Par Connectionivoirienne
L’ancien ministre et député Gnamien Konan était face à la presse le mercredi 6 juin 2018, pour livrer aux ivoiriens le contenu de ses propositions qu’il entend faire pour combattre la corruption et booster l’inscription sur la liste électorale. Il a discuté avec les journalistes à bâton rompu sur plusieurs autres sujets de la vie nationale. Nous vous livrons ici son propos liminaire qui a donné lieu au débat
EXPOSE PRELIMINAIRE
Mesdames et messieurs de la presse nationale et internationale, honorables invités, chers membres et partisans de L@ NOUVELLE CÔTE D’IVOIRE
Je voudrais vous saluer et vous remercier pour votre présence massive et de qualité à cette première conférence de presse que je prononce en ma qualité de député à l’Assemblée Nationale.
Nous avons décidé de vous prendre à témoin. Nous vous prions d’être notre vecteur pour informer la population sur des propositions de loi que nous venons de déposer à l’Assemblée Nationale. Il en sera ainsi désormais lorsque nous aurons des propositions à faire à nos collègues pour le bien de tous.
Pour ce jour, nous allons vous entretenir sur cinq (5) propositions relativement à deux (2) textes de loi : La loi portant code électoral pour deux propositions et l’ordonnance relative à la prévention et à la lutte contre la corruption pour les trois autres propositions.
I- PROPOSITIONS DE LOI MODIFIANT LA LOI N°2000-514 DU 1er /08/ 2000 PORTANT CODE ELECTORAL TELLE QUE MODIFIEE PAR LES LOIS N°2012-1130 DU 13/12/2012, N°2012-1193 DU 27/12/2012 ET N°2015-216 DU 02/04/2015
1- Inscription obligatoire et d’office des nouveaux majeurs sur la liste électorale.
Le nombre d’électeurs par rapport à la population est anormalement bas en Côte d’Ivoire. 6 300 142 électeurs pour 23 millions d’habitants en 2015. La Guinée enregistre 5,2 millions électeurs pour 11 millions d’habitants. Au Ghana, le ratio est de 14 millions d’électeurs pour 28 millions d’habitants.
La forte proportion d’étrangers dans la population ivoirienne n’est pas la seule explication de ce phénomène. En effet, selon les chiffres du dernier recensement, sur 23 millions d’habitants, on compte 17 millions d’Ivoiriens. Ce qui devrait nous conduire à plus de 8 millions d’électeurs, en référence au Ghana et à la Guinée. Or, nous sommes loin de ce chiffre.
Le faible niveau du nombre d’électeurs en Côte d’Ivoire s’explique aussi par la désaffection des Ivoiriens à l’égard de la politique. Cela se manifeste par un manque d’intérêt pour les élections et à fortiori pour l’inscription sur les listes électorales. Il faut ajouter à cela le coût élevé, pour une population appauvrie, de l’établissement des pièces à fournir (carte nationale d’identité ou attestation d’identité ou certificat de nationalité) pour l’enrôlement sur les listes électorales.
Selon un constat fait à Botro, le coût de l’établissement combiné de la carte nationale d’identité et de l’attestation d’identité s’élève à 8 500 frs. Il faut aussi tenir compte du coût d’établissement du certificat de nationalité qui est de 8 000 frs. Un sondage réalisé dans le milieu estudiantin sur 4 échantillons de 100 étudiants chacun, à Abidjan et à Bouaké, donne le résultat suivant :
– 1er échantillon : 95 détiennent une CNI, 4 une carte d’électeur ;
– 2ème échantillon : 100 détiennent une CNI, 35 une carte d’électeur ;
– 3ème échantillon : 98 détiennent une CNI, aucun ne détient une carte d’électeur ;
– 4ème échantillon : 71 détiennent une CNI, 15 une carte d’électeur ;
Au total, sur 400 étudiants interrogés, 364 détiennent une CNI et 54 une carte d’électeur.
Face à l’indifférence généralisée, les partis politiques et les candidats aux élections financent l’inscription sur les listes électorales. Ce qui donne lieu parfois au convoyage de « bétail électoral » et au clientélisme qui faussent la compétition démocratique et alimentent des courants de corruption.
Pour résoudre définitivement le problème, afin d’obtenir une liste électorale plus conforme au potentiel de notre pays, une réécriture des articles 5 et 6 de la loi s’impose. Plus qu’un droit, l’inscription sur la liste électorale est rendue obligatoire par la modification de l’article 5. Cette inscription s’effectue d’office par la commission chargée des élections (article 6 modifié). Ces modifications n’engendrent pas de coût supplémentaire. Bien au contraire, elles permettent de réaliser des économies budgétaires qui doivent réduire le coût d’établissement des pièces d’identité, à défaut de le rendre gratuit.
2- La limitation de l’influence des puissances d’argent sur les campagnes électorales.
La modification de la loi porte sur l’interdiction des objets, vecteurs de publicité politique néfaste à la démocratie. En effet, les campagnes électorales sont marquées dans notre pays par le phénomène d’offres de divers objets de propagande politique faites par les candidats aux électeurs. Les offres vont des tee-shirts, des pagnes, des tissus, des calendriers, des porte-clés, des casquettes et autres objets de visibilité à l’effigie des candidats ou des partis politiques jusqu’à des sommes d’argent.
Le phénomène s’amplifie et installe la surenchère dans ce domaine. Les messages de fond et les projets de société que les candidats sont censés véhiculer pour convaincre les électeurs sont laissés en arrière-plan. Les candidats s’investissent plutôt à rechercher des fonds là où ils en trouvent, à partir de sources plus ou moins autorisées. C’est quelques fois dans les caisses de l’Etat, ou auprès des puissances d’argent d’ici et d’ailleurs qui attendent toujours un retour sur investissement.
Dans tous les cas, l’intrusion massive des objets de propagande politique dans les campagnes électorales alimente la corruption, déséquilibre les élections, fausse les résultats. Ce facteur de discrimination entre candidats est une grave menace pour la démocratie. Pour mettre fin au phénomène, l’article 31 de la loi est complété pour interdire trois mois avant l’ouverture de tout scrutin et pendant la période réglementaire de campagne, l’offre, le port et l’usage des objets de propagande ci-dessus énumérés ainsi que les dons, libéralités et autres faveurs administratives faits aux électeurs. Ces changements n’entrainent pas de coût supplémentaire.
II- PROPOSITION MODIFIANT L’ORDONNANCE 2013-660 DU 20/09/2013 RELATIVE A LA PREVENTION ET A LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION ET LES INFRACTIONS ASSIMILEES.
Tout le monde l’admet maintenant, la corruption est le mal qui gangrène la société ivoirienne. Entre autres méfaits, elle prive l’Etat de 1 000 à 2 000 milliards de francs CFA par an, selon les évaluations faites par les organismes internationaux les plus sérieux. La corruption doit être éradiquée. C’est la première condition à réaliser si nous voulons réellement nous donner des chances de sortir du sous-développement endémique. Nos solutions se résument en deux mots à implémenter : exemplarité et prévention. C’est sur la base de cette conviction que nous faisons les trois propositions de modification de l’ordonnance en objet.
3- Soustraire de l’obligation de déclaration de patrimoine les députés et les sénateurs.
Il convient de soustraire de cette liste dressée à l’article 5 de l’ordonnance les élus qui n’ont pas sous leur responsabilité la gestion de fonds publics. Il s’agit pour l’instant des députés et des sénateurs. La déclaration de leur patrimoine ne se justifie pas dans le contexte de cette ordonnance. Les soustraire de cette obligation a l’avantage d’alléger la liste des déclarants. La tâche de la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance dans l’exploitation des données recueillies s’en trouvera amoindrie. L’article 5 de l’ordonnance est modifié en conséquence.
4- Rendre possible la déclaration en ligne du patrimoine des agents publics
La déclaration en ligne, à partir d’une plateforme numérique dédiée, se substitue à la déclaration physique, qui nécessite le déplacement des personnalités concernées et le traitement manuel des données à la charge de la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance. La déclaration en ligne qui épouse l’ère du temps est moderne, précise, plus fiable, fait économiser du temps et de l’argent à tout le monde. L’article 7 de l’ordonnance est modifié à cet effet. Cette modification n’entraine pas de coût supplémentaire étant entendu que le budget alloué à la réception et au traitement physique des déclarations de patrimoine est consacré à la mise en œuvre et au fonctionnement de la plateforme numérique dédiée.
5- Rendre publique la déclaration de patrimoine des agents publics, tout en assurant la protection des données personnelles privées recueillies.
L’article 9 nouveau supprime la confidentialité de la déclaration de patrimoine. Cette déclaration est rendue publique par la réécriture de cet article. L’article 10 est modifié en ce qu’il permet de déterminer par décret pris en conseil des ministres la liste des données personnelles à caractère privé que doit protéger la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance. Quelques exemples de données privées à considérer sont : l’adresse personnelle du déclarant, le nom du titulaire antérieur du bien, les numéros de comptes bancaires, la situation géographique exacte des biens concernés, les noms des autres titulaires des biens indivis, etc.
Ces changements s’imposent parce que la prévention et la lutte contre la corruption ne s’accommodent pas de la confidentialité et du scellé de rigueur qui sont imposés actuellement à la Haute Autorité pour la Bonne Gouvernance sur les données recueillies. Cette lutte exige transparence et vérité qui sont de puissants éléments de prévention. Le fisc est le bénéficiaire de la levée du verrou de la confidentialité. Suivent le citoyen lambda et l’autorité politique. Ces modifications sont sans incidences financières pour le budget de l’Etat.
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