« Une femme sur deux se dépigmente la peau »
Plus de la moitié des femmes vivant à Abidjan, la capitale économique de la Côte d’Ivoire, utilisent des produits de dépigmentation, malgré une interdiction décrétée par le gouvernement ivoirien, a déploré un spécialiste ivoirien de renom.
« En Côte d’Ivoire, 53% des femmes à Abidjan, âgées de 15 à 45 ans, sans distinction de catégorie socioprofessionnelle », utilisent des produits éclaircissant pour obtenir une « peau claire », a affirmé le Pr Joseph Elidjé Ecra, du service de dermatologie d’un Centre hospitalier universitaire (CHU) abidjanais.
Ces chiffres ont été produits sur la base des consultations médicales et des visites « de plus de 10.000 femmes dans les centres spécialisés, ces deux dernières années », précise le spécialiste.
Le Pr Ecra, dermatologue et infectiologue, qui s’exprimait mardi lors d’une cérémonie célébrant le dixième anniversaire du « Journal de l’économie », un hebdomadaire ivoirien, a pointé le « poids économique des industries cosmétiques » dans le pays.
Le spécialiste a également accusé « des pharmaciens devenus commerçants de ces produits » et dénoncé « la complicité des médecins » qui prescrivent ces produits illicites.
Le gouvernement ivoirien a interdit en 2015 l’utilisation des produits cosmétiques décapants, qui permettent de « dépigmenter la peau des femmes et mettent en péril leur santé ».
Les crèmes et autres lotions dites de dépigmentation, qui comportent notamment du mercure et ses dérivés, des corticoïdes, de la vitamine A et de l’hydroquinone au-delà du seuil de 2%, sont prohibées par décret.
« Le décret a été pris sans programme d’application », a souligné le Pr Ecra, rappelant que les produits éclaircissants peuvent également entraîner « des maladies internes, dont l’hypertension et le diabète ».
La dépigmentation de la peau rencontre depuis des années du succès auprès des jeunes Africaines, notamment des Ivoiriennes. Mais aucune étude ne permet de savoir quelle part de la population féminine y a recours.
Selon le Pr Ecra, « un quart à deux tiers des femmes en Afrique de l’Ouest sont victimes » de cette pratique appelée couramment » tchatcho ».
AFP
La dépigmentation ou le «Tchatcho », critère incontestable de beauté chez de nombreuses jeunes filles et femmes
Avoir absolument un teint clair. Telle est aujourd’hui, la principale préoccupation de nombreuses jeunes filles et femmes. Pour celles-là, le teint clair est inéluctablement le seul critère de beauté. Lorsque la gent masculine s’en mêle, l’on se perd en conjectures. Aussi, serions-nous tentés de nous demander si la peau blanche est synonyme de beauté au détriment de la peau noire ? La quête de la peau claire ne revêt-elle pas des dangers auxquels s’exposent ces personnes en mal de leur pigment noir ? Autant d’interrogations que nous essayerons d’élucider à travers notre enquête.
De la notion de dépigmentation
La dépigmentation est l’éclaircissement de la peau, soit la perte du pigment naturel Elle peut être causée par un certain nombre de conditions locales et systématiques. Elle est partielle lorsqu’il s’agit d’une blessure à la peau.
Par contre, elle devient complète, le plus souvent, chez des personnes nées avec le vitiligo, une affection de la peau produisant des zones différentes de coloration avec ses tâches blanches irrégulières.
La dépigmentation devient temporaire lorsqu’elle est causée par le pityriasis versicolore, source d’une autre infection cutanée qui laisse apparaître des plaques squameuses décolorées sur la poitrine et sur le dos.
Cependant, la dépigmentation est permanente dans le cas de l’albinisme. Seulement, pour le compte de notre enquête, nous nous sommes penchés principalement sur le volet de dépigmentation portant plusieurs noms.
A savoir la dépigmentation artificielle, volontaire ou cosmétique. Son usage avec des produits ou substances contenant des actifs dépigmentant, en vue de devenir clair est l’effet souhaité par ceux qui s’y adonnent car, selon eux, la beauté est synonyme de peau claire. Un phénomène qui touche malheureusement tous les continents.
En Europe par exemple, beaucoup de personnes veulent être blondes. Ici, en Afrique, la tendance est plutôt à l’éclaircissement de la peau. La peau noire, péjorativement «noiro» a son caractère dégradant, tandis que «la blanche » avec sa peau claire saute à l’œil et a une appellation plus valorisante.
