Macron et la classe des 28 élèves

Par Hamed Koffi Zarour

C’est l’histoire d’un Chef d’Etat français, Macron, qui en visite à Dakar, entre dans une salle de classe. Face aux élèves qui se lèvent pour lui faire déférence, il tient très surpris, la question suivante :

– Depuis quand êtes-vous 28 dans votre classe ?
– Depuis 3 jours monsieur ! répond une élève.

La vidéo qui immortalise cet échange franchit la barre du million de vue sur internet, en seulement moins de 2 heures. Ce succès ne tient pas à l’impertinence attribuée par certains au président Macron, ni à la grande gêne des officiels sénégalais qui l’accompagnaient. Il réside ailleurs.

En effet, les autorités de ce pays frère ont tenté de maquiller un mal pernicieux dont souffre notoirement l’école africaine : le surpeuplement des classes. La supercherie était trop flagrante pour passer inaperçue. Elle a été découverte. Et honte s’en est suivie!

Pourquoi masquer les apparences, quand on a demandé et obtenu l’onction du peuple pour les changer ? Pourquoi nos dirigeants, une fois au pouvoir, rechignent-ils à traiter frontalement les problèmes qu’ils dénonçaient avec véhémence, quand ils étaient dans l’opposition ?

Au-delà de Dakar et ses autorités, c’est toute la classe dirigeante africaine qui est indexée. Elle est passée maître dans l’art d’apporter des solutions conjoncturelles (donc pas toujours appropriées ni durables), à des problèmes structurels qui eux, s’éternisent et s’amplifient.

Dans un continent où tous les chiffres et indicateurs de bien-être qui sont cités dans les discours officiels sont continuellement dopés, les populations triment dans le surpeuplement tout azimut : surpeuplement des écoles, des universités, des bus, des prisons, des maternités, des hôpitaux. Avec son corollaire de chômage criard.

Comment comprendre qu’un demi-siècle après nos indépendances, nous en soyons encore à ce stade de dénuement généralisée ?

Depuis 1960, nous vivons embourbés dans le suivisme quasi-aveugle non pas des projets de société, non pas de perspectives prometteuses, mais des leaders politiques et ceux qui se présentent comme tel. Nous suivons des hommes, en lieu et place d’idéaux.

A preuve, comment s’expliquer qu’un pays comme la Côte d’Ivoire, qui a été dirigé par toutes les têtes significatives de son échiquier politique, se retrouve plus que jamais dans la tourmente ? Notre économie libéralisée aux extrêmes, accentue la paupérisation des couches les moins favorisées, au profit des grands groupes à capitaux pourtant étrangers. Alors que la priorité devrait être la promotion des nationaux. Notre tissu sociopolitique est fragmenté, alors que se poursuivent les condamnations judiciaires de plusieurs cadres de l’opposition. Ce qui met à mal la cohésion sociale. Nous assistons en ce moment à un divorce en sourdine entre les deux principales forces au pouvoir, à l’orée de 2020. Guéguerre de positionnement. Non pas pour l’amélioration des conditions de vie des ivoiriens, mais juste pour garder le pouvoir et posséder les clés des trésors .

Les ivoiriens sans le savoir, n’ont fait que le lit de leurs leaders politiques. La Côte d’Ivoire est restée stagnante dans bien de domaines, et incapable de redistribuer équitablement à ses fils et filles, ses richesses pourtant abondantes. Ce qui contraint le pays à persister dans un cycle d’endettement.

Si en plein 21è siècle, 60 ans après nos indépendances, le fait pour un occidental de voir en Afrique une salle de classe de 28 élèves, relève du surréalisme, chacun de nous devrait ressentir en lui le poids de son attentisme et son immobilisme, dans le laxisme et l’abandon de responsabilité de nos dirigeants.

Marcus Garvey a dit :  » Il est possible que nous ne vivions pas tous la réalité d’un empire africain si fort, si puissant qu’il imposerait le respect à l’humanité, mais nous pouvons cependant durant notre vie travailler et œuvrer à faire de ce projet une réalité pour une autre génération « .

Côte d’Ivoire, réveille-toi !

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