(Agence Ecofin) – Le 21 avril 2020, la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), institut d’émission des six pays de la Cemac (Cameroun, Gabon, Congo, RCA, Tchad et Guinée équatoriale), a une nouvelle fois fait une offre de liquidité d’un montant de 250 milliards FCFA aux banques en activité dans cet espace communautaire. Selon les résultats de cette opération, les soumissions des établissements de crédit n’ont culminé qu’à 58,6 milliards FCFA, ce qui représente un peu plus de 20% du montant offert.
Le 31 mars et le 7 avril, la Beac avait déjà proposé à chacune des opérations 250 milliards FCFA au système bancaire pour des résultats similaires. Les soumissions des banques ont, en effet, été respectivement de 32,7 milliards FCFA (13%) et 57,3 milliards FCFA (23%).
Ce peu d’intérêt des banques face à la liquidité mise à disposition par la Beac est aux antipodes de l’appel à la facilitation de l’accès au refinancement lancé par les banquiers camerounais, au lendemain du déclenchement de la crise du Coronavirus dans le pays, début mars 2020.
« La Beac devrait renoncer temporairement à la décision de réduction des liquidités dans le système bancaire, qui a été prise par le Comité du marché monétaire lors de la session de février 2020, et envisager plutôt de faciliter l’accès des banques au marché monétaire par la baisse de ses taux d’intérêt et l’augmentation des plafonds de refinancement en cas de pression de liquidités », a suggéré l’Association des professionnels des établissements de crédit du Cameroun (Apeccam), dans un communiqué rendu public le 20 mars 2020.
Accédant à cette requête, la Beac, au sortir de son Comité de politique monétaire tenu par visioconférence une semaine plus tard, a baissé deux de ses taux directeurs. Dans le même temps, la Banque centrale a suspendu sa décision de ponctionner les coffres-forts des banques, et a plutôt annoncé la reprise des injections de liquidité, afin de permettre aux banques d’avoir des marges de manœuvre pour financer les économies. Par ailleurs, la Beac a montré ses bonnes dispositions à revoir à la hausse, jusqu’à 500 milliards FCFA par semaine, en cas de besoin, le volume de liquidité à injecter dans le circuit bancaire de la Cemac.
Suspension du traitement des dossiers de crédits…
Un mois plus tard, le tableau est plutôt morose : la liquidité mise à disposition par la Banque centrale fait très peu courir les banquiers de la Cemac, crédités d’environ 2000 milliards de FCFA de réserves libres, selon le FMI. Mais au-delà de ce matelas financier dont disposent déjà les banquiers de la Cemac, c’est plutôt le ralentissement de l’économie dans sa globalité, qui semble expliquer le peu d’appétit des banquiers pour la liquidité de la Banque centrale.
« La banque va se refinancer sur le marché monétaire quand elle a des besoins de liquidité. Pour l’instant, nous n’en avons pas, puisque tout le monde est plongé dans une sorte d’attentisme. Dans les entreprises, l’heure est encore à l’observation des conséquences de la pandémie du Coronavirus. Les demandes de crédits ne fusent pas de la part des entreprises. Ce que nous faisons le plus en ce moment, c’est la restructuration des crédits déjà contractés par les entreprises, et qui sont ou seront bientôt à échéance. Cette restructuration vise à ne pas leur mettre la pression pour les remboursements, au regard de la crise sanitaire actuelle », explique un banquier.
Cependant, ce dernier confesse qu’en cas de sollicitation de prêt par une entreprise, notamment pour des importations de matières premières ou autres marchandises, les banques se montrent encore plus prudentes que par le passé, au regard du contexte. « Certains confrères ont d’ailleurs suspendu le traitement des demandes de crédits, principalement celles émanant des entreprises privées qui sont plus exposées à la crise sanitaire actuelle », apprend-on.
Cette réalité semble encore plus prégnante dans les établissements de microfinance. Selon nos sources, dans ces structures, en plus de la suspension du traitement des demandes de crédits des entreprises et des particuliers opérant principalement dans le secteur privé, des crédits préalablement validés ont ensuite été annulés. Ils n’ont donc plus été décaissés. Au grand dam des bénéficiaires.
Brice R. Mbodiam
Commentaires Facebook