L’appel à la tolérance d’Affi N’guessan
La salle Houphouët-Boigny d’Ivosep Treichville a abrité mardi la cérémonie d’hommage du Fpi à l’ancien Directeur général du port d’Abidjan, Marcel Gossio, décédé le 21 novembre 2018 dans des circonstances non encore élucidées.
La famille biologique, la veuve Hortense, les enfants, des amis, des parents et proches du grand Ouest mais également les militants et cadres Fpi avec à leur tête le président Pascal Affi N’guessan dans des uniformes à l’effigie de l’illustre disparu, étaient là. Les chants de la chorale ‘’Petit cœur du rocher’’ s’élevaient par moments pour mettre du baume à tous ces cœurs étreints par la douleur. Dans cette ambiance morose, les témoignages des camarades venaient en rajouter au regret et à la douleur tant sont vantés les mérites, la générosité, la courtoisie, l’esprit de camaraderie, bref les qualités de l’homme politique Gossio.
Des secrets sont dévoilés. Du temps de l’opposition au temps de l’exil en passant par les années de pouvoir Gbagbo. Tour à tour, Dr Guy Tiéhi, ami de longue date, la vice-présidente Christine Konan, Konaté Navigué au nom des jeunes et Augustin Comoé qui fut son compagnon de l’exil marocain ont livré un pan de la vie politique et professionnelle de Marcel Gossio.
On apprendra ainsi que, nommé sous la transition militaire Dg du Crou-A, Marcel Gossio avait demandé à partir du milieu étudiant sous Laurent Gbagbo parce qu’il était mal à l’aise à l’idée de ne pouvoir donner une chambre de cité à tous ces étudiants dont les parents venaient par moments le solliciter directement. Cette nomination attendue arriva lors d’un conseil des ministres et grande fut alors sa joie ce jour-là, rapporte Navigué. Mais ‘’le Vieux père’’ comme l’appelait affectueusement les jeunes n’a pas que connu des heures de gloire sur terre. A la tête du Port autonome d’Abidjan, quelle ne fut sa peine devant le scandale du Probo Koala, un navire qui avait déversé des tonnes de déchets toxiques à Abidjan. Gossio, aux dires de Konaté Navigué en a été terriblement marqué et jurait souvent de laver son honneur et sa réputation ternis par cette affaire. Pendant trois mois, il eut des nuits blanches dans la solitude. Ses visiteurs habituels ayant cessé de défiler, certains de ses camarades du parti allant voir Gbagbo nuitamment pour prendre sa place, des employés du port jubilant et riant des déboires du patron. Tout cela, Gossio l’a vécu avec tristesse et réalisa ainsi jusqu’où pouvait aller la méchanceté de l’homme. Il a fait sa traversé de désert jusqu’à cette réhabilitation par un décret de Gbagbo, le plus grand jour de sa vie. Altruiste il ne mit pas à exécution sa vengeance contre ceux qui l’avaient très tôt enterré dans cette mauvaise passe, toujours selon le récit de Konaté Navigué.
On apprendra aussi que Gossio a été pourvoyeur de vivres à la résidence présidentielle durant la période de réclusion sous les bombardements français. Ce, jusqu’à son exil par pirogue sur la mer pour atteindre d’abord les côtes ghanéennes puis le Maroc par la suite. Ici, il avait réorganisé sa vie et servait de soutien à tous ceux de ses camarades et jeunes pro-Gbagbo qui passaient par le Maroc. Il avait régulièrement envoyé du soutien financier à Gado Marguerite, la mère de Laurent Gbagbo alors en exil au Ghana. Mais que ne fut sa déception quand il fut refoulé à ses funérailles, en compagnie d’Affi N’guessan, indésirable à Blouzon ce jour-là.
Gossio, c’était aussi le soutien inconditionnel des jeunes patriotes et de la jeunesse du Fpi. C’est Navigué qui le révèle. Mais en fin de compte, il deviendra le mal aimé de ses camarades de l’aile Sangaré quand survint la crise au Fpi en 2014, surtout quand il décide de mettre fin à son exil marocain.
Gossio était d’une grande générosité qui donnait sans compter et sans distinguer aux dires de ses camarades. Il était un vrai bras séculier du Fpi, le champion de la résistance économique que magnifiait Laurent Gbagbo. Cependant, sa mort ébranlera diversement ses camarades de parti. Ceux qui étaient à Ivosep mardi soir n’étaient pas forcément ceux qui avaient toujours profité de ses bienfaits. Tous étaient du camp Affi, teintés de quelques membres du parti au pouvoir dont la ministre Anne Oulotto qui avait facilité son retour d’exil et l’ancien député Honoré Séa.
Une situation qui a fait dire à Affi N’guessan ceci face à la camera de la RTI : « Ce qu’il faut saluer, ce sont les présences et il faut qu’elles soient nombreuses. (…) Lorsque l’un d’entre nous est rappelé à Dieu, il faut que nous soyons tous là, aux côtés de sa famille pour lui rendre hommage et l’accompagner à sa dernière demeure. Nous souhaitons que ce geste soit répété par tous les ivoiriens, quel que soit leur bord politique. On n’a pas besoin de faire de leçon à qui que ce soit mais chacun doit donner un sens à sa vie dans la voie de la solidarité que nous nous devons et de la compassion. »
Pascal Affi N’guessan a invité les uns et les autres à la tolérance car finalement, cite-t-il, les saintes écritures ‘’vanité des vanités tout n’est que vanité’’.
SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr
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