Deux explosions ont eu lieu quasiment au même moment samedi à Addis Abeba, en Ethiopie, et à Bulawayo, au Zimbabwe, visant le premier ministre érythréen et le président zimbabwéen.
Il ne devrait y avoir aucun lien entre les deux explosions qui ont lieu, par simple coïncidence, mais pratiquement au même moment, à quatre mille kilomètres de distance, dans deux villes africaines. Et cependant, quelque chose, involontairement, lie les deux attentats qui ont eu lieu, samedi 23 juin, à Addis Abeba, en Ethiopie, et à Bulawayo, au Zimbabwe.
Selon Emmerson Mnangagwa, ses deux vice-présidents, Constantino Chiwenga et Kembo Mohadi, présents à ses côtés à cette réunion de campagne, ont été atteints par la déflagration. « L’explosion a touché mes vice-présidents, particulièrement le camarade Mohadi », a-t-il dit, sans autre détail.
Dans le premier cas, une bombe ou une grenade, selon les déclarations de dirigeants, a explosé dans la foule qui s’était réunie à l’invitation du parti au pouvoir en soutien au nouveau premier ministre, Abiy Mohammed, lequel est en train, à marches forcées, de changer l’Ethiopie, notamment en faisant la paix avec l’Erythrée et en ouvrant des secteurs de l’économie contrôlés depuis des décennies par une fraction du parti au pouvoir, laquelle est précisément en voie de marginalisation par les efforts de ce nouveau responsable, arrivé à la tête de l’Ethiopie début avril.
C’est peut-être à un risque similaire qu’est exposé le président zimbabwéen, Emmerson Mnangagwa, qui a échappé de peu à ce qui semble également au jet d’une grenade, laquelle a explosé sur une tribune du stade de Bulawayo, dans le sud-ouest du Zimbabwe, où il terminait un meeting. L’explosion a eu lieu au moment où il quittait les lieux avec ses proches. Il s’en est fallu de peu que le président Mnangagwa ne soit touché. L’épouse du vice-président, Marry Chiwenga, en revanche, fait partie des blessés, et a été hospitalisée.
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Le général Constantino Chiwenga était l’un des cerveaux du coup d’Etat qui avait poussé l’ex-président Robert Mugabe (93 ans) hors du pouvoir, en novembre. Depuis, le général a pris sa retraite afin de pouvoir occuper, en civil, des responsabilités politiques de premier rang. Il est souvent considéré comme le représentant des intérêts de l’armée au sein du nouveau pouvoir zimbabwéen, et un possible successeur pour M. Mnangagwa. Ce dernier, quoique issu du centre du pouvoir de la Zanu-PF, le parti de M. Mugabe, est parvenu à incarner un renouveau du pays qui pourrait se mettre à donner des résultats tangibles après les élections générales, dont le premier volet aura lieu le 30 juillet. Mais la mise à l’écart de Robert Mugabe avait signifié la défaite de toute une aile de la Zanu-PF, et depuis plusieurs mois, une tension souterraine agite le pouvoir zimbabwéen. L’idée de faire dérailler, en tuant le chef de l’Etat, le processus en cours, pourrait être une façon se servir des intérêts particuliers frustrés par la réorganisation du pouvoir.
Par Jean-Philippe Rémy (Johannesburg, correspondant régional)
Lemonde.fr
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