C’est, à nouveau, une volée de bois vert pour diaboliser Bédié (photo). Dans la guerre des chiffres, il a tourné en dérision, avec ses mots, la mobilisation à la manifestation du parti présidentiel à Montreuil.
« Le RHDP a fait son meeting à Paris avec de vrais faux militants. Ils sont allés chercher des Maliens et ont partagé 100 euros », s’est exprimé, le 14 novembre 2019, le président du PDCI-RDA.
Dans un contexte politique sensible et volatile, la sortie de l’ancien chef de l’État et ex-PCA de la « société » Côte d’Ivoire peut être soupçonnée de diversion nationaliste ou de dérive identitaire, mais elle est surtout, à l’instar des autres, une stigmatisation des pratiques, jugées peu orthodoxes, du pouvoir ivoirien.
Depuis sa rupture politique avec Ouattara, Bédié se découvre, à sa manière, comme un lanceur d’alerte, qui veut, à l’instar d’Edward Joseph Snowden, « dire au public ce qui est fait en son nom et ce qui est fait contre lui ».
Le 5 juin 2019, il a donné un coup de pied dans la fourmilière en tirant la sonnette d’alarme. Il a fustigé d’un côté, l’orpaillage clandestin avec « des étrangers armés stationnés dans beaucoup de villages » et de l’autre, la fraude sur l’identité ivoirienne effectuée par l’État, notamment dans la commune abidjanaise d‘Abobo, pour constituer un bétail électoral et réaliser le hold up en octobre 2020.
Pour leur défense, le Gouvernement et le parti au pouvoir ont joué deux partitions contradictoires. S’ils ont dénoncé « des propos d’une extrême gravité » qui tendent à « l’instrumentalisation de la haine de l’étranger », ils ont fait, à leur insu(!?), leur mea culpa.
Nul n’a, en effet, oublié le coup d’accélérateur donné par le Gouvernement à la lutte contre l’orpaillage clandestin après le coup de canif de Bédié, surtout qu’un gendarme, dans l’exercice de ses fonctions, a été tué par ces indélicats le 12 octobre 2019.
De nombreux sites ont été démantelés, une multitude d’orpailleurs clandestins ont été arrêtés et traduits devant la justice, des matériels et équipements modernes (pelleteuses, motopompes, etc.) ont été saisis.
Jean-Claude Kouassi, ministre des Mines et de la Géologie, est monté au créneau, le 17 juin, pour annoncer une batterie de mesures dont la reprise de la délivrance des autorisations d’exploitation minière artisanale et semi-industrielle aux orpailleurs et la réactivation des comités techniques locaux (CTL).
Le porte-parole du RHDP, le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani, ne fut pas en reste de cette campagne pour montrer patte blanche. Alors qu’il voulait exonérer le pouvoir de toute velléité de fraudes électorales, il s’est mis, plutôt, à table, le 12 juin: « Nous, au RHDP, on n’a pas peur d’enrôler des étrangers pour constituer notre électorat ».
C’est vrai qu’il est revenu à la charge en attribuant cette déclaration à un malheureux lapsus linguae, mais l’auto-goal apporte du grain à moudre aux adversaires qui accusent, ouvertement, le pouvoir de préparer, grosso modo, des coups tordus pour la prochaine présidentielle afin que « tout soit bouclé, calé et géré ».
F. M. Bally
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