(Ecofin Hebdo) – Responsable de l’Afrique francophone pour la firme de conseils Deloitte, Brice Chasles, s’est confié à l’Agence Ecofin sur les dynamiques qui structurent le continent, et les conditions pour y réussir en tant qu’entreprise. Il aborde également l’épineuse question du franc CFA et de son impact sur l’économie des pays qui l’utilisent
Agence Ecofin : On a remarqué ces dernières années, et ceci jusqu’à la crise de 2015, un engouement des investisseurs, des politiques et des médias pour l’Afrique. Est-ce qu’aujourd’hui, quatre ans après cette crise, cet engouement est retombé ?
Brice Chasles : Non. Mon point de vue est que l’engouement est toujours là. Il s’exprime de manière différente. Il y a un momentum qui est intéressant en ce moment en Afrique, avec beaucoup de stabilité économique, des pays qui affichent des croissances fortes, à 6, 7 ou 8% par an. Cette stabilité se manifeste par un intérêt toujours marquant des investisseurs, des acteurs internationaux, de se développer en Afrique. Ils considèrent d’ailleurs l’Afrique comme une zone de croissance, de potentiels et d’opportunités. On constate, ces dernières années, un réel développement des champions et acteurs régionaux et panafricains. C’est quelque chose d’intéressant parce que c’est aussi comme cela que se construit l’avenir de l’Afrique.
AE: Parlant justement des champions africains, on les voit difficilement à la conquête de marchés internationaux. Ont-ils des difficultés particulières à aller hors de leur pré carré continental ?
BC: Je ne pense pas qu’ils aient des difficultés. Mais pour l’instant leur focalisation, c’est surtout d’être présents dans les principaux pays de l’Afrique. Aujourd’hui, l’objectif de ces acteurs-là est de réussir d’abord en Afrique, et dans leur zone géographique ou linguistique. Ainsi, dans la zone francophone, certains commencent à explorer des opportunités sur la partie anglophone. Et on voit aussi des acteurs de la partie anglophone qui viennent s’implanter ou qui regardent des activités de la partie francophone. Je crois que la taille du continent, la taille des pays, le potentiel de croissance qu’il y a aujourd’hui sont considérés par ces acteurs-là comme une priorité.
« Je crois que la taille du continent, la taille des pays, le potentiel de croissance qu’il y a aujourd’hui sont considérés par ces acteurs-là comme une priorité. »
On voit pour l’instant assez peu de groupes qui se développent à l’international. Même si c’est le cas de groupes en Afrique du Sud ou de quelques groupes en Algérie, par exemple, qui sont en train de se déployer hors du continent. Ces champions régionaux, panafricains doivent avant tout réussir là où ils ont des forces, des atouts et une implantation première avant de pouvoir imaginer conquérir le reste de la planète. Moi, j’espère que ça sera le cas. J’espère bien évidemment qu’on verra demain des acteurs africains qui vont devenir des groupes mondiaux.
AE: Vous parliez tout à l’heure de la croissance qui est en train de reprendre sur le continent. Selon vous, quels sont les secteurs d’activité susceptibles de connaître une forte croissance en Afrique francophone sur les 5 ou 10 prochaines années ?
BC: C’est une question à laquelle il est très difficile de répondre. Il est difficile de généraliser sur l’ensemble de ces pays, parce que si on prend l’Afrique francophone, on parle d’une vingtaine de pays. La réalité est que, même s’il y a des particularités régionales, il y a aussi des situations qui sont très différentes d’un pays à l’autre. C’est difficile de répondre d’une manière générale.
Les secteurs sur lesquels on voit beaucoup d’activité, de transformations aujourd’hui sont, entre autres, le secteur financier (banque, compagnies d’assurance) et le secteur de la technologie (télécoms et médias). Le troisième secteur concerné est l’énergie. C’est très variable d’un pays à l’autre. Certains pays ont des développements très marqués par le secteur pétrolier pendant que d’autres sont sur des enjeux d’électricité. C’est le cas par exemple, ici au Bénin, où il y a très clairement beaucoup de projets dans le secteur de l’électricité. Le dernier secteur, qui en soi n’en est pas un, concerne tout ce qui touche au domaine public, tous les services et toutes les initiatives autour des grandes administrations. Donc ce sont typiquement les 4 grands secteurs dans lesquels se concentrent aujourd’hui de nombreux projets de transformation, plusieurs initiatives et beaucoup de croissance.
