Manuella YAPI
« J’espère que ce n’est pas obligatoire parce que je ne veux pas me faire vacciner » contre la covid-19, lance sèchement Marina, infirmière d’une trentaine d’années dans un centre de santé communautaire à Abobo, au nord d’Abidjan, estimant que ces injections ne sont « pas nécessaire pour l’instant » en Côte d’Ivoire, où le taux de guérison avoisine les 99%.
Dans cet hôpital, dont le taux de fréquentation se normalise après avoir chuté de plus de la moitié pendant les premiers mois de la crise sanitaire, Djénéba K., aide-soignante, fait des allers-retours sans masque ni gants et (comme les autres membres du personnel) ne semble pas non plus inquiétée par le non-respect des mesures barrières au sein de l’établissement sanitaire.
« J’ai appris que le vaccin qu’on utilise en Angleterre doit être conservé à -70 degrés. Comment on va pouvoir le conserver correctement ici ? Je préfère encore le confinement », lâche Djénéba, le front plissé, ajoutant qu’elle envisage déjà de « prétexter un palu », si l’administration de l’hôpital décidait de programmer une journée de vaccination obligatoire pour tous.
Comme les enseignants et les forces de défense et de sécurité (FDS), les agents de santé font partie du « personnel de première ligne » sélectionné par le gouvernement ivoirien, sur recommandation de l’OMS, pour recevoir « en priorité » les 5.000.000 de doses de vaccin contre la maladie à coronavirus annoncées dès avril 2021, dans le cadre du Mécanisme Covax auquel 92 pays dont la Côte d’Ivoire ont adhéré.
« Le poste que j’occupe en ce moment ne me met pas en contact direct avec les populations. Je considère donc que je ne suis pas la cible », ironise Mondésir A., gendarme, qui avoue avant tout avoir « horreur des aiguilles, sans compter les mauvais retours sur le vaccin » de Pfizer et BioNTech, notamment les réactions allergiques de deux Britanniques mercredi après une première injection.
L’idée d’un vaccin, dont l’efficacité « n’est pas encore prouvée » selon lui, est perçue par bon nombre d’Ivoiriens comme un « test » pour lequel les Africains en général seraient des « cobayes » et les théories du complot diffusées en masse sur la toile ne sont pas de nature à rassurer les uns et les autres.
Bien qu’elle soit consciente que sa fonction d’institutrice dans une école primaire publique l’expose à la maladie, Solange A., 48 ans, considère que « le véritable risque est du côté des écoles internationales », car les élèves « voyagent beaucoup avec leurs parents dans des pays d’Europe et d’Amérique », les continents les plus touchés par la maladie.
A Abidjan, où la covid-19 est banalisée au point où des pharmacies et des centres de santé autorisent leurs accès sans masques, il est « important » de faire vacciner « toute la population », à condition que le vaccin soit « déjà sûr et non une expérimentation », affirme pour sa part Alexis Yapo, professeur de lycée, rappelant le scandale provoqué par des propos de chercheurs européens qui avaient évoqué l’éventualité de faire des tests en Afrique, au cours d’une émission.
« Je suis moi-même dubitatif en ce moment, mais quatre mois (de décembre 2020 à avril 2021) c’est suffisant pour avoir les premiers résultats des pays ayant déjà commencé à faire vacciner leurs populations », ajoute M. Yapo, qui se « donne le temps de prendre une décision au moment opportun ».
Neuf mois après l’annonce de son premier cas, le 11 mars, la Côte d’Ivoire compte au 12 décembre 21.639 contaminés, 21.261 guéris, 245 malades et 133 morts (soit un taux de létalité de moins de 1%), sur 232.220 échantillons analysés.
Selon Radio France internationale, une récente étude (Coronavirus Anthropologie Afrique, CorAf) « réalisée au Cameroun, Sénégal, Bénin et Burkina Faso révèle que près de sept personnes sur 10 n’accepteraient pas le vaccin contre la Covid-19 ».
Alerte info/Connectionivoirienne.net
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