Le Niger appelé à élire le successeur de Mahamadou Issoufou
Par Christophe Châtelot
Il est un fait qui devrait relever de la normalité électorale, mais qui distingue pourtant le Niger des autres pays de la région. Dimanche 27 décembre, le président sortant ne sera pas candidat à sa réélection, pour un troisième mandat à la tête du pays. La Constitution ne l’y autorisait pas. Mahamadou Issoufou – qui fêtera ses 69 ans le 1er janvier – n’a pas essayé de la réécrire pour s’éterniser au pouvoir. Mieux, ce scrutin pourrait se solder, pour la première fois depuis l’indépendance de cette ancienne colonie française en 1960, par une transmission démocratique et pacifique du pouvoir entre deux présidents élus au suffrage universel.
Dimanche, ils seront 30 candidats à concourir pour succéder à Mahamadou Issoufou. Son compagnon de route politique et ancien ministre de l’intérieur, Mohamed Bazoum, dauphin choisi par le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya), fait figure de favori. Les résultats des municipales du 13 décembre, publiés mardi par la Commission électorale nationale indépendante, lui confirment ce statut. Le PNDS-Tarayya, au pouvoir depuis 2011 et le premier quinquennat de Mahamadou Issoufou, remporte 40 % des sièges de conseillers municipaux à l’issue d’un scrutin jugé équitable par toutes les parties prenantes.
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« Si cette tendance se confirme, nous pouvons envisager une victoire dès le premier tour », confie, plein d’espoir, un diplomate nigérien. Mohamed Bazoum peut s’appuyer sur un parti en ordre de bataille mais, fils de la petite tribu arabe des Oulad Souleymane, il ne bénéficie pas, comme d’autres, du soutien indéfectible de toute une région ou une communauté. C’est là sa faiblesse.
Environnement cauchemardesque
Les opposants les plus sérieux qu’il trouvera sur sa route sont de vieilles connaissances : Seyni Oumarou, un ancien premier ministre de Mamadou Tandja, président de 1999 à 2010, et Albadé Abouba, ex-ministre de l’agriculture de Mahamadou Issoufou. Ni l’un ni l’autre ne disposent de la force de frappe du parti au pouvoir. Ni de celle du principal opposant et ancien président de l’Assemblée nationale, Hama Amadou. Celui-ci a été écarté de la course par la Cour constitutionnelle en raison de sa condamnation, en 2017, à un an de prison dans une affaire de trafic de bébés en provenance du Nigeria. Une condamnation qu’il a jugée motivée par des raisons politiques. Mardi, Hama Hamadou a appelé ses partisans à soutenir l’ex-président Mahamane Ousmane (1993-1996).
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Démographie vertigineuse
Malgré la force de ces vents contraires, le pays ne s’est pas échoué sur le sable, à la différence de ses voisins comme le Mali ou le Burkina Faso. Au contraire, le pays a même progressé dans plusieurs domaines. Avant la pandémie de Covid-19, le Niger affichait en 2019 une croissance économique de 6,3 % l’an et en dix ans, le pays avait gagné une quarantaine de places à l’indice Doing Business de la Banque mondiale (à la 132e place sur 190 pays).
Une ascension qui n’a pas suffi à changer le quotidien des 23 millions de Nigériens, puisque, malgré tout, « environ 42 % vivaient avec moins de 2 dollars par jour en 2019 ». Une situation aggravée par une croissance démographique toujours vertigineuse, qui donne à cet Etat sahélien le record mondial de fécondité avec une moyenne de 7,6 enfants par femme. Si ce rythme ne fléchit pas, la population nigérienne passera à 70 millions de personnes en 2050.
La Centrafrique aux urnes pour l’élection présidentielle malgré la menace rebelle
Le président Faustin-Archange Touadéra, les Nations unies et les principaux partenaires étrangers de ce pays sous quasi-tutelle internationale veulent organiser le vote dimanche 27 décembre, malgré l’offensive d’une nouvelle rébellion.
Par Cyril Bensimon
Entre deux maux, il faut choisir le moindre. Pour la Centrafrique, la formule pourrait se traduire ainsi : mieux vaut organiser des élections dans des conditions impossibles plutôt que les repousser et donner raison à des bandes armées prédatrices et à des acteurs politiques en mal d’influence. Pour le président Faustin-Archange Touadéra, les Nations unies, qui ont déployé près de 13 000 casques bleus et policiers sur place et les principaux partenaires étrangers de ce pays sous quasi-tutelle internationale, le dimanche 27 décembre devra être un jour de vote. Coûte que coûte.
La situation actuelle s’apparente à un arrangement de toutes les vieilles recettes qui ont fait la faillite de cette nation. Additionnées à quelques nouveaux ingrédients. Face à un pouvoir qui laisse entendre que sa victoire au premier tour est acquise, les principaux groupes politico-militaires, avec lesquels un accord de paix avait été signé en février 2019, ont formé une alliance d’intérêt autour de l’ancien président François Bozizé. Quinze jours après le rejet de la candidature de ce dernier, une nouvelle rébellion, la Coalition des patriotes pour le changement (CPC), a lancé, vendredi 18 décembre, une campagne militaire.
Bangui, la capitale, est prise en étau par cette alliance improbable où se retrouvent des milices qui se sont fait la guerre et demandent désormais de concert « la suspension des élections » et la convocation d’« une concertation nationale ». « Les groupes armés ont reçu beaucoup d’argent du pouvoir mais ils ont intégré que Faustin-Archange Touadéra veut frauder au premier tour et ne plus rien partager. Cette offensive a pour but de le pousser à la négociation », juge Thierry Vircoulon, chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri).
A Dékoa, dans le centre du pays, « trois casques bleus du Burundi ont été tués et deux autres blessés » par des « combattants armés non identifiés », a annoncé l’ONU vendredi 25 décembre, en condamnant des attaques menées par « des combattants armés non identifiés ». Celles-ci sont survenues alors que la coalition de groupes rebelles, qui avait décrété mercredi un « cessez-le-feu unilatéral » de trois jours, avait déclaré le rompre, plus tôt dans la journée.
Les électeurs potentiels sous la menace des armes
Fort de l’appui de son nouvel allié russe, qui, de bonnes sources, a envoyé ces derniers jours plusieurs centaines de mercenaires de la société Wagner ainsi que du matériel militaire, mais aussi du Rwanda, qui a dépêché 900 soldats dans le cadre d’un accord bilatéral et 300 casques bleus, le pouvoir est jusque-là resté inflexible. Même s’il paraît aujourd’hui improbable de tenir une présidentielle et des législatives crédibles alors que les candidats ne peuvent plus faire campagne dans la majeure partie du pays et que les électeurs potentiels se retrouvent sous la menace des armes, un proche conseiller du président assure que « l’Autorité nationale des élections a confirmé être en mesure d’organiser le vote le 27 décembre. Nous sommes en train de sécuriser le territoire pour que les opérations puissent avoir lieu. Le président est serein comme nous tous ».
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Agacé par les campagnes anti-françaises qui pullulent dans la presse centrafricaine et sur les réseaux sociaux, Paris est également sorti de sa réserve. Mercredi 23 décembre, deux Mirage ont survolé la capitale et les routes du pays prises par la rébellion. « Dans un contexte d’intoxication extrême, nous voulions adresser le message très clair que nous ne soutenons pas Bozizé et la déstabilisation. Nous nous en tenons au calendrier prévu car un glissement pourrait être sans fin », explique l’Elysée, tout en assurant « ne pas faire du déni de la situation ».
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