Par Connectionivoirienne
Située à environ une heure de route au nord-est d’Abidjan, Jacqueville ou la capitale des 3A (Alladian, Avikam, Ahizi) est devenue un pôle d’attraction du tourisme balnéaire comme Grand Bassam, Assinie ou Azuretti. Ces dernières années, tirant profit du pont sur la lagune, l’immobilier y connaît un essor, dopé par les cadres abidjanais à la recherche d’un calme reposant. La ville est pour l’instant paisible, loin des nuisances sonores et de la pollution automobile d’Abidjan. À Jacqueville, les véhicules sont rares dans les rues sablonneuses et quelques-unes bitumées. La situation pourrait changer rapidement avec les mesures prises par le conseil municipal pour accélérer le développement.
Depuis qu’elle a été reliée à l’autre Côte d’Ivoire par le pont ouvert en 2015, ses plages vivent une animation particulière surtout les weekends où plus de deux mille visiteurs viennent profiter du vent frais. Dans cette partie sud de la ville, la mairie a dû mettre les bouchées doubles pour obtenir le déguerpissement des pêcheurs qui colonisaient une partie du littoral dans l’insalubrité totale. Depuis, le bord de mer offre un environnement plus acceptable que par le passé.
Au nord de la ville, le projet futuriste ‘’ville nouvelle’’ devient une réalité après des blocages orchestrés par un opérateur véreux. Aujourd’hui la viabilisation s’accélère à commencer par l’ouverture des voies et bientôt l’électrification de la zone qui permettra d’installer un peu plus de six mille foyers sur 400 ha. Ici, au dire du maire Beugré Joachim, tout a été mis en œuvre pour éviter des conflits avec les propriétaires terriens. Il a fait en sorte que chacun trouve son compte dans les modalités de répartition des lots.
Non loin de là, s’élève le foyer Dominique Ouattara, fruit de l’audience accordée au maire par le chef de l’Etat en 2014. Un joyau architectural qui a coûté environ 1,2 milliard de FCFA financé par le Programme présidentiel d’urgence (Ppu). Il reçoit à ce jour, 40 pensionnaires, tous des élèves des lycées et collèges de la ville. Sa capacité de 500 places est loin d’être atteinte car l’hébergement n’est pas gratuit. Le parent d’élève doit débourser 200 mille FCFA l’année, un coût qui représente la moitié du coût réel, selon le maire qui dit être obligé d’apporter un soutien personnel pour combler les charges d’exploitation de 2 millions CFA par mois. Pour Beugré Joachim, cette contribution est essentielle et elle constitue un passage pour garantir la réussite aux élèves de sa commune. Laquelle comprend 33 villages dont 13 villages Alladian, 13 villages Ahizi et 7 villages Avikam. Les Alladian et les Ahizi ont leurs villages le long de la mer et partagent les bords lagunaires avec les Avikam de l’ïle Deblay et au-delà. Alladian et Ahizi ne sont pas des pêcheurs contrairement à ce que l’on pourrait imaginer.
Le paradoxe du pétrole
Nous avons eu l’occasion de visiter quelques-uns, le long du littoral, un après-midi ensoleillé du mardi 6 février 2018. Addah, Grand Jacques, Adessé, Adjué chez le comédien Bienvenu Néba… Des villages où habitat moderne et habitat traditionnel se côtoient avec un environnement propre, des concessions aux clôtures de bambou. Seul bémol, l’état de la seule route intérieure qui relie les villages côtiers. Poussiéreuse et Impraticable en saison sèche, elle l’est davantage en temps de pluie. C’est le grand paradoxe et tous les habitants et cadres y compris le patron de la commune s’en désolent. Cette voie est bordée des pipelines des multinationales qui exploitent le pétrole et le gaz des fonds marins de Jacqueville. Tout au long du parcours, les panneaux de signalisation de la Petroci sont visibles et on peut y lire ‘’Attention danger !’’.
Ironie du sort !? Hormis quelque 200 millions de FCFA d’allocation annuelle gérée par le Conseil Pétrole-Gaz, rien ne pointe à l’horizon quant au bitumage des 46 Km de cette voie.
Bienvenue à l’île Deblay, zéro pollution automobile
Au bout d’une heure et demie de parcours dans ces terres intérieures et hospitalières, nous sommes en bordure de lagune. De l’autre côté de la rive nord, s’étend l’île Deblay habitée par des Avikam qui y comptent 4 villages et un gros campement : Kouvé, Gbéhiri, Taboutou et Téfrédji. Nous sommes accueillis par un ancien banquier à la retraite qui fait office de maire résident, André AhéKpa, éleveur de crocodiles. Sur cette île bordée de part et d’autre par la lagune Ebrié, le seul moyen de déplacement est la pirogue. On ne connaît pas la voiture. Du moins jusqu’à l’achèvement du projet de bac de la mairie. Un premier quai est déjà construit, reste celui du côté de l’île. Le bac aura une traction manuelle et le câble de traction est lui aussi en place. Visiblement, l’endroit est paradisiaque mais reste inexploité et les autorités aimeraient bien intéresser des hôteliers à venir s’installer là. La lagune est poissonneuse et calme. Mais elle est agitée lorsqu’on avance vers l’embouchure à quelques encablures de Grand Lahou. C’est ici à Gbéhiri, après un déjeuner copieux que le maire Beugré Joachim décline sa vision du développement aux journalistes visiteurs
« Ici nous avons la terre mais nous n’avons pas les moyens financiers. Donc nous pensons que si nous donnons une petite partie de cette terre à des opérateurs, ils nous ouvrent des voies et nous nous faisons accompagner par le gouvernement sur le projet d’électrification. (…) pareil pour l’eau. Nous travaillons à la renaissance de Jacqueville. La mairie réalise des choses c’est vrai mais à côté certains cadres et des opérateurs initient également des projets. Par exemple l’hôtel Prunelle de 74 chambres est une opération d’un privé. Nous souhaitons cependant que malgré le développement, Jacqueville garde son aspect de ville paisible », a-t-il éclairé, invitant l’Etat de Côte d’Ivoire à venir prendre sa part dans la construction de la ville, notamment en renforçant l’unité de gendarmerie, en construisant un commissariat et en implantant une direction départementale du tourisme et loisir.
S. Debailly de retour de Jacqueville
sdebailly@yahoo.fr
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