Le Président Alassane Ouattara a annoncé finalement hier solennellement sa décision de ne pas se présenter à l’élection présidentielle de 2020.
Les démocrates sous d’autres tropiques s’étonneraient bien de la salve d’applaudissements, de remerciements et de félicitations qui accompagne cette décision d’une normalité banale dans une démocratie, en ce qu’elle n’est ni plus ni moins que conforme à la Constitution.
Sauf que dans le contexte général de nos tropiques à nous, où l’anormalité fait office de normalité et l’ordinaire d’extraordinaire, le fait (le respect de la Constitution) est si rare pour revêtir les caractères exceptionnel et historique.
L’histoire du continent et notamment de notre sous-région compte sur les doigts d’une main les Présidents sortant qui, devant la clameur du peuple, ont opté pour la sagesse du recul pour se conformer au respect de la Constitution. Le Président Ouattara l’a fait, il doit en être vivement salué. Par cette décision salutaire, le Président Ouattara ménage substantiellement le cocktail Molotov qui menace si dangereusement la paix sociale dans notre pays.
En ma qualité d’activiste de la paix, ayant constamment et régulièrement multiplié, à travers déclarations et lettres ouvertes, les appels et supplications au Président Ouattara de renoncer à son projet anticonstitutionnel de 3 e mandat, je veux saluer le courage politique (quand l’on a vu les collaborateurs pleurer à chaudes larmes l’on a compris que ce ne fut pas facile) et la sagesse de la décision mais aussi et surtout, l’humilité du Président Ouattara qui se plie ainsi devant les désidératas du peuple souverain de Côte d’Ivoire. C’est tout à son honneur.
Toutefois, le cocktail Molotov, bien que ménagé de ce puissant oxygène du 3e mandat, reste explosive, en ce qu’il comporte encore des facteurs tout aussi inflammables et dangereux pour la paix sociale, et là-dessus, hélas, l’autre temps du discours du Président ne semble pas donner de bonnes indications.
Il a en effet confirmé sa volonté de modifier la Constitution. Bien entendu, il faudra attendre le projet complet de modification qui arrivera très vite d’ailleurs pour une pleine appréciation. Mais le ton et les aspects annoncés soulèvent déjà quelques interrogations majeures et semblent confirmer les inquiétudes de ceux, comme moi, qui s’interrogeaient sur le motif caché de cette obstination à 7 mois du 31 octobre 2020.
A quelle logique démocratique renverrait la nomination du vice-président par un individu fut-il Président de la République, en lieu et place du détenteur exclusif du pouvoir qu’est le peuple souverain ? Voudrait-on priver le peuple de sa souveraineté et de son droit inaliénable de se choisir lui-même ses gouvernants ? Voudrait-on nous importer la trouvaille russe entre Poutine et Medvedev c’est-à-dire un prochain exécutif avec Gon Président et Ouattara vice-président ?
Ouattara voudrait-il partir pour ne pas partir ?
Et que cache cette subite possible impossibilité de tenir les législatives à temps qui justifierait une prorogation des mandats là où le Président ne cesse de rassurer et de marteler que la Présidentielle se tiendra bel et bien le 31 octobre 2020 ? Pourquoi la présidentielle se tiendrait et les législatives non ? Les législatives seraient-elles plus complexes que la Présidentielles ? Le Président de la République serait-il en train de nous annoncer là, comme je vous l’ai toujours dis, que la Présidentielle pourrait ne pas se tenir le 31 octobre 2020 ?
Bref attendons de voir.
Mais quel dommage cela serait que de voir cet acte ‘’historique’’ à porter au crédit du Président Ouattara, en venir à être entaché voire annihilé par d’autres actes et mesures aux antipodes de sa visée pacifique que nous saluons tous aujourd’hui !
C’est pourquoi, fidèle, constant et déterminé à honorer ma mission, je veux, tout en me réjouissant d’avoir été écouté sur ce point du 3e mandat, arborer à nouveau ma tunique de sentinelle-conseiller pour exhorter le Président à ne pas s’arrêter en si bon chemin, mais à profiter de cette dynamique de sagesse et de courage pour vider définitivement ce cocktail de toute sa charge explosive à savoir :
– Renoncer à la modification de la constitution dans les conditions et contexte actuels
– Reformer la Commission Électorale Indépendante ‘CEI)
– Permettre à chaque citoyen d’avoir sa Carte Nationale d’Identité
– Libérer les prisonniers politiques et militaires
– Et comme le Président semble désormais admettre que le temps ne suffira pas pour des élections le 31 octobre et fin décembre respectivement pour la présidentielle et les législative, eh bien, engager ici et maintenant le dialogue inclusif et la concertation nationale pour rechercher le CONSENSUS NATIONAL à l’effet d’ouvrir dès le retrait du président sortant le 31 octobre 2020, la TRANSITION CONSENSUELLE qui s’impose maintenant à nous.
En attendant le projet complet,
Dieu bénît la Côte d’Ivoire !
Fait à Abidjan, le 06 mars 2020
KONAN Kouadio Siméon (KKS)
Président d’Initiatives Pour la Paix
Porte-parole des sans voix et des sans écritures
Candidat aux Présidentielles 2010 et 2015
Commentaires Facebook