Après, quand on regarde l’ensemble de ces pays, la réalité du terrain est que l’agriculture reste une industrie très importante pour beaucoup de pays qui ont encore une dimension très rurale. On voit aussi un certain nombre d’initiatives et de projets autour de l’innovation et de l’agriculture. Il s’agit notamment de la manière dont, avec la technologie et l’innovation, on améliore la productivité, on met en place de nouvelles filières et on déploie une économie qui est plus axée sur l’industrie et les services, plutôt que sur l’exploitation de matières premières uniquement.
AE : L’Afrique francophone souffre aujourd’hui de la comparaison avec la zone anglophone qui passe pour être plus dynamique, ou plus business-friendly. Quels sont cependant les atouts de cette partie de l’Afrique que vous connaissez très bien ?
BC: Effectivement, je considère qu’aujourd’hui le niveau de maturité et de développement dans un certain nombre de pays est différent de pays dont on parle beaucoup comme : l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Ghana ou le Kenya, souvent cités. Ces pays ont une certaine maturité, dans plusieurs domaines dans lesquels les pays francophones sont un petit peu en retard. Mais c’est ça aussi qui crée les opportunités. Si aujourd’hui, vous voulez connaître une croissance forte, vous voulez investir dans une région, dans des pays qui ont un potentiel de développement fort, l’Afrique francophone peut être une destination intéressante.
« Si aujourd’hui, vous voulez connaître une croissance forte, vous voulez investir dans une région, dans des pays qui ont un potentiel de développement fort, l’Afrique francophone peut être une destination intéressante. »
Il y a beaucoup de pays, notamment dans la partie subsaharienne francophone, qui ont des taux de bancarisation très faibles. Et donc des secteurs entiers sont en train de se structurer. Ça peut être une destination intéressante pour les entreprises qui veulent prendre des parts de marché et qui veulent contribuer, de par leurs actions et leurs investissements, au développement de ces pays.
AE : Quelles sont les erreurs les plus fréquentes que commettent les entreprises qui viennent s’installer en Afrique?
BC: Effectivement tout le monde ne fait pas tout bien, tout le monde fait des erreurs, c’est évident. Je crois qu’il y a plusieurs sujets qui sont importants. La question du temps, par exemple, est une question essentielle. C’est-à-dire qu’on a souvent, quand on est une entreprise internationale qui vient en Afrique, ses propres processus, son propre calendrier, des objectifs extrêmement précis sur ce qu’on attend en matière de résultats, et de retour sur investissements. Or beaucoup de choses prennent plus de temps en Afrique qu’ailleurs et donc cette notion de temps et sa gestion sont très importantes. Pour réussir, il faut être capable non seulement d’investir, mais de le faire sur le long terme et de manière durable. Ici, c’est le modèle qu’on a choisi, c’est à dire être là pour longtemps, pour les prochaines générations, construire quelque chose. Et ça fait huit à dix ans qu’on le fait et on le fait effectivement dans une logique de long terme. Donc, on sait qu’on a raison sur le long terme, même si l’on peut, à court terme, se tromper parfois et connaître des aléas.
« Or beaucoup de choses prennent plus de temps en Afrique qu’ailleurs et donc cette notion de temps et sa gestion sont très importantes. Pour réussir, il faut être capable non seulement d’investir, mais de le faire sur le long terme et de manière durable. »
Je crois que c’est une région qui est très complexe aussi, il y a énormément de facteurs exogènes : sanitaires, sociaux, démographiques, politiques, climatiques, des sujets liés aux devises, etc. qui peuvent impacter la performance. Même si on est très bon, même si on est accompagné par des personnes qui sont vraiment excellentes, à tout moment il peut y avoir des paramètres qui peuvent avoir un impact négatif sur la performance. Il faut être suffisamment solide et résilient pour gérer ces paramètres-là. Donc il y a une forme d’agilité, il y a une forme de résilience, d’organisation, qu’il faut arriver à bâtir pour pouvoir être capable, quelle que soit la situation du pays, y compris celle de crise, de continuer à opérer et de continuer à être là.
Il faut garder à l’esprit que ce sont des pays qui sont souverains, qui ont leurs règles, qui ont leurs pratiques donc il faut respecter la réglementation, appliquer les process qui sont parfois fastidieux, mais il faut le faire. Je pense que c’est important quand on va dans un pays, de respecter les règles du jeu, de comprendre ces éléments-là et de les intégrer dans la façon d’opérer et de faire du business.
