Point n’est besoin d’être grand clerc pour s’en apercevoir : la disparition surprise du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly a jeté un froid certain sur l’ensemble de la nation ivoirienne. Le grand élan de compassion qui le traduit depuis ce mercredi noir du 8juillet dernier, n’en finit pas de prendre du volume ici et là. Comme pour dire qu’en réalité, il s’agissait d’un homme de valeur, un grand serviteur de l’Etat, qui aurait été un digne successeur du Président Ouattara à la tête de la Côte d’Ivoire. N’eût été sa subite disparition.
Du coup, cet évènement plus ou moins imprévu vient imposer à l’observateur, une autre lecture de la scène politique ivoirienne. Dont le fait majeur attendu de tous, reste la présidentielle d’octobre prochain. Une réalité, incontournable qu’il va bien falloir vivre le temps venu. En fait, en attendant de savoir qui sera son nouveau candidat à cette compétition électorale, il faut dire que pour l’heure, le Rhdp n’en est plus le parti favori. Et lorsqu’on jette un coup d’œil prospectif au sein de cette formation politique, très peu de candidats de rechange s’affichent, auréolés des mêmes atouts et acquis que Amadou Gon Coulibaly. Et surtout, tout aussi fortement consensuels que lui. Une réalité désormais perçue par les adversaires politiques des Houphouétistes, comme une faiblesse à exploiter. En plus du fait qu’elle les galvanise déjà, à l’idée qu’en définitive, ils ont désormais plus de chance, qu’ils ne croyaient jusqu’ici. Aussi, toutes leurs prières du moment, portent-elles vers une insolubilité totale de cette équation venue contre toute attente s’imposer au RHDP.
D’où, cette promptitude des Houphouétistes à entreprendre des concertations, entamées dès le jeudi 9 juillet, avant même la mise en terre de leur candidat défunt. Pour élaborer un argumentaire de poids, en vue de convaincre le tout premier responsable du Rhdp, à relever ce qu’il convient d’appeler le défi du destin. Précisément incarné par celui qu’aura vécu Amadou Gon Coulibaly, alors si près du but. Qui donc mieux que Alassane Ouattara lui-même pourrait être, la solution de rechange. On le sait, dès l’entame de son deuxième mandat, le Président de la République s’était déjà engagé à limiter sa gestion du pouvoir d’Etat à une durée de dix ans et pas plus. Mais voilà qu’une circonstance pour le moins imprévisible, vient lui exiger de renoncer à cet engagement, bien qu’à valeur de serment. Surtout qu’aucune disposition constitutionnelle ne l’en empêche réellement. Hormis bien entendu ces critiques et autres arguments du camp adverse, qui viendront tenter de l’en dissuader.
Pour autant, les dirigeants du Rhdp ne se bercent pas tant que ça d’illusions. Conscients qu’ils sont, de l’importance que revêt pour Alassane Ouattara, la franchise et le sens sacro- saint de la parole donnée. C’est dire que le cas de force majeur que représente la disparition de leur candidat et qui les aiguillonne à le faire, ne saurait leur garantir aussi aisément une acceptation de Ouattara, à revenir sur sa décision. Ils songent même à un éventuel recours à l’influence de la communauté international, avec en tête la France. Arguant que le risque demeure grand de passer la main à un autre membre du parti, en lieu et place de Amadou Gon Coulibaly. Pour ce faire, la nouvelle dynamique économique conférée à la Côte d’Ivoire par Ouattara, ayant à ce jour attiré plusieurs capitaux étrangers vers divers secteurs de production dans ce pays, est mise en exergue. Aussi, la pérennité de la politique de promotion des investissements, dite « partenariat public-privé », qui est pour beaucoup dans le succès de ce renouveau économique ivoirien, est présentée comme un facteur exigeant que ce soit Ouattara. Lui qui en est après tout l’artisan principal, auquel Amadou Gon Coulibaly aurait pu aisément succéder, pour en avoir reçu la formation et donné toute la preuve requise. Dans ce partenariat, les retours sur investissements pour nombre de détenteurs des capitaux étrangers, issus des pays de l’Union européenne, n’ont pas encore atteint leur pleine mesure. Bien qu’ils soient déjà bons à prendre, grâce à la saine gestion que Ouattara et son gouvernement ont fait jusqu’ici de l’économie ivoirienne. Comment s’assurer qu’il en sera continuellement ainsi, si quelqu’un d’autre que le Président de la République, devait tenir les commandes ?
Une pétition a même été lancée , toujours dans l’optique d’amener le Chef de l’Etat à accepter la proposition.
Dans le même temps, nombre de militants du Rhdp, choqués par la mort du Premier ministre et déterminés par ce fait même à relever ce défi que leur impose le destin, se disent tout de même prêts à soutenir et conduire au pouvoir, quiconque aura été en définitive choisi en remplacement de leur candidat défunt. Et ce, tout en demeurant viscéralement portés sur la personne du Président de la République.
Et comme le souhaitent certaines personnes, si l’on devait en arriver là finalement, le choix de cette autre personne en dehors du Chef de l’Etat, pourrait s’opérer à travers l’organisation d’une élection primaire, dans l’optique de bien faire les choses, soutiennent-ils. Mais, il faut se rendre à l’évidence, pour reconnaitre qu’un tel mode de désignation, reste à introduire dans la culture et les pratiques démocratiques africaines. L’usage du consensus au sein des partis, est encore de mise. Surtout pour des Houphouétistes, où en pareil cas le dialogue, caractéristique fondamentale de cette philosophie politique, a de tout temps représenté le moyen idéal utilisé, en vue de parvenir au consensus. C’est bien ce qui fut fait pour la désignation de Amadou Gon Coulibaly, bien que d’autres, notamment Mabri Toikeusse et Amon Tanoh Marcel demandaient plutôt, la tenue d’une convention de désignation. Rencontre au cours de laquelle, tous ceux qui voudraient être choisis, se soumettraient au choix du parti.
Il est fort probable que, le Conseil des ministres extraordinaire de ce lundi, nous donne quelques indications un peu plus précises, sur le nouveau candidat du Rhdp à cette présidentielle.
Moussa Ben Touré
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