la préservation de la paix, dans la lutte contre la misère, dans la recherche du développement et du bonheur, dans la sauvegarde de la justice et de la dignité humaine ».
Ces mots, ce sont ceux de Robert Schuman. Et s’ils ont 60 ans et parlent naturellement du projet européen, ils incarnent aussi l’ampleur de nos défis. Oui, nous sommes, au sein du monde francophone, aussi interdépendants pour notre avenir que les Européens pouvaient l’être en 1945.
Et si cette œuvre de paix et de prospérité a pu être édifiée sur ce Vieux Continent que les conflits avaient lacéré pendant deux millénaires, je suis convaincu qu’elle peut l’être au sein de cette francophonie qui a tant à partager.
Si nous savons nous focaliser sur ce qui nous rapproche et non ce qui nous divise ;
Si nous savons bâtir sur ce que notre Histoire métissée et séculaire projette de plus positif ;
Si nous savons toujours renforcer l’enseignement de cette langue qui nous rassemble ;
Si nous savons réunir le dynamisme de notre jeunesse et l’avant-garde de vos technologies ;
Si nous savons faire de notre proximité humaine, le socle préalable et durable de nos partenariats économiques ;
Si nous savons nous respecter pour construire une richesse commune et équitablement partagée ;
Si nous savons oser, prendre des risques, perdre ensemble pour mieux gagner ensemble,
Alors oui, sans nul doute possible, la conquête du monde est à notre portée !
A nous donc, gouvernants, de tout mettre en œuvre pour que cette rencontre ne soit pas un simple sommet de plus et de toujours favoriser cette communauté économique francophone qu’il faudra doter à terme, pour amplifier nos succès, d’un cadre institutionnel novateur, paritaire entre secteur privé et pouvoirs publics.
Et à vous, entrepreneurs francophones, de faire vivre cette nouvelle Francophonie Économique, pour en faire un espace de prospérité et d’inclusivité !
Et parce que je ne peux terminer mon propos sans remercier une nouvelle fois le MEDEF et son Président de leur initiative et de leur invitation, je voudrais vous proposer que cette rencontre, qui en appelle forcément d’autres, puisse désormais se tenir alternativement sur les deux rives de notre monde francophone et vous convie ainsi, toutes et tous, en 2022 à Abidjan pour, à l’air libre de cette Afrique nouvelle qui a soif d’ambitions et de progrès, voir grandir ces projets d’une Francophonie économique toujours plus conquérante et rayonnante !
Alors, Mesdames et Messieurs, venez, venez à Abidjan l’année prochaine !
Je vous remercie. »
Avec Koaci
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