AE : Vous évoquiez tantôt la souveraineté des Etats africains. L’un des débats relevant de cet aspect est la question du franc CFA. Mais au-delà de la question de souveraineté et juste d’un point de vue économique : le franc CFA est-il bon pour le business?
BC: C’est intéressant la question que vous posez parce que finalement peu de gens la posent comme ça. Peu de personnes demandent aux acteurs économiques, quel est leur point de vue sur le franc CFA. Ceux qui sont acteurs économiques dans un pays, qui font du business, acteurs publics ou privés, doivent être écoutés. Leur point de vue est important, mais dans beaucoup de débats on ne leur donne pas assez la parole.
« Les Etats sont souverains pour décider de ce qu’ils ont envie de faire en matière monétaire ».
Mais il faut garder à l’esprit qu’en fait, c’est une question qui, indirectement, est politique. Les choix monétaires, les choix de devises dans une région comme la nôtre, sont du ressort et des prérogatives des Etats et de la puissance politique. Les Etats sont souverains pour décider de ce qu’ils ont envie de faire en matière monétaire. Il se trouve qu’aujourd’hui il y a effectivement le franc CFA qui est la monnaie qui est utilisée ici. Nous, ce qu’on voit c’est qu’on a effectivement des entreprises et des partenaires qui se développent et qui connaissent une forte croissance. Nous voyons aussi des Etats qui affichent une certaine stabilité, une forte croissance.
« Il se trouve qu’aujourd’hui il y a effectivement le franc CFA qui est la monnaie qui est utilisée ici. Nous, ce qu’on voit c’est qu’on a effectivement des entreprises et des partenaires qui se développent et qui connaissent une forte croissance. »
Et on opère aussi dans des pays qui ne sont pas sous franc CFA, en obtenant autant de succès. C’est une question complexe dans le sens où elle nécessiterait d’être traitée par des spécialistes du domaine monétaire. Ce n’est pas du tout ma spécialité donc je ne veux surtout pas essayer d’expliquer des choses qui ne sont pas de mon domaine de compétences mais, quel que soit finalement le choix de la monnaie ou le système monétaire, vous avez des réussites. Il y a des pays qui fonctionnent bien, des entreprises qui se développent et je crois que c’est ça qui est le plus important et qui m’intéresse ; pas la polémique sur le franc CFA.
AE : Depuis quelques années, la tendance pour les pays africains est d’essayer de se développer en attirant les investissements directs étrangers (IDE). Quelles sont les mesures que les gouvernements doivent prendre pour attirer ces IDE ?
BC: C’est une question intéressante parce qu’il n’y a pas une seule mesure en soi qui apporte une réponse suffisante. On a bien évidemment un ensemble de choses qu’il faut faire, presque en même temps, pour que les effets puissent être mesurés durablement. Bien évidemment, il faut des infrastructures de grande qualité, donc beaucoup de projets, c’est le cas au Bénin avec beaucoup de projets qui ont été initiés assez récemment pour améliorer les infrastructures. Il y a aussi les sujets qui portent sur la qualité des institutions, sur la gouvernance, mais également sur la stabilité de l’environnement dans lequel on intervient. Quand vous êtes un investisseur international, vous avez besoin de comprendre quelles sont les règles du jeu. Vous souhaitez vraiment opérer dans un environnement où elles ne sont pas tout le temps en train de changer, où elles sont bien appliquées et où le droit est également bien appliqué. Il y a par exemple, pour beaucoup de pays, la création de tribunaux de commerce. Toutes ces règles, toutes ces mesures vont dans le bon sens pour apporter cette stabilité juridique pour les entreprises. Donc il faut un cadre juridique, réglementaire, fiscal qui soit approprié, incitatif et compétitif.
Quand les entreprises réfléchissent et regardent la carte de l’Afrique en se disant j’ai un projet d’investissement quelque part, elles passent une partie importante de leur temps dans la réflexion et la comparaison entre les différents pays. Elles sont dans une démarche qui consiste à dire : “Entre investir au Bénin, au Togo, au Sénégal, en Côte d’Ivoire, quel est le meilleur endroit par rapport à toute une série de critères ?”
