Je vois quelques similitudes entre les retrouvailles du PDCI et du FPI, le 14 septembre 2019, et celles de la parabole de l’enfant prodigue lue le lendemain dans toutes les églises catholiques.
D’abord, l’éloignement. De même que le plus jeune fils était parti loin du père, ainsi le PDCI et le FPI s’étaient-ils éloignés de l’héritage laissé par Houphouët. Cet héritage, qui avait permis au pays de vivre dans une relative paix et de construire, pendant 3 décennies, des routes, écoles et hôpitaux que certains pays africains nous enviaient, c’est le dialogue, la non-violence, l’ambition de doter le pays d’infrastructures de qualité.
Ensuite, la joie. Comme le Père heureux de retrouver son fils qui était perdu, la Côte d’Ivoire se réjouissait, ce 14 septembre 2019, de voir les dirigeants et militants du FPI et du PDCI réunis dans un meeting historique au Palais des sports de Treichville.
Mais une chose gâcha la fête dans la parabole : le refus du fils aîné de partager la joie du Père. Idem à Abidjan, ce 14 septembre, puisque certains partis ont brillé par leur absence au rassemblement de Treichville. N’ont-ils pas été conviés à la fête ? Ne se sentaient-ils pas concernés par ces retrouvailles ? Pourquoi n’ont-ils pas voulu se réjouir avec la mère patrie ? Auraient-ils des griefs contre celle-ci ? Que lui reprochent-ils ? L’on aimerait bien savoir pourquoi Mamadou Koulibaly, Pascal Affi N’Guessan, Henriette Lagou et d’autres ont boycotté la joie de la mère.
Même si le père ne pose aucune condition avant de faire tuer le veau gras, le fils retrouvé ne manque pas de faire deux choses essentielles sans lesquelles un pays court le risque d’aboutir à une réconciliation de façade et non durable : Le regret et l’aveu (“J’ai péché contre toi et contre le ciel”). Au meeting de Treichville, je n’ai pas entendu les partisans de Bédié et de Gbagbo déclarer qu’ils avaient fait du tort à la mère patrie et à ses enfants et qu’ils n’auraient jamais dû poser les actes qu’ils ont posés. Peut-être attendent-ils un autre moment pour confesser et regretter publiquement leurs crimes et manquements. Pour ma part, je voudrais insister sur le point suivant : Une vraie réconciliation exige que ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont blessé, agressé ou abandonné le pays fassent leur mea culpa. Bien sûr que tous n’ont pas fauté pareillement mais qui peut oser dire qu’il n’a rien fait contre le pays ? Certains militants du FPI diront probablement que leur parti n’a fait que défendre un pays qui a été attaqué. C’est vrai mais est-il au-dessus de tout soupçon ? N’a-t-il commis aucune erreur ? Ne peut-on pas lui reprocher des manquements ? Par exemple, a-t-il protégé les Ivoiriens et leurs biens comme il fallait ? Les professeurs qui critiquaient à juste titre leurs conditions de travail et celles des étudiants à l’université de Cocody ont-ils construit une seule bonne université dans la partie sud du pays ? N’est-ce pas leur chef qui est allé contre le vœu de la majorité des Ivoiriens en acceptant la candidature de Dramane Ouattara à l’élection présidentielle ?
S’il est bon de voir réconciliés des frères qui se haïssaient hier, il est encore mieux que tout le monde se réconcilie avec les valeurs qui font la force d’une nation. Il s’agit, entre autres, du travail, du respect de la loi et du bien public, de la discussion pour résoudre les inévitables conflits, de l’amour et de la défense de la patrie, de la répartition équitable de la richesse nationale, du refus de se soumettre à un autre pays.
C’est l’application de ces valeurs qui hissera notre pays au niveau de la Corée du Sud ou de Singapour. Il est scandaleux que nos écoles et hôpitaux soient sinistrés aujourd’hui, que nous ayons laissé les tours du Plateau et les belles infrastructures de Yamoussoukro (rues et grandes écoles) se dégrader rapidement, que ceux qui sont mécontents prennent les armes pour se faire entendre. Une des choses que nous devons reconnaître au premier président, c’est d’avoir fait de la Côte d’Ivoire un pays admiré et respecté. Le PDCI et le FPI, après leurs retrouvailles dont nous nous félicitons, suivront-ils l’exemple d’Houphouët ?
Jean-Claude DJEREKE
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