Interpellée mi-août 2020 par des hommes en treillis encagoulés, Pulchérie Gbalet, présidente de l’Ong de défense des droits de l’homme »Alternative citoyenne ivoirienne » (Aci) a été présentée plus tard le 19 août devant le parquet d’Abidjan où elle sera formellement inculpée et mise sous mandat de dépôt. Elle croupit depuis lors à la Maca avec ses compagnons de lutte dont Djéhi Bi Cyrille, un jeune transitaire qui avait âprement combattu la mesure de restriction de l’importation des véhicules d’occasion en 2018.
Comme si cette mauvaise passe dans laquelle se trouve la défenseuse des droits humains ne suffisait pas, son employeur, le Bureau d’études techniques et de développement (Bnetd) dirigé par Kinampara Coulibaly vient de la virer par courrier n°644 Meps/Dgt/S-c en date du 11 septembre 2020, contenant une décision de licenciement. La décision a été rendue par l’inspecteur du travail d’Abobo-Adjamé sollicitée par la direction du Bnetd et qui agissait par intérim de l’inspecteur de Cocody.
Selon les avocats amenés par Me Eric Saki, les motifs du licenciement sont au nombre de deux. D’un, Madame Gbalet n’aurait pas respecté des instructions de service dans le cadre de la gestion du renforcement de la route Dimbokro-Bocanda-Ananda et de deux – la non-transmission par elle, dans les délais prescrits des comptes-rendus des réunions de séances de consultation publique. Pulchérie Edith Gbalet, faut-il le rappeler, est sociologue et au Bnetd, elle est chargée des enquêtes de terrain en matière d’étude d’impact social.
Face aux journalistes, les avocats ont dénoncé un abus dans la procédure. Ils évoquent même un harcèlement, appelant les autorités à des mesures d’apaisement pour la militante des droits de l’homme qu’elle est.
« Nous rappelons que notre cliente est en détention préventive depuis le 19 août 2020, à la Maca après une garde à vue. Or, conformément aux dispositions de l’article 16.7-e) du Code du travail, « le contrat de travail est suspendu, notamment… e) pendant la période de garde à vue et de détention préventive du travailleur motivée par des raisons étrangères au service et lorsqu’elle est connue de l’employeur, dans la limite de six mois ». Il résulte de cette disposition qu’aucune procédure de licenciement ne peut être engagée contre un employé qui fait l’objet d’une garde à vue ou d’une détention provisoire, son contrat étant suspendu ». Tel est l’angle de contre-attaque des avocats au cours de leur conférence de presse. Pour ces défenseurs de Pulchérie Gbalet, il y a manifestement là, violation des dispositions légales en ce sens que leur cliente est, du reste, une travailleuse protégée. La décision de son licenciement devrait donc être dans un état de droit, nulle et de nul effet comme l’indique l’article 69.1 cité par Me Saki.
Le procès du régime Ouattara
Les avocats de Pulchérie Gbalet ont profité de la tribune qu’ils se sont offerte pour fustiger le régime Ouattara qu’ils qualifient à la limite de champion en violation des droits humains. « Nous vivons une époque de peur, de clivages et de politiques de diabolisation. Les personnes qui osent s’élever pour défendre les droits humains sont de plus en plus prises pour cibles et les endroits sûrs pour elles disparaissent à une échelle alarmante. Ces hommes et ces femmes sont confrontés à une déferlante d’actes de harcèlement, de manœuvres d’intimidation, de campagnes de diffamation, de mauvais traitements et de placements en détention illégaux », ont écrit maîtres Eric Saki, Béné Kouamé Lambert et Daligou Monoko, à l’endroit du régime Ouattara.
Ils ont, après avoir relevé ces traits de caractère du pouvoir Ouattara, invité celui-ci à libérer Mme Gbalet qui n’est ni une criminelle, ni une défenseuse de démons mais plutôt une défenseuse de droits humains qui, sous d’autres cieux, martèlent-ils, bénéficient d’une protection. « Nous avons tous le pouvoir de contester les discours toxiques et de lutter contre l’injustice », ont-ils objecté.
SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr
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