Situé à Adjamé Nangui Abroguoua, le magasin de cosmétiques de dame Bintou est bondé de monde. De nombreuses femmes et jeunes filles bataillent pour s’offrir des produits de beauté. Mais pas n’importe lesquels.
Les produits de beauté éclaircissants sont en fait les plus prisés dans cet espace. Toute une variété de cosmétiques composés de tubes, pommades, gels corporels, de gommage de corps …et de savons de toilette.
L’origine des produits éclaircissants
photo-depigmentationLe marché ivoirien est envahi par divers produits éclaircissants. Notamment des cosmétiques « made in » Côte d’Ivoire et ceux provenant des pays de la sous-région.
Réputée pour la qualité de ses produits, Bintou s’enorgueillit de ce que ses crèmes et autres lotions proviennent, pour la plupart, des pays de la sous-région. « J’effectue tous mes achats au Ghana, à Lomé, à Dubaï, au Nigéria et dans des pays de l’extérieur où résident certains membres de ma famille », nous confie-t-elle.
Entre autres produits éclaircissants, nous pouvons citer pèle- mêle : les gel de corps dont Body white, Topicream, 7 jours, Caroskin, Citroderm, Belpo, Clair Liss, Clarea , Peau claire…Et les savons Mekkako, Jaribu, Toujours jeune. Tous des produits importés.
Cependant, des produits de cette gamme sont fabriqués sur place. C’est notamment le cas de Mme K. Evelyne qui s’est spécialisée en la matière. Elle a fait de la fabrication locale des produits éclaircissants, son métier. Son domicile s’est transformé, pour la cause, en une véritable fabrique de produits de tous genres.
« Je confectionne moi-même les produits éclaircissants à mon domicile. Tous les produits qui rentrent en ligne de compte de la confection de ces produits sont disponibles dans la plupart des grands marchés du District d’Abidjan », nous confie-t-elle.
« Mes produits ne coûtent rien à côté des énormes services qu’ils rendent aux utilisatrices. Les prix varient (Ndlr : De 5 à 15 000 FCFA), selon le résultat recherché par les clientes. Il existe, en effet, trois types de produits. Notamment le teint noir, le teint bronzé et le teint clair ». Ses produits, à l’en croire, révèlent la beauté de la femme.
De l’avis d’un expert
Du point de vue biochimique et pharmaceutique, le Docteur Y.P, Pharmacien de profession est formel et le fait savoir à travers son intervention ci-dessous :
« Nous pouvons citer l’hydroquinone – Les corticoïdes – Les acides de fruits – Des dérivés du mercure-De l’eau de javel- le glutathion, nouveauté actuelle!
L’hydroquinone, appelée également benzène-1,4-diol est un composé organique aromatique apparenté au phénol. Agent réducteur, ce dérivé de glucide freine également la synthèse de la mélanine par inhibition de la formation de l’enzyme tyrosinase.
L’hydroquinone dégrade les melanosomes, mélanine sous forme de petits grains dans les mélanocytes ou cellules sécrétant la mélanine. Utilisée en médecine humaine en application sur la peau pour en réduire la charge pigmentaire brune.
Dangereuse pour les écosystèmes et notamment pour les eaux car peu biodégradable et en partie toxique. Depuis 2001, l’hydroquinone fait l’objet d’interdictions en Europe dans les produits cosmétiques en raison de son potentiel cancérigène.
Les corticoïdes, dermato corticoïdes ou corticostéroïdes sont des hormones stéroïdiennes naturelles sécrétées chez les êtres humains par le cortex de la glande surrénale. En général, il s’agit des glucocorticoïdes, naturels ou de synthèse, qui sont en fait de puissants anti-inflammatoires, immunosuppressifs et antiallergiques.
Les corticoïdes, utilisés contre les réactions inflammatoires provoquent la dépigmentation, comme effet secondaire, en diminuant le nombre de mélanocytes fonctionnels. Réduisant ainsi leurs effets dans la pigmentation de la peau.
Les acides de fruits AHA, Alpha-hydroxyacides, acides faibles alimentaires sont des molécules aux effets multiples tels que l’acide ascorbique ou vitamine C, le carotène, etc. L’action chimique de ces acides, plus ou moins corrosifs, a pour but de faire d’une peau endommagée, une peau neuve en procédant à l’élimination de peaux mortes en surface.
Les molécules contenues dans ces produits cosmétiques interrompent l’oxydation de la chaîne qui mène de la tyrosinase (enzyme permettant la formation de la mélanine), à la mélanine.
Les dérivés du mercure :Le mercure est un métal lourd largement répandu dans le monde et dont l’impact sur la santé humaine est préoccupant. L’inhalation aiguë de vapeurs de mercure métallique ou inorganique est à l’origine d’atteintes pulmonaires.
De graves intoxications alimentaires peuvent entrainer des épidémies d’encéphalopathies dans la population et des atteintes du développement chez l’enfant exposé.
L’eau de javel, solution liquide oxydante fréquemment utilisée comme désinfectant et comme décolorant.Le javel intervient dans la dépigmentation du fait que le chlorure mercurique entre en compétition avec le cuivre et inhibe l’activité de la tyrosinase qui est une enzyme permettant la formation de la mélanine, pigment de la peau.
Le glutathion, est un tripeptide formé par la concentration d’acide glutamique, de cystéine et de glycine. Un puissant antioxydant de l’organisme qui, à faible dose, protège les cellules de plusieurs polluants, incluant certains issus de la combustion de carburants de la fumée de cigarette.
Il retarde également les dommages dus aux radiations tels que ceux rencontrés suite à la diminution de la couche d’ozone. Mais à fort dosage, il empêche l’oxydation qui conduit à la formation de la mélanine ».
Les raisons de l’utilisation des produits éclaircissants
Plusieurs raisons expliquent l’utilisation des produits éclaircissants. La première est liée au fait que la peau claire attire. Pour ce faire, l’usage de ces produits permet de faire ressortir et de cirer le teint, en vue de l’uniformiser.
Secundo, parce que la peau claire est source de bonheur, parce que les hommes aiment les femmes claires, parce qu’avec la peau claire n’importe quelle couleur et vêtement sied à merveille, parce qu’identité culturelle, parce que la peau claire servirait à des rituels de sacrifices.
L’utilisation des produits éclaircissants est également l’apanage de la gent masculine. Mannequin de profession, Damien avait la peau noire à la naissance. Mais, influencé par un groupe d’amis, il a fini par utiliser des produits éclaircissants pour se débarrasser de son pigment noir, afin d’avoir du répondant.
Mlle Gueu Florentine, gérante de maquis, abonde dans le même sens pour dire : « j’utilise les produits éclaircissants pour avoir une peau claire. Avec une telle peau, toutes mes tenues me vont très bien. En plus, je ne passe pas inaperçue. C’est vrai que nous sommes objets de critiques des hommes mais n’empêche qu’ils adorent les femmes claires. »
La peau claire, une identité culturelle
La peau claire est l’identité culturelle des peuples sénégalais, maliens, Ibo et guinéens. En effet, pour ceux-ci, le critère de beauté féminine, voire masculine est nécessairement lié au blanchissement de la peau. Dans des pays tels le Sénégal, le Nigéria et le Mali, l’utilisation des produits éclaircissants fait partie du quotidien. Et cela, ils ne s’en cachent pas.
La peau claire, source de richesse et de bonheur
Le critère de beauté pour le Ibo, est la peau blanche. Ce qu’explique Imeka, commerçant d’appareils électroménagers : « Chez moi au Nigéria femmes et hommes Ibo doivent avoir la peau claire. C’est la condition pour celui qui aspire au mariage. La peau claire est source de richesses et de bénédictions. Elle apporte bonheur et abondance dans tout ménage. Contrairement à la peau noire qui elle, est plutôt synonyme de ténèbres », souligne-t-il avec insistance.
L’importance de la peau claire est une réalité. Ainsi, dans certaines contrées, les personnes claires sont sacrifiées sur l’autel des ambitions de des hommes en manque de pouvoir.
Les répercussions économiques
Selon le professeur Kaloga Mamadou, le coût de la dépigmentation se chiffre à 19% des revenus ménagers. Un pourcentage qui avoisinerait les millions de dollars chaque année en Afrique occidentale.
Ce montant, selon lui, se subdivise en coût direct lié à l’achat de ces produits éclaircissants et en coût indirect en rapport avec les frais de transport, tickets modérateurs encore appelés tickets de consultation.
Car, comme nous le verrons plus bas, la dépigmentation est un fléau aux graves conséquences, d’où le coût de traitement des complications corollaires.
Malgré les chiffres élevés de la dépigmentation, malgré ses conséquences du point de vue médical, enfants, hommes et femmes s’y adonnent pour les raisons citées plus haut.
Les complications infectieuses et non infectieuses liées à l’utilisation des produits éclaircissants
DepigmetationRencontré au Centre hospitalier universitaire de Treichville, Pr Kaloga, par ailleurs, Maître de Conférence Agrégé, Dermatologue, Vénéréologue dans cet hôpital public, a fait une large communication sur les complications infectieuses et non infectieuses dues à l’utilisation de ces produits.
Selon lui, s’agissant des infections bactériennes, virales, mycosiques, parasitaires due à une baisse de l’immunité au niveau de la peau du fait des produits appliqués. Au chapitre des complications non infectieuses, il a fait mention de l’ochronose, encore appelées taches de mani (grosses taches noires au dos et au visage).
Entre autres conséquences, il a également mis l’accent sur l’apparition de phares et de vergetures. « Larges comme des autoroutes », dira-t-il. Des varices dues à une diminution de l’épaisseur de la peau. Ainsi que la mauvaise cicatrisation due à une modification des éléments constituant la peau.
Pour lui, l’utilisation de ces produits provoque une hypertrichose (Poils poussant nombreux sur le corps). « Il peut aussi s’agir de diabète, d’hypertension artérielle, d’insuffisance rénale, surtout avec les dérivés du mercure, les mauvaises odeurs, le vieillissement cutané, les cancers de la peau, les acnés ; c’est-à-dire les boutons qui poussent sur le visage, la poitrine et le dos », a-t-il expliqué.
Conseils pratiques et l’ironie des leçons tirées
Pr Kaloga sans détours : « Pour ces personnes qui n’ont pas encore débuté cette pratique, fort de tout ce qui ce qui a été mentionné plus haut, nous les encourageons à ne pas le faire. Les aspects négatifs pèsent plus que cette quête de beauté éphémère.
La beauté réside dans la simplicité des choses. La population qui consulte le plus pour des questions relatives à la dépigmentation est essentiellement composée de femmes. Trois des cinq femmes qui arrivent en consultation de dermatologie viennent, parce qu’elles veulent s’y mettre ou parce qu’elles souhaitent y remédier.
Pour ceux submergés dans ce cycle vicieux, ou qui le seront bientôt, le bon sens leur conseille d’arrêter aussi banalement que cela pourrait être lu. La dépigmentation est dangereuse vu toutes les complications sus citées. La couleur de la peau n’a rien à voir avec le bonheur sinon il n’y aurait pas d’hommes pauvres en occident.
Nous comprenons bien leur angoisse, cette peau qui redevient plus noire une fois la pratique sursoit. Mais un choix s’impose entre accepter son teint noir et les complications que peut engendrer la dépigmentation artificielle. Les personnes qui s’adonnent à cette pratique regrettent le plus souvent, quand les conséquences surgissent. Malheureusement, il est difficile de les traiter, dans la plupart du temps.»
La beauté au naturel
Docteur Aka Félix (Naturothérapeute, hygiéniste) : « La peau est belle non pas, par sa teneur en mélanine mais…. »
Réputé pour ses nombreuses connaissances des vertus des plantes, Dr Aka Félix les utilise pour soigner ses patients.
cadre de notre enquête sur la dépigmentation, nous avons rencontré celui pour qui, la nature n’a plus de secret.
Situé dans la commune de Cocody, à quelques encablures du Lycée Technique d’Abidjan, le cabinet du naturothérapeute ne désemplit pas. Sur des étals, sont exposés des produits à bases de plantes. La forte odeur qui nous ’’accueille’’ depuis les marches, nous procure une sensation de bien-être.
Bien que fort occupé, notre interlocuteur nous accueille avec un large sourire. Son avis sur la dépigmentation a été plausible. En effet, pour Dr Aka Félix « la dépigmentation est un non lieu. »
Il est même allé plus loin pour dire que ses patients, encore moins lui, ne se reconnaissent pas dans ce terme. Depuis près de 34 ans, il ne cesse donc pas de prôner un corps sain, à travers les vertus des plantes. Notamment les fruits et les légumes.
« Il n’existe pas de méthode naturelle pour éclaircir rapidement la peau. L’on parlera plutôt de vie, de santé pour notre corps donc de notre peau. Elle est entretenue de l’intérieur par un bon programme alimentaire et de l’extérieur par exemple, par des huiles naturelles et essentielles de citron, de géranium, de sassafras, d’olive, d’argan ou de romarin qui concourent à la flexibilité, à l’élasticité de la peau ; les oligoéléments à savoir le zinc, le cuivre, manganèse etc. sont également déterminants pour la santé de la peau. Elle est belle, non pas, par sa teneur en mélanine, mais par sa flexibilité, son élasticité, sa fermeté et son éclat », a-t-il indiqué.
Continuant, il a exhorté la gent féminine en quête d’une belle peau, à s’approprier ses conseils. Car, soutiendra-t-il, « manger, influence notre corps. Il faut donc bien se nourrir, avoir un programme alimentaire riche et varié. L’usage d’huile à l’extérieur de la peau n’est qu’un apport complémentaire. »
Ainsi, selon Dr Aka, il est inopportun d’utiliser des produits chimiques pour se dépigmenter. Mais plutôt avoir une alimentation normale et hygiénique afin de l’embellir. Le chou, le concombre, la carotte, la papaye, la banane, l’orange, le pamplemousse, le raisin, la mangue… sont, selon le docteur, des produits alimentaires recommandés pour l’embellissement de la peau. Parce que, selon ses explications, les légumes et les fruits la nettoient et lui font du bien.
« Nous ne faisons pas de dépigmentation. Les produits cités plus haut, en plus de l’argile verte, blanche ou rose, conseillée, avec du jus de citron et de carotte dans de l’eau tiède, rendraient la peau éclatante. La vie est dans l’aliment cru », a-t-il conclu.
Réalisée par Opportune Bath et Kakou N’da
Un goût prononcé pour le faux
La dépigmentation ! En matière de goût et de couleur, il n’y a pas d’unanimité, ça ne se discute pas. Est-ce la force de cet alibi qui nous conforte dans l’entretien de ce qui semble être un fléau social? Nous, spectateurs passifs donc impuissants ou complices actifs (ces hommes qui aiment les femmes claires, vendeurs et autres), parce qu’en amont et en aval d’un comportement qui s’apparente plus à un complexe et manque d’assurance que tout…
Entre temps, la mélanine se perd sous nos tropiques parce que Dieu a jugé faux de nous la peindre sous la peau pour espérer nous protéger d’un soleil de plus en plus criard.
Radieuse, la peau ne l’est plus. Tout droit vers la catastrophe, les mixtures continuent de s’inventer ou s’améliorer pour être encore plus clair. Comment le citoyen lambda a-t-il découvert les « vertus » quand bien même introvertis, détournés de leur but premier de molécules tels les corticoïdes, l’hydroquinone-8 (la une du moment !), le glutathion, etc. ? Accuserais-je le corps médical ? Ces médecins qui, par contre nous parlent de cancer de peau, de risque d’insuffisance rénale, de diabète, etc. Mais dites-moi que tout ceci n’est que loin. L’important c’est le résultat ponctuel, là, sous nos yeux, aussi éphémère que chimérique, cette prétendue beauté du paraître, à fleur de peau.
En avançant ce qui suit : « Nous avons un goût naturel pour le faux, mais nous avons naturellement besoin de croire que le faux est le vrai », Alexandre Vinet ne nous pousse-t-il pas plutôt à considérer l’aspect psychologique de ce problème au dessus de tout ? Malgré les chiffres élevés de la dépigmentation, malgré ses conséquences du point de vue médical, enfants, hommes et femmes s’y adonnent… En dépit du mal qu’elle procure, la dépigmentation a fait et continue de faire tant d’adeptes… à croire que se dépigmenter la peau rimerait à se dépigmenter la matière grise. Ne serait-il pas sensé que cette liberté s’arrête là où sa santé court des risques ? Sûrement pas pour un esprit obnubilé dans le faux.
Complexe ? Que devrons-nous donc conclure des dires du Professeur Kaloga : « La couleur de la peau n’a rien à voir avec le bonheur, sinon il n’y aurait pas d’hommes pauvres en Occident. »
Kakou N’da
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