Par Connectionivoirienne Présidentielle 2020
Malmenée face à un pouvoir qui a toujours fait la sourde oreille et imposé le tempo politique, l’opposition ivoirienne devrait maintenant quitter la rue et se préparer efficacement à la présidentielle d’octobre que Ouattara tient à organiser vaille que vaille.
Si l’objectif visé était d’obtenir l’éviction de Ouattara avant terme, il faut noter qu’il fallait bien plus que cette mobilisation terne pour faire bouger les lignes.
Il aurait fallu mobiliser comme un seul homme tout Abidjan, occuper toutes les rues et dans un mouvement d’ensemble bloquer tous les points stratégiques tout en faisant front à toute tentative de répression. C’est seulement à ce prix que l’homme du palais douterait de sa maîtrise de la situation. Ce ne fut pas le cas. Mais au moins, pour l’histoire, il ne sera pas dit que Ouattara s’est déclaré à un troisième mandat et que rien ne s’est passé. Il sera dit qu’il y a eu au moins des téméraires dans ce contexte de confiscation absolue des médias d’État, de propagande outrancière pour dire non à Ouattara. Et c’est bon pour le moral.
Après cela, il convient maintenant de revenir à la raison et de regarder la réalité en face. La réalité est que le 31 octobre, Ouattara et son pouvoir, contre vents et marées, organiseront l’élection à laquelle ils se déclarent déjà vainqueurs avant même le coup d’envoi.
Le président se trouve dans le rôle du joueur et de l’arbitre et pour rien au monde il ne voudra perdre. C’est ici que l’opposition doit lui opposer une stratégie intelligente et gagnante en évitant surtout de tomber dans le piège qui consiste à se laisser contraindre aux débats secondaires et se détourner de l’essentiel. Susciter la colère, refuser tout compromis sur le processus électoral, retarder volontairement les étapes importantes du processus sont des outils favoris utilisés jusque-là pour ne pas donner à l’opposition la moindre occasion de s’organiser.
Il faut sortir de ce piège. A moins de trois mois du premier tour, elle devrait revoir ses priorités en faisant un choix clair entre aller aux urnes ou opter pour la rue.
L’option des urnes nous semble la plus plausible.
Les ivoiriens ont fini par réaliser que Ouattara est le président de la République à l’issue d’une longue crise d’usure. Ils sont donc fatigués de ce tumulte ambiant qu’ils vivent comme une malédiction. Ils ne sortiront donc plus massivement dans les rues, non pas parce qu’ils approuvent les manœuvres d’Alassane Ouattara, mais parce qu’ils veulent tourner la page des années de trouble. Ils n’attendent que cet homme providentiel qui pourra leur permettre de vivre la Côte d’Ivoire paisible qu’ils ont connue sous Houphouët.
Si l’opposition s’organise et qu’elle propose cette offre alternative, elle pourra convaincre plus d’un à sortir le 31 octobre pour sanctionner ce pouvoir dans une sorte de révolution silencieuse. Cela a cependant besoin de sacrifices de la part de cette opposition très hétéroclite. Elle devra s’unir autour d’un projet commun et cela reste encore possible.
Au Sénégal, le bilan d’Abdoulaye Wade était flatteur mais dès qu’il a tripatouillé la constitution pour s’octroyer un troisième mandat, il a eu la réponse des Sénégalais. Il a d’abord été contraint à un deuxième tour là où il croyait rééditer l’exploit de 2007 quand il était élu au premier tour.
En 2012, son troisième mandat avait été accueilli par des réprobations tout azimut. Au deuxième tour, dans le quartier huppé de point E, Il avait non seulement voté sous les huées de certains sénégalais mais il avait fini par perdre la présidentielle avec l’élection de Macky Sall. Celui-là même qu’il avait évincé de son parti.
Cela est possible en Côte d’Ivoire. Même si le Sénégal n’est pas la Côte d’Ivoire et si Alassane Ouattara n’est pas Abdoulaye Wade.
Le Chef de l´État sortant l´a lui-même dit hier en recevant les populations de l´est du pays, certes avec un petit brin d’hypocrisie, chose la mieux partagées en politique «quittons les rues et allons aux élections».
SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr
Commentaires Facebook