“Entre investir au Bénin, au Togo, au Sénégal, en Côte d’Ivoire, quel est le meilleur endroit par rapport à toute une série de critères ?”
Et donc, quelque part, les choix se font aussi par rapport à la compétitivité d’un pays par rapport à un autre, son emplacement géographique, et, suivant la nature de l’activité, la qualité des infrastructures, la qualité de la logistique, des ports, des connexions aériennes, la solidité du système bancaire, et donc beaucoup de facteurs. C’est donc tous ces facteurs-là qu’il faut arriver à adresser.
Et puis, au-delà de ça, il y a la façon dont les choses se passent sur le plan de la stabilité politique, la croissance de la population, l’émergence d’une classe moyenne qui a un pouvoir d’achat qui permet aux entreprises qui vendent des produits, qui ont des services à proposer d’avoir un marché, une demande suffisante pour connaître une croissance forte. C’est un ensemble d’éléments qu’il faut arriver à réunir et donc beaucoup d’Etats regardent ça, via les classements de type Doing Business. Ils se demandent: “Comment améliorer notre classement par rapport aux autres, quelles sont les mesures concrètes qu’il faut déployer pour y arriver ?” Cela contribue évidemment à aller dans la bonne direction pour atteindre cet objectif.
AE: Pour coller avec l’actualité sur ce sujet, la vague de révision des codes miniers que nous connaissons actuellement contribue-t-elle à rassurer les investisseurs ?
BC: Dans la mesure où la réforme du code minier va dans le sens d’apporter plus de stabilité, plus de visibilité et plus de transparence pour les acteurs de ce secteur. Lorsqu’il s’agit de révision du code qui change les règles du jeu en permanence, on est typiquement dans un cas de figure qui est de nature à décourager les investisseurs. A partir du moment où la décision d’investissement a été prise, on s’inscrit quand même dans un long terme, c’est-à-dire qu’on a des plans d’affaires et des financements sur plusieurs années et donc quelque part on a prévu un certain scénario et si ce scénario ne se réalise pas parce que les conditions changent, si c’est favorable tant mieux. Si c’est défavorable, c’est quelque chose qui ne va pas dans le bon sens, selon moi.
L’autre dimension qui est importante, c’est la capacité du système bancaire à contribuer à financer l’économie, à apporter du financement aux projets. Aujourd’hui, dans un certain nombre de pays on a des sujets qui doivent à mon sens être réglés pour que le système bancaire puisse fonctionner, jouer son rôle de financement de l’économie, des projets d’investissements des start-up, des entreprises. Il faut arriver à créer cette économie de l’industrie et des services dont tous ces pays ont besoin pour se développer, créer des emplois, apporter des solutions concrètes aux jeunes, aux moins jeunes qui ont envie de travailler et ont eux-mêmes des projets, qui ont envie d’accomplir leurs projets de vie, et donc le système bancaire a un rôle très important à jouer.
AE : Si se plaindre du système bancaire en Afrique est une vieille antienne, on remarque que les critiques ont pris de l’ampleur, ces dernières années. Alors, qu’est-ce qui se passe avec les banques africaines?
BC: En fait, ce qui est en train de se passer en Afrique, c’est ce qu’on a connu dans d’autres pays, c’est-à-dire qu’il y a un renforcement des règles prudentielles, une évolution de la réglementation qui conduit à exiger des gestionnaires des banques un capital beaucoup plus important, des règles de provisionnement de prudence qui sont plus restrictives. Force est de constater que dans plusieurs pays, on a un environnement et un système bancaire dans lequel il y a beaucoup d’acteurs (15, 20, 30) pour des économies dont la taille fait que cette situation n’est pas viable à moyen et long terme. Donc quelque part, avoir un nombre plus limité d’acteurs, mais des acteurs plus solides, plus importants, voire des acteurs régionaux et avec une capacité de pouvoir financer l’économie et les projets, c’est quelque chose d’indispensable.
Dans beaucoup de projets dont on entend parler, les plans qui ont été élaborés prennent en compte un financement privé important. Bien évidemment, ça peut être sous forme de capital par des investisseurs de nature privée, mais c’est aussi potentiellement au secteur bancaire local et régional de pouvoir assurer ce type de financement et donc pour ça il faut avoir des acteurs solides. Donc le renforcement des règles prudentielles va dans la bonne direction pour permettre la consolidation du secteur et aboutir à ce type de situation. Il y a, dans un certain nombre de pays ou de secteurs d’activité, un poids trop important des créances douteuses ou des créances qui sont à risque et ça vient pénaliser les bilans des banques et les empêche de pouvoir jouer leur rôle de financement de l’économie. Ces sujets doivent être réglés pour permettre un meilleur financement de l’économie locale.
