L’ancien président Omar Al-Béchir répondra-t-il un jour devant la justice internationale d’accusations de génocide, de crimes de guerre et contre l’humanité pour lesquelles il est poursuivi depuis des années ?
Sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale depuis 2009, il n’avait cessé de narguer la justice internationale lorsqu’il était président. Multipliant les déplacements à l’étranger, il était devenu l’une des figures de proue des détracteurs de la juriction. Depuis le renversement du dictateur il y a près d’un an après trois décennies à la tête du pays, aucune évolution ne semblait se dessiner : le nouveau pouvoir à excluait tout transfèrement.
Coup de théâtre, le 11 février, à l’issue de pourparlers de paix entre ce pouvoir et des groupes rebelles du Darfour qui se sont tenues à Juba, la capitale du Soudan du Sud, Mohamed Hassan Al-Taishi, un membre du “conseil souverain”, a déclaré, selon Al Jazira, qu’il était impossible de “panser les plaies” sans la comparution “de ceux faisant l’objet de mandats d’arrêt de la part de la Cour pénale internationale (CPI)”. En premier lieu “Bachir devra répondre des atrocités commises au Darfour [dans le conflit qui a éclaté en 2003] où, selon les Nations unies, 300 000 personnes ont été tuées et 2,5 millions déplacées”, souligne pour sa part Middle East Eye.
Une annonce saluée, mais avec scepticisme
Si elle a été immédiatement saluée par les organisations des droits de l’homme, cette annonce surprise est-elle à prendre au pied de la lettre? Alors que le Conseil souverain, qui dirige le pays, est composé de civils et de militaires, “Mohamed Hassan Al-Taishi avait-il le soutien des militaires”, qui s’interroge le New York Times ? “‘Je suis très sceptique’, explique Magli e-Gisouli, un membre de l’Institut de la Rift Valley, cité par le correspondant dans la région du New York Times. Envoyer Omar Al-Béchir à la CPI est un sac de noeud que les militaires ne veulent pas ouvrir à mon avis. C’est une question qui divise énormément l’armée.” L’analyste conclut : “Al-Taishi s’est peut-être trop avancé.”
La semaine dernière ce civil membre du Conseil souverain avait néanmoins déjà confié à des diplomates à Khartoum que les militaires seraient prêts à transférer Omar Al-Béchir à la CPI, révèle le New York Times. À une condition : que la Cour ne poursuive personne d’autres pour les crimes commis au Darfour. Plusieurs des généraux qui siègent au sein du Conseil souverain sont mis en cause pour leur rôle dans le conflit.
La CPI n’a pas été informée
Contactée par le journal américain, un responsable de la Cour pénale international a de son côté affirmé qu’aucune notification officielle n’était parvenue de la part du Soudan.
“En décembre 2019, Béchir avait été jugé dans son pays et a écopé de deux ans de réclusion pour corruption qu’il devait purger dans un centre de correction. La loi soudanaise prévoit que les personnes âgées de plus de 70 ans ne peuvent pas être placées en prison. Or Béchir est âgé de 76 ans”, précise la BBC. Il avait aussi été jugé pour sa responsabilité dans la mort de plusieurs manifestants lors des marches ayant conduit à la chute de son régime.
Courrier International
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