L’ONU demande 2.500 milliards de dollars pour les pays en développement
Développement économique
La pandémie de Covid-19 a engendré des « dommages économiques sans précédent » pour les deux tiers de la population mondiale vivant dans les pays en développement.
Les Nations Unies ont plaidé lundi en faveur d’un programme de soutien d’un montant de 2.500 milliards de dollars.
« Les retombées économiques du choc se poursuivent et sont de plus en plus difficiles à prévoir, mais il est clair que les choses vont s’aggraver pour les économies en développement avant de s’améliorer », a déclaré Mukhisa Kituyi, le Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED).
Pour faire face à « l’imminence d’un tsunami financier cette année », la CNUCED propose une stratégie en quatre volets pour traduire les expressions de solidarité internationale en actions concrètes.
Il s’agit d’abord d’un apport en liquidités à hauteur de 1.000 milliards de dollars. « Une sorte de largage d’argent par hélicoptère pour ceux qui sont laissés pour compte » grâce à la réaffectation des droits de tirage spéciaux existants au Fonds monétaire international (FMI). L’agence onusienne préconise aussi l’ajout d’une nouvelle allocation qui devra aller bien au-delà de ce qui a été fait en 2009 en réponse à la crise financière mondiale.
Deuxièmement, la CNUCED recommande une annulation de la dette pour les économies en difficulté et un arrêt immédiat des paiements de la dette souveraine qui devrait être suivi d’un allégement significatif de la dette.
« Un point de référence pourrait être l’allégement de la dette allemande administré après la Seconde guerre mondiale, qui a annulé la moitié de sa dette en cours », fait-elle remarquer.
L’agence onusienne propose ainsi l’annulation de 1.000 milliards de dollars cette année sous la supervision d’un organisme créé de manière indépendante.
Un plan Marshall pour la santé
Face au nouveau coronavirus, la CNUCED demande également un « plan Marshall » pour un rétablissement de la santé. « Depuis la crise de 2008-2009, très souvent, les états développés n’ont pas respecté leurs engagements en termes d’aide publique aux pays en développement (ADP), a expliqué Nicolas Maystre, Economiste à la Division de la mondialisation et des stratégies de développement à la CNUCED et co-auteur de la stratégie.
« Si les Etats s’étaient engagés à respecter leurs promesses, il y aurait eu à peu près 2.000 milliards de dollars qui auraient dû affluer vers les pays en développement. Etant donné l’urgence de la situation, il est important de débloquer très rapidement à peu près un quart de cette aide (APD) ».
La CNUCED estime donc que 500 milliards de dollars supplémentaires -essentiellement sous forme de subventions – devraient être affectés aux services de santé d’urgence et aux programmes d’aide sociale connexes et ainsi permettre aux pays en développement de faire face à la situation dans les mois à venir.
Enfin, les contrôles des capitaux devraient se voir accorder une place légitime dans tout régime politique afin de limiter l’augmentation de leurs fuites, de réduire l’illiquidité due aux ventes sur les marchés des pays en développement et d’arrêter la baisse des prix des devises et des actifs.
Toutes ces mesures permettront de limiter les dégâts d’autant que selon la CNUCED, la vitesse à laquelle les ondes de choc économiques de la pandémie ont frappé les pays en développement est « spectaculaire », même par rapport à la crise financière mondiale de 2008. Selon l’agence onusienne, la pandémie de Covid-19 est déjà synonyme de « dommages économiques croissants ».
Dans un dernier rapport, la CNUCED montre qu’au cours des deux mois qui se sont écoulés depuis que le coronavirus a commencé à se propager au-delà de la Chine, les pays en développement ont subi un énorme coup. Un coup qui s’est notamment traduit par des fuites de capitaux, des écarts croissants entre les obligations, des dépréciations des devises et des pertes de recettes d’exportation, notamment en raison de la chute des prix des produits de base et de la diminution des recettes touristiques.
« L’impact de la plupart de ces mesures a été plus sévère qu’en 2008 et, l’activité économique nationale ressentant désormais les effets de la crise, la CNUCED n’est pas optimiste quant au type de reprise rapide observé dans de nombreux pays en développement entre 2009 et 2010 », souligne l’agence onusienne.
La CNUCED constate par ailleurs que la valeur des monnaies des pays en développement a chuté de 5% à 25% par rapport au dollar depuis le début de l’année et, là encore, plus rapidement que durant les premiers mois de la crise financière mondiale de 2008.
De plus, les prix des produits de base ont également chuté précipitamment depuis le début de la crise. La baisse globale des prix a été de 37% cette année, selon l’agence onusienne. A titre d’exemple, les prix du sucre ont chuté de 15%, ceux du coton et du cuivre de 22% et ceux des produits énergétiques de plus 55%.
Ces signaux inquiétants interviennent alors que l’économie mondiale entrera en récession cette année, avec une perte de revenus mondiale estimée à plusieurs milliards de dollars.
« Les pays en développement, à l’exception probablement de la Chine et peut-être de l’Inde, seront confrontés à de graves difficultés », avertit la CNUCED qui estime que les pays en développement devront faire face à un déficit de financement de 2.000 à 3.000 milliards de dollars au cours des deux prochaines années.
Compte tenu de la détérioration de la situation mondiale, les contraintes budgétaires et de change vont forcément se resserrer davantage au cours de l’année. « Les économies avancées ont promis de faire « tout ce qu’il faut » pour empêcher leurs entreprises et leurs ménages de subir une lourde perte de revenus », a déclaré Richard Kozul-Wright, Directeur du service chargé des stratégies de mondialisation et de développement à la CNUCED.
« Mais si les dirigeants du G20 veulent tenir leur engagement de « réponse mondiale dans un esprit de solidarité », il faut prendre des mesures proportionnées pour les six milliards de personnes qui vivent en dehors des économies importantes du G20 », a souligné l’économiste onusien.
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