AE: Mais que dites-vous à ceux qui soulignent que ce renforcement des règles pour l’émergence d’acteurs plus forts risque de pénaliser les populations les plus démunies et celles éloignées des métropoles, alors même que la bancarisation en Afrique est déjà très faible?
BC: C’est un sujet important. Pour moi, la bancarisation et l’accès aux services bancaires font partie des droits fondamentaux des populations, comme l’accès aux soins médicaux, l’accès à la justice ou l’accès à l’eau. Ce sont des éléments indispensables pour un développement réussi. Il faut qu’il y ait des acteurs qui soient capables, dans l’offre bancaire qu’ils proposent, de combler les attentes, à la fois des grandes entreprises et des classes moyennes, sur la gestion de leur placement ou de leur patrimoine. Et puis il faut fournir aux classes les plus populaires, des produits qui sont adaptés, en termes de prix, de dimension technologique, avec les bons outils et en termes de proximité avec les populations. Pour ça, il faut des acteurs bancaires suffisamment importants et suffisamment solides. Et puis, il y a sur ces sujets-là aussi des acteurs de la microfinance qui sont importants pour permettre l’accès aux populations les plus démunies.
AE : L’un des plus grands défis que l’Afrique doit relever est celui de l’emploi. Le continent devra apparemment créer neuf fois plus d’emplois que ceux qu’il crée actuellement pour absorber toute sa main-d’œuvre. Aujourd’hui, l’Afrique doit-elle jouer comme l’Asie la carte de l’industrialisation avec une main-d’œuvre bon marché ou doit-elle se tourner de plus plus en plus vers les nouveaux métiers technologiques ?
BC: Il s’agit d’un enjeu clé puisque la population en Afrique est extrêmement jeune avec un âge médian de 19 ans, sur le continent, contre 46 ans pour l’Europe. Dans les prochaines années, le marché continental de l’emploi verra donc arriver une population très importante. La stabilité sociale d’un pays se mesurera aussi à la capacité qu’il aura à créer des opportunités d’emplois pour les plus jeunes.
La réalité c’est que le potentiel de création d’emploi concerne tous les secteurs d’activité. On peut, par exemple, créer des emplois dans le secteur de l’agriculture en structurant mieux un certain nombre de filières agricoles. Capter beaucoup plus les transformations au sein même des pays, c’est aussi potentiellement créer une activité industrielle génératrice d’emplois. Il y a aussi le domaine des services qui crée beaucoup d’emplois. Ces trois domaines constituent des secteurs où on peut déjà imaginer un potentiel important de création d’emplois.
Il y a ensuite l’économie numérique. Le Bénin, par exemple, a fait un choix très fort dans sa stratégie de mettre l’accent sur cette vision d’un pays, acteur important dans le domaine du savoir, de la connaissance de la technologie et du numérique, dans la région ouest-africaine.
Et la réussite, bien évidemment, n’est donc pas de se focaliser uniquement sur un seul secteur d’activité. C’est plutôt d’être capable de construire quelque chose qui, dans l’ensemble des secteurs de l’économie, permet de créer des emplois et surtout des emplois durables.
« Dans tous les choix qui sont faits sur les zones d’activité prioritaires, sur des nouvelles filières qu’on veut créer, sur des projets dans le digital, il faut à chaque fois imaginer comment l’ensemble de l’écosystème, y compris la formation professionnelle, l’éducation, va être structuré. »
Derrière tout ça, il y a des questions de compétence, de formation. Créer de nouvelles filières industrielles sans avoir les compétences est assez problématique. Dans tous les choix qui sont faits sur les zones d’activité prioritaires, sur des nouvelles filières qu’on veut créer, sur des projets dans le digital, il faut à chaque fois imaginer comment l’ensemble de l’écosystème, y compris la formation professionnelle, l’éducation, va être structuré. Cela permet de trouver sur place les profils ou, pour ceux qui n’ont pas les compétences aujourd’hui, d’acquérir ces compétences et de pouvoir prendre des emplois.
Propos recueillis par Aaron Akinocho
Commentaires Facebook