Par Connectionivoirienne
Chez nous au pays, on a des problèmes avec la vérité et on préfère donner dans la démagogie pour détourner les esprits faibles au nom de la politique.
C’est Laurent Gbagbo qui, dans sa conquête du pouvoir a séduit les ivoiriens avec son idée d’école gratuite. Encore que cette thématique n’a pas séduit tout le monde car certains trouvaient le projet utopique et pratiquement irréalisable. Gbagbo et le Fpi y ont cru. En fait, cette idée n’est pas venue dans la tête de Gbagbo ex nihilo. Il a toujours clamé qu’il était lui-même le produit de l’école gratuite sous le colonisateur puis sous Houphouët. A cette époque, l’élève qui mettait le pied à l’école avait livres, cahiers, gites et couverts. C’est cette pratique qui a séduit le politicien Gbagbo. Arrivé au pouvoir, il a tenté l’expérience avec des résultats plausibles dès les premières années. Effectivement entre 2000 et 2002, des élèves du primaire en Côte d’Ivoire ont reçu gracieusement des livres et des cahiers. L’uniforme a été supprimé. Mais cette politique était loin de résoudre tous les problèmes de l’école qui traversait déjà une profonde crise depuis la moitié des années 80. Si les apprenants pouvaient être satisfaits, qu’en était-il des enseignants et des infrastructures elles-mêmes ?
C’est justement l’entretien de l’existant infrastructurel qui amena le gouvernement d’Henri Konan Bédié à créer les Coges (Comité de gestion des établissements scolaires) en 1995. La création des Coges a eu des résultats mitigés. Leur existence a eu pour conséquence la construction de salles de classe, la construction de latrines, de points d’eau potable dans des villages comme à Galébré.
Depuis son accession au pouvoir, Ouattara se propose de faire la gratuité de l’école. Mieux, le régime a décidé de rendre l’école obligatoire au primaire. Une esquisse budgétaire a été élaborée dans ce sens et cette politique devait coûter selon les estimations en séminaire gouvernemental 900 milliards de FCFA. Ce que le gouvernement Ouattara n’a pas dit, c’est le niveau de participation des parents d’élèves à cette enveloppe budgétaire. Les financements à l’origine devaient venir des bailleurs de fonds internationaux.
A l’analyse des choses, la question qui se pose est de savoir si en 2017 et pour les années à venir, l’école peut être réellement gratuite. C’est-à-dire, au regard des capacités actuelles de notre pays, on peut aisément affirmer que les parents d’élèves peuvent inscrire leurs enfants au collège et au lycée à 5 000 FCFA et s’arrêter là pour toute l’année ?
Chacun de nous aura surement sa réponse. Mais au regard de l’évolution des effectifs (plus d’un million d’élèves) dans nos collèges et lycées, au regard du déficit de classes et d’enseignants