CONSEIL PONTIFICAL. L’église catholique est sur tous les fronts pour espérer mettre la Côte d’Ivoire à l’abri d’une nouvelle crise politique consécutive à l’élection présidentielle.
Elle ne fait naturellement pas l’unanimité au pays de Félix Houphouët-Boigny où « la paix, ce n’est pas un vain mot, c’est un comportement ». Si certains applaudissent cette démarche, d’autres condamnent la « politisation de l’église ».
Pourtant, l’église catholique est bel et bien dans son rôle d’interpellation, de prévention et d’anticipation. C’est convaincu de cette mission prophétique et évangélique qu’au lendemain de sa prise du pouvoir, Alassane Ouattara a tout fait pour être reçu, le 16 novembre 2012 au Vatican, par le pape Benoît XVI (photo). « Je suis venu prendre votre bénédiction et vos conseils », déclarait-il au Souverain pontife.
Et face à l’orage qui gronde à nouveau, aux nuages qui s’amoncellent à l’horizon à la veille de la présidentielle d’octobre 2020, l’église catholique, qui a écouté cette prière, est en première ligne et a rompu avec la langue de bois.
Le 22 juin 2019 à Agboville déjà, la conférence des archevêques et évêques tirait la sonnette d’alarme à travers cet appel:
« Évitez-nous une autre guerre ».
Et c’est parce que cet appel n’est pas entendu que Mgr Jean-Pierre Cardinal Kutwa, archevêque métropolitain d’Abidjan, a autorisé une « marche priante » baptisée « Allons à la paix » à Abidjan, provoquant un incompréhensible choc émotionnel.
Cette grande première aura lieu le 15 février 2020 dans le quartier des affaires du Plateau. Pour « sensibiliser à la paix et prier pour des élections apaisées en Côte d’Ivoire ».
La tension ne cesse, en effet, de monter entre le pouvoir et l’opposition. Et, malgré l’appel de Mgr Kutwa, le 30 décembre 2019 en faveur de la paix, le bras de fer ne fait que s’exacerber avec la volonté du chef de l’État de modifier la Constitution, les procédures judiciaires aussi bien à Abidjan qu’à Paris, les arrestations et condamnations d’opposants et les contestations des règles du jeu électoral.
Aussi, la conférence des archevêques et évêques a-t-elle encore mis le pied dans le plat à l’issue de sa 114è assemblée plénière (14-19 janvier 2020) à Korhogo. Elle s’est appuyée sur le message du pape François, le 12 décembre 2019, pour la 53è journée mondiale de la paix et intitulé « La paix, un chemin d’espérance: dialogue, réconciliation et conversion écologique ».
Et comme, selon le pape François, « on n’obtient pas la paix si on ne l’espère pas », les évêques ivoiriens ont, par conséquent, demandé « aux gouvernants, aux citoyens et à tous ceux qui sont épris de justice et de paix » de se mobiliser « pour des élections transparentes, justes et ouvertes en vue de la réconciliation et de la paix ».
L’heure apparaît grave dans un pays où l’église catholique à travers la communauté Sant’Egidio est activement et discrètement intervenue en 2010-2011 durant la crise post-électorale.
Et le pape François met alors en garde tous les pyromanes de tous bords par ce conseil pontifical: « Le monde n’a pas besoin de paroles creuses mais de témoins convaincus, d’artisans de paix ouverts au dialogue sans exclusion ni manipulation ».
F. M. Bally
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