(Agence Ecofin) – Depuis plusieurs mois, la société israélienne NSO Group assure que son logiciel Pegasus, qui permet d’espionner des terminaux mobiles au profit des services de lutte contre le terrorisme, ne sert pas à transformer les téléphones de civils en mouchards.
L’association Forbidden Stories, créée par le journaliste français Laurent Richard pour poursuivre les enquêtes de journalistes emprisonnés ou assassinés, vient de publier une enquête prouvant que le logiciel Pegasus a servi à espionner la presse du monde entier. Le programme espion commercialisé par NSO, une société israélienne qui commercialise des équipements servant à lutter contre le terrorisme et le crime organisé, a servi, contrairement aux nombreuses allégations de son créateur, à espionner des membres de la société civile, dont des journalistes.
Les données divulguées suggèrent que le logiciel espion est utilisé de manière beaucoup plus négligente et intrusive que clamé. Dans un rapport de transparence publié en juin 2021, l’entreprise israélienne soulignait que Pegasus n’était « pas une technologie de surveillance de masse » et n’était « utilisé que lorsqu’il y avait une raison légitime liée à l’application de la loi ou au renseignement ».
Pourtant, Forbidden Stories a eu accès à une liste d’environ 50 000 numéros de téléphone entrés dans le système Pegasus depuis 2016. Cela a été possible grâce à 12 clients du logiciel. Parmi les numéros recherchés on retrouve ceux de nombreux journalistes issus principalement de 17 médias, parmi lesquels le Washington Post, le Guardian, le Süddeutsche Zeitung, Le Monde, et la cellule investigation de RFI. Certaines des personnes espionnées ont laissé les enquêteurs de Forbidden Stories accéder à leur téléphone et ont permis de confirmer la présence de Pegasus.
« Nous nous sommes recommandés les uns aux autres tel ou tel outil, comment garder nos téléphones de plus en plus à l’abri des yeux du gouvernement. Mais, hier, j’ai réalisé qu’il n’y avait aucun moyen. A moins de vous enfermer dans une tente de fer, il n’y a aucun moyen qu’ils ne s’immiscent pas dans vos communications », a déclaré avec dépit la journaliste azerbaïdjanaise Khadija Ismayilova.
L’affaire commence à faire beaucoup de bruits en Afrique, notamment au Maroc, au Togo et au Rwanda où des journalistes ont été espionnés grâce à Pegasus.
Servan Ahougnon
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