« Il est un espoir pour toutes les forces de résistances multipolaires »
Philosophe et écrivain russe à la bibliographie profuse, Alexandre Douguine est l’idéologue le plus influent du Kremlin en tant que conseiller du président Poutine. En décembre 2017, déjà il recevait à Moscou le jeune activiste panafricain Kemi Seba. Ce fut le point de départ d’une complicité après cette rencontre qualifiée ‘’d’importante dans le parcours politique du mouvement panafricain’’ par Kemi Seba à l’époque. C’est tout naturellement qu’Alexandre Douguine écrit la préface du livre qui éclaire le combat du jeune leader adulé des masses mais vomi par les tenants des pouvoirs en Afrique francophone. Extrait…
‘’Jusqu’à il y a encore quelques années, l’Afrique était dans l’impasse. Après la première vague de décolonisation des années 1960, les nouveaux régimes africains essayèrent toutes les idéologies politiques de l’ère dite « moderne ». Cette démarche entraîna, dans les pays post-coloniaux, l’émergence de sociétés libérales, nationalistes, communistes ou socialistes.
Malheureusement, la stricte application de ces paradigmes politiques exogènes entraîna dramatiquement les nations africaines dans un inéluctable déclin, chaque idéologie politico-sociale dépendant d’un contexte matriciel précis. En imposant les principes de la modernité occidentale au quotidien des masses, pourtant si éloignées de ces courants épistémologiques, les élites africaines détruisirent et pervertirent les identités profondes des peuples, tout en pensant, paradoxalement, densifier ces dernières. Elles se libérèrent du colonialisme physique, mais pas du colonialisme mental.
D’un point de vue sémantique, ontologique, et spatio-temporel, l’Afrique, de par son aliénation intégrale, constituait, depuis des siècles d’oppression, le monde à part ou les mondes à part, considérant que ce continent est un univers pluriel et polycentrique. Monde à part, notons-le, mais dont les ressources minières servent toujours, malheureusement, de trésorerie au reste des puissances prédatrices. Mais il semble que, ces dernières années, la roue soit progressivement en train de tourner dans le bon sens. La révolution politico-culturelle de la réappropriation de soi semble poindre à l’horizon, en Afrique. Et si le processus apparaît enclenché, c’est qu’il a, entre autres, trouvé moteur en la personne du dénommé Kemi Seba, jeune leader charismatique, atypique, africain, né et ayant grandi en France, avant de retourner vivre en Afrique et de faire de la défense de ce continent la mission de sa vie.
Kemi Seba est un homme de son temps. Parlant le verbe haut, faisant écho aux colères des couches prolétarisées du continent noir et de sa diaspora. Ses discours sont la bande-son de peuples qu’on ne peut plus anesthésier, son endurance est le miroir d’une jeunesse qui s’est tellement fait poignarder qu’elle ne sent plus les coups qu’on tente de lui infliger.
Dans l’espace des anciennes colonies françaises, depuis la mort des Lumumba et Sankara, nous n’avions pas vu, en Afrique, de jeunes Africains suscitant l’enthousiasme des masses et exprimant le désir de souveraineté totale du peuple comme le fait Seba dans le cadre de son combat pour l’autodétermination des populations d’Afrique francophone.
Et s’il parvient à rendre palpable le dasein africain sur la scène politique internationale, c’est qu’au-delà de son don oratoire pour capter l’écoute des foules, ou encore de son intrépidité, il a surtout, intuitivement, saisi les conditions sine qua non du réveil de son peuple.
Le leader panafricaniste a compris que l’étude combinée de l’histoire de sa population, de la géopolitique et de la métaphysique constituait la condition préalable fondamentale pour effectuer une lutte réelle d’indépendance.
Il a réussi, à force de stratégie et de connaissance des rues africaines, à apprivoiser un concept pourtant tracé et conçu par/pour l’Occident, à savoir la société civile. En faisant fusionner la circonférence de celle-ci (composée généralement d’ONG allaitées aux mamelles de l’Europe ou des États-Unis) avec la rue réelle, il a brutalement décloisonné un espace métapolitique qui n’appartenait pas aux peuples enracinés, mais bel et bien aux élites apatrides globalisées.
Il a compris l’état de péremption idéologique des trois théories politiques majeures de l’ère moderne que sont le libéralisme, le communisme et le nationalisme.
Suivant cette logique, il a fini, à force de cheminement intellectuel, par arriver à la Quatrième Théorie Politique, basée sur la quête de la tradition primordiale dans son acception africaine, et la maîtrise des mécanismes conceptuels de la multipolarité politico-civilisationnelle.
L’avenir de l’Afrique, et, plus globalement, des peuples enracinés, se joue là. À nos yeux, et considérant tous ces éléments, en ce début de XXIe siècle, Kemi Seba ne constitue pas seulement une chance pour l’Afrique. Il est un espoir pour toutes les forces de résistances multipolaires.’’
NB : Ce texte est tiré de la préface d’Alexandre Douguine pour le livre « l’Afrique libre ou la mort » de Kemi Seba.
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