Par Grah Ange Olivier, magistrat
Monsieur le procureur gardons la mesure
L’émotion et la consternation suscitées par les conditions dramatiques du décès des époux Koffi n’autorise pas le Procureur de la République d’Abidjan à étendre injustement les poursuites engagées pour établir les différentes responsabilités au-delà des personnes à qui une justice qui doit rester sereine peut légalement les imputer.
Je cherche à comprendre l’implication des propriétaires de la cave qui ne font qu’exercer une activité parfaitement légale. A examiner les infractions qui leur sont reprochées, on a le sentiment que le parquet tenait à tout prix à étendre les poursuites à ces personnes. A force d’être permanemment sur les réseaux sociaux à la recherche de cyber activistes à mettre sur le verrou, le parquet s’est laissé guidé dans son action par la publication de photos des mis en cause dans la cave où ils se sont enivrés suivis de commentaires désapprobateurs de certains internautes pour justifier non seulement l’audition des propriétaires des lieux et comme si cela ne suffisait leur arrestation pour un comportement dont on a du mal faire le lien avec l’accident qui a lieu. C’est tout simplement de l’abus de pouvoir.
D’abord Les caves qui sont des espaces de loisirs dont le fonctionnement est à mi-chemin entre le maquis et le bar ne sont pas concernées par l’interdiction d’ouverture imposée à certains types d’établissement. Et en plus qu’est-ce ça aurait de différent si c’était dans un maquis où les mis en cause s’étaient adonnés à la beuverie. S’agissant de la mise en danger de la vie d’autrui, cela ressemble furieusement à une tentative inexplicable et désesperée de trouver quelque chose à leur reprocher. Il en est de même pour le non respect des mesures barrières, il va falloir arrêter la quasi-totalité des Abidjanais car on ne peut que constater que c’est le sport favori du moment. Enfin je ne vois pas en quoi, ces personnes ont délibérément et volontairement mis la vie d’autrui en danger.
Le même sentiment m’anime pour la jeune fille qui était certes dans le véhicule avec les deux autres mais à qui on peut légalement rien imputé. Là encore, il est fait recours à la violation des mesures barrières et à la mise en danger de la vie d’autrui pour pallier l’absence de faits à lui reprocher. Ce n’est pas parce qu’elle a eu un comportement moralement condamnable que cela justifie qu’on puisse la poursuivre pénalement.
A part les trois derniers mis en cause qui doivent à mon sens, tous être poursuivis pour homicides involontaires car leurs comportements tombent à divers titres sous le coup de cette prévention, il y a de lieu de savoir raison gardée car le rôle du Parquet est de poursuivre les personnes réellement impliquées dans l’accident. Il n’y a pas lieu de se lancer, au détriment de la liberté d’innocents dans une opération de charme qui n’a rien à voir avec sa mission et laisse une étrange sensation d’injustice que n’aurait certainement pas souhaité les victimes dont la foi en Dieu comme le témoigne ce qui les ont connu n’est pas une des moindres qualités pour lesquelles elles sont pleurées.
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