Manuella YAPI
Attendu depuis plusieurs semaines sur la question du troisième mandat d’Alassane Ouattara, le président français Emmanuel Macron, qui se mure dans un silence assourdissant en dépit des interpellations de leaders de l’opposition ivoirienne, et du déjeuner avec son homologue ivoirien vendredi dernier, apparaît comme un acteur majeur dont l’avis pourrait changer le cours du débat politique en Côte d’Ivoire.
Après avoir félicité début mars Alassane Ouattara, à l’annonce de sa « décision historique » de ne pas briguer un troisième mandat, Emmanuel Macron semble embarrassé par le retournement de situation opéré le 6 août, date à laquelle son le Président ivoirien a fait part de son intention de se succéder à lui-même, suite au décès de son poulain.
Depuis lors, l´opposition à Abidjan guette la réaction officielle de Paris, en vain. Et le déjeuner entre les deux chefs d’Etat vendredi à l’Elysée, perçu comme l’occasion de connaitre la position officielle de la France sur ce troisième mandat, ou le premier mandat de la IIIe République c’est selon, a une fois de plus laissé les uns et les autres sur leur faim, vu que l’ »ami » d’Alassane Ouattara n’a laissé échapper aucun propos.
Si la présidence ivoirienne s’est félicitée de la « convergence de vues » sur la nécessité de tenir la présidentielle « dans la stabilité et paix« , l’opposition s’est attelée à décrypter des détails d’une éventuelle divergence entre les deux hommes, comme l’absence d’un tapis rouge [Merkel, Obama, Poutine n´y ont pas eu droit] pour cet échange non officiel, ou encore de poignée de main sur le perron au terme du déjeuner en cette période de crise sanitaire.
L’ex-président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro, candidat à la présidentielle du 31 octobre en exil, qui a moqué le « papa » de 78 ans « quémandant le soutien » du « filston » de 42 ans « pour son troisième mandat inconstitutionnel », s’est réjoui de ce que ce dernier ait découvert l’ »entourloupe » de son interlocuteur grâce « a une bonne connaissance de la situation politique » en Côte d’Ivoire.
Bien qu’il tente visiblement de prendre ses distances, M. Macron est considéré comme « partie prenante dans le débat politique ivoirien » du fait de son tweet de félicitations en mars, a écrit M. Soro dans une lettre, estimant que son « silence face à la forfaiture qui se dessine serait incompréhensible et totalement incompris ».
Le président du Front populaire ivoirien, Pascal Affi N’Guessan, fait partie des opposants (et candidats) qui ont réclamé dans une correspondance une prise de position du président français afin de « donner un nouveau souffle à cette relation si particulière entre (les) deux Etats. Soixante ans après (l’) indépendance » de la Côte d’Ivoire: « Votre silence est, vous ne l’ignorez pas, diversement interprété dans mon pays. Il est analysé, car il autorise toutes les supputations (…). Votre parole est, a contrario, très attendue ».
« Chercher des signes de Macron comme une pythie cherche des signes des dieux pour valider ou invalider l’action d’un homme…(…) On est responsable et on sait quoi faire de nos irresponsables nous-mêmes! », réagit quant à lui l’écrivain ivoirien Armand Patrick Gbaka-Brédé alias Gauz sur Twitter, jugeant « ridicules » certaines interprétations.
L’opposant Mamadou Koulibaly partage cet avis sur ses réseaux en se désolidarisant « de cette opposition qui demanderait à la France de jouer les arbitres dans le jeu politique ivoirien », car « en Côte d’Ivoire, comme bien souvent ailleurs, c’est le peuple ivoirien qui est souverain et non » l’ex-colonisateur.
Alerte info/Connectionivoirienne.net
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