Ouattara a-t-il froissé ses homologues Ouest africains ?

Réforme du Franc Cfa – D’Abuja à Abidjan à la conférence avec Macron

Ouattara a-t-il froissé ses homologues Ouest africains ?

L’on se souvient que le président français Emmanuel Macron est arrivé à Abidjan le 20 décembre 2019. A peine l’a-t-il accueilli au bord de la lagune Ebrié qu’Alassane Ouattara a pris le vol pour Abuja au Nigeria où il a participé samedi 21 décembre à un sommet de la Cedeao. Certains comme le commentateur Ferro Bally y avaient vu une manière de bousculer de vieilles habitudes, une petite révolution mettant fin à de vieux clichés qui voudraient que Ouattara annule son rendez-vous d’Abuja pour accueillir convenablement son homologue français.

Mais on en sait un peu plus sur les raisons du déplacement d’Alassane Ouattara en terre nigériane. La première raison est d’ordre tactique. Le président ivoirien qui a préparé sa rencontre avec Macron savait exactement que la question du franc Cfa figurerait au menu de leur rencontre et il lui fallait se prémunir. A Abuja, il était allé chercher une sorte d’onction de ses pairs ouest-africains afin de crédibiliser son discours devant le président français.

Mais à l’analyse du communiqué final qui a sanctionné ce sommet de haut niveau de la Cedeao, l’on ne peut véritablement se soustraire aux spéculations actuelles depuis l’annonce du chef de l’Etat tant les contours dudit communiqué sont flous. Ouattara a-t-il eu le feu vert de ses homologues d’Afrique de l’Ouest pour faire ses déclarations devant Macron ? S’agit-il d’un projet solitaire comme l’affirment certains ?
Toutefois, la création de l’union monétaire a été un point clé traité à cette réunion et cela apparaît clairement dans le communiqué final. Là où il est question de remplacement du Fcfa par l’Eco à partir de juillet 2020, les chefs d’Etat de la Cedeao, ‘’tout en se félicitant de l’amélioration de l’état de convergence macroéconomique en 2019’’, ont plutôt ‘’exhorté les pays membres à poursuivre les efforts visant le respect des critères de convergence’’. Ici aucune date n’est avancée dans la mise en circulation de la future monnaie dont le symbole Ec (Eco) a été adopté par la conférence des chefs d’Etat. Comme quoi l’Eco est la monnaie commune à la Cedeao et non celle de la seule Umoa (Union monétaire ouest africaine). La même conférence des chefs d’Etat et de gouvernement, selon le point 17 du communiqué final, a adopté la dénomination de la future banque centrale : ‘’Banque centrale de l’Afrique de l’Ouest’’ (Bcao).

Le point 18 du communiqué final, quant à lui, justifie plus la présence du président ivoirien à ce sommet d’Abuja. « S’agissant du dossier de la monnaie unique de la Cedeao, après avoir entendu l’exposé de Sem Alassane Ouattara, président de la conférence des chefs d’Etats et de gouvernements de l’Uemoa, la conférence a pris acte des transformations importantes en cours au niveau de la zone monétaire de l’Umoa. Cette réforme de la zone monétaire de l’Umoa facilitera son intégration dans la future zone monétaire de la Cedeao (Eco). Les chefs d’Etats et de gouvernements se sont félicités des évolutions de la zone monétaire Umoa », indique le communiqué. Quelle était la teneur du discours de Ouattara devant la conférence des présidents de la Cedeao ? La note d’information de la présidence ivoirienne transmise le 22 décembre est muette là-dessus. Elle indique simplement qu’il y a eu un huis clos entre les chefs d’Etats. On n’en saura donc pas davantage.

Une chose est cependant sure, depuis le début de ce projet de monnaie unique Cedeao, il n’a jamais été question d’un simple remplacement du Fcfa par l’Eco. Il s’agit d’une réforme en profondeur allant jusqu’à la possibilité de fluctuation de cette nouvelle monnaie par aux devises étrangères dont l’Euro. Et non une parité fixe comme annoncée. C’était la position défendue par Mahamadou Issoufou, président du Niger et président en exercice de la conférence des chefs d’Etats et de gouvernements de la Cedeao.

Toujours est-il que dans ce dossier Eco-Cfa, la controverse aura continuellement cours en l’absence d’une communication claire qui vienne balayer tout le flou autour de l’affaire.

SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr

Commentaires Facebook