Guillaume Soro, candidat à la présidentielle de Côte d’Ivoire : « J’espérais que Macron soit plus courageux »
Par Hervé Gattegno/Antoine Malo 28 décembre 2019
Empêché d’entrer dans son pays, Guillaume Soro, candidat à la présidentielle de Côte d’Ivoire, est frappé par un mandat d’arrêt international. Il dénonce une manipulation d’Alassane Ouattara et regrette l’attitude d’Emmanuel Macron.
La voix est claire, le ton vif. De retour à Paris, où il vit exilé depuis six mois, Guillaume Soro ne semble pas marqué par son come-back manqué de lundi en Côte d’Ivoire. « Je vais bien », lâche d’emblée l’ancien président de l’Assemblée nationale, contre qui les autorités de son pays viennent pourtant d’émettre un mandat d’arrêt international. Au JDD, celui qui a aussi été Premier ministre sous Gbagbo puis Ouattara, confie son intention de faire campagne. Il réfute cependant toute volonté de prendre les armes : « Il ne s’agit que de résistance politique. » Il dit aussi sa déception du peu de soutien de la France.
Après votre retour manqué en Côte d’Ivoire, allez-vous rester en France?
Oui, puisque le président Ouattara m’interdit de rentrer dans mon pays. […] Emmanuel Macron n’a pas la capacité de dire à ses hôtes qu’il était important de respecter la démocratie en Afrique
Que s’est-il passé lors de votre retour avorté en Côte d’Ivoire?
Après m’être déclaré candidat en octobre, j’avais décidé de me rendre le 23 décembre à Abidjan pour lancer ma campagne. Nous étions dans l’avion lorsque le pilote est arrivé dans la cabine : une tour de contrôle au Niger venait de l’avertir qu’il était périlleux d’atterrir à l’aéroport d’Abidjan, où il y avait un déploiement anormal de forces de l’ordre. J’ai insisté, mais le pilote m’a répondu »pas question! », d’autant qu’un assaut contre l’appareil était possible.
Pourtant, vous saviez que ce voyage allait être périlleux. La veille, vous aviez déjà renoncé à atterrir à Abidjan. Avez-vous négocié ce déplacement avec les autorités ivoiriennes, notamment le président Ouattara?
Je n’ai jamais eu de conversation avec M. Ouattara. Le 22 décembre, je devais effectivement me rendre à Abidjan. Mais j’ai été contacté par une personne qui souhaitait que le voyage n’interfère pas avec la visite d’Emmanuel Macron en Côte d’Ivoire. Ce monsieur s’appelle Pierre Fakhoury [architecte et entrepreneur proche du pouvoir ivoirien].
Pourquoi prendre cet appel de Pierre Fakhoury au sérieux? Parlait-il au nom des autorités françaises?
Il prétend y avoir ses entrées. Et c’est un grand ami d’Alassane Ouattara. Donc, après qu’il m’a dit que mon arrivée pouvait nuire à la visite de Macron, j’ai accepté de différer ce déplacement de vingt-quatre heures. À ce propos, je suis quand même surpris : le président français s’est rendu en Côte d’Ivoire, y a fêté son anniversaire mais il n’a pas eu la capacité de dire à ses hôtes qu’il était important de respecter la démocratie en Afrique. J’espérais qu’un président comme lui ait davantage de courage et de maturité pour le faire.
Le journal du Dimanche
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