Côte-d’Ivoire : Séry Bailly, tout sur un éminent intellectuel arraché au FPI

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Par César ETOU

Séry Bailly est décédé le 2 décembre 2018.

Il a été interné pendant plus d’une semaine à la Polyclinique internationale Sainte Anne-Marie (PISAM) d’Abidjan.

Les informations le disaient même «opéré avec succès». Malheureusement, le professeur Séry Bailly Zacharie est décédé le dimanche 2 décembre 2018, au lendemain de l’inhumation de celui qu’il a qualifié de «frère, ami et compagnon de lutte», Abou Drahamane Sangaré, inhumé le samedi 1er décembre 2018. Séry Bailly serait décédé des suites d’un accident vasculaire cerebral (AVC) qui l’avait frappé et pour lequel il avait été hospitalisé d’urgence.

A la première étape de la cérémonie de présentation des condoléances où il s’était présenté, Séry Bailly avait pris les contacts du DP de la Voie Originale et lui avait demandé de publier un poème en hommage au président par intérim du FPI décédé le 3 novembre 2018 (voir notre encadré).

L’ancien ministre du président Laurent Gbagbo devait même prononcer l’oraison funèbre à la levée de corps du président Abou Drahamane Sangaré, le samedi 1er décembre 2018, à IVOSEP. Informé de l’appel à témoignages lancé, le 10 novembre 2018 par voie de presse, par le Comité d’organisation des obsèques, Séry Bailly avait fait parvenir son texte prestement écrit au Comité scientifique. La maladie l’a ensuite conduit en clinique et c’est le Pr. Hilaire Bohui qui a lu l’oraison à sa place, à IVOSEP.

Cet autre décès inattendu replonge le FPI dans la cruauté du deuil. Car, le Pr. Séry Bailly a adhéré au parti du président Laurent Gbagbo en 1993.

Nommé ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (octobre 2000), il a été élu député de la circonscription de Daloa (le 10 décembre 2001) sous la bannière du FPI avant d’être nommé, le 5 août 2002, ministre de la Communication. Séry Bailly Zacharie quitte le gouvernement le 13 mars 2003 en cédant le fauteuil du ministère de la Communication à un certain… Guillaume Soro. Les rebelles venaient d’entrer au gouvernement sous le régime attaqué du président Gbagbo.

A 70 ans et élevé au rang d’«Immortel », l’illustre défunt était vice-président de l’Académie des Sciences, des Arts et des Cultures d’Afrique et de la Diaspora (ASCAD). Auteur de nombreuses publications scientifiques et littéraires et de deux essais dont «Deux guerres de transition: guerres américaine et guerre ivoirienne», il était le président de la Fondation Harris Memel-Fotê/Jean Jaurès.

Séry Bailly Zacharie est né le 13 mars 1948 à Abidjan. Originaire de Daloa (Centreouest du pays), il entre à l’Université d’Abidjan-Cocody où il enseigne l’Anglais. En 1971, l’étudiant Séry Bailly est arrêté à la suite de contestations syndicales sur le campus universitaire de Cocody et enrôlé de force pour le service militaire, de mars 1971 à janvier 1973 à Séguéla, à plus de 500 kilomètres d’Abidjan, au Nord-ouest du pays. Il aura pour «compagnons de service militaire forcé» Laurent Gbagbo, Abou Drahamane Sangaré, Gnaoulé Oupoh, Jeannette Koudou, Albert Hoba et bien d’autres.

Libéré, il reprend les études qu’il achève par une thèse de doctorat au Département d’Anglais. Il intègre alors l’Université nationale de Côte d’Ivoire comme assistant, gravit tous les échelons et est nommé Doyen de l’Unité de Formation et de Recherche des Langues et Civilisations de l’Université de Cocody jusqu’en 2001.

Membre influent du SYNARES, principal syndicat des enseignants du Supérieur, le Pr. Séry Bailly bien que de nature discrète, a défendu farouchement les intérêts de sa corporation. C’est au début des années 1990 qu’il a été révélé au grand public en Côte d’Ivoire par ses écrits dans les journaux. Ses «Chroniques de notre temps», publiées chaque mercredi, à la dernière page de l’hebdomadaire ivoirien Notre temps (1991-1994) de feu le célèbre journaliste Jérôme Diégou Bailly, ont donné de lui l’image d’un intellectuel à la réflexion profonde et sarcastique. Mais au plan politique, Séry Bailly a laissé plutôt une reputation d’homme aux vues un peu trop modérées et peu engagées, de l’avis des purists de la Gauche ivoirienne. Au déclenchement de la rebellion du 19 septembre 2002, ses actions au ministère de la Communication ont laisse d’ailleurs beaucoup de ses partisans sur leur faim.

Au plan artistique, Séry Bailly Zacharie a été très critique envers le Zouglou, cette identité musicale ivoirienne qui a conquis aujourd’hui le monde entier. A la naissance du Zouglou en 1990, Séry Bailly Zacharie a qualifié ses sonorités chères à Bilé Didier et au groupe Magic système d’A’Salfo de «musique de la faible estime de soi».

Source: la Voie orginale / N°375 du lundi 10 décembre 2018

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