(Agence Ecofin) – Des signes annonciateurs de temps difficiles s’accumulent dans le secteur bancaire de l’UEMOA. Une première illustration de cette situation est perceptible dans le nombre croissant de banques ayant reçu de injonctions.
En 2017, la commission bancaire de l’UEMOA a transmis des injonctions à 31 banques et établissements de microfinance opérant dans ses pays membres, contre 8 en 2016. Dans le cadre de ces injonctions, il était question pour lesdites entités, de mener un certains nombres d’actions avant la fin juin 2018.
Une hausse des sanctions dans le secteur, signe de difficultés
Ainsi, les sociétés financières épinglées ont reçu obligation sur la période qui leur a été donnée, de renforcer leurs capitaux sociaux et de réajuster leurs fonds propres aux niveaux adéquats. Il leur a aussi été interdit de distribuer les dividendes et demandé de rendre compte mensuellement de leurs activités.
Il est difficile d’en savoir plus sur les évolutions qui ont été faites à cette date butoir, car les nouvelles données à ce propos n’ont pas encore été publiées par la banque centrale.
A côté de ces injonctions, 11 dirigeants de banques, dont trois en Côte d’Ivoire ont été blâmés par la commission bancaire de l’UEMOA.
L’entrée en vigueur dès janvier 2018 de la règlementation dite de Bâle III, qui renforce progressivement les contraintes des banques, ne semble pas avoir facilité les choses et on devrait assister à plus d’interventions de la part du régulateur. En effet, dans le cadre de cette nouvelle régulation, les banques même celles qui sont bien capitalisées, doivent se remettre au travail pour être à jour sur au moins 14 points.
Parmi les plus importants, il y a la solvabilité qui ne fera plus l’objet d’un seul ratio, mais de plusieurs niveaux de ratios en fonction de la nature des fonds propres concernés. Même si des dispositions sont prises pour une mise en œuvre progressive, la nouvelle règlementation aura eu pour effet de pousser à une augmentation des fonds propres des banques.
Un autre point tout aussi important, est celui de la pondération des risques. Désormais, elle part de 20% pour les administrations autres que l’administration centrale (0%) à près de 150% pour des prêts jugés vraiment à risque.
Une rentabilité ressentie à la baisse
Pour l’exercice 2017 les banques de l’UEMOA en étaient arrivées à un coefficient global de rentabilité (bénéfice net/fonds propres) de 14,5%. Il semble peu probable qu’un tel résultat puisse se répéter, tout au moins dans les premières années de l’entrée en vigueur de Bâle III.
Plusieurs raisons à cela. Afin de s’adapter à la nouvelle législation, les experts s’attendent à ce que les banques de cette sous-région continuent à renforcer leurs ressources humaines, ce qui risque d’augmenter les coûts exploitation. Aussi, on a noté comme une faible augmentation des crédits à l’économie à la fin septembre 2018 (+8%), pour une économie dont la croissance du produit intérieur brut est attendue à 4%.
En plus du fait que les crédits à l’économie affichent une hausse modeste, le taux d’intérêt moyen facturé aux clients de la banque à la fin du troisième trimestre de 2018 était en baisse à 6,83%, contre un coût moyen des ressources (dépôts de la clientèle) de 5,51%, soit un taux moyen de marge brute de seulement 1,32%.
Ce scénario se rapproche d’une des hypothèses avancées par Finactu, une firme spécialisé dans le conseil stratégique dans le secteur financier en Afrique.
Lire à ce propos notre analyse dans Ecofin Hebdo : 11/01/2019 – Régulation bancaire dans l’UEMOA : décryptage d’un clash entre experts de la BCEAO et de Finactu
Dans une récente étude sur l’impact de Bâle III dans la sous-région, ses experts ont essayé de démontrer, qu’un environnement bancaire trop dense et une rentabilité plus faible, rendrait difficile la mise en œuvre d’une législation plus exigeante en ressources d’exploitation et en fonds propres.
Idriss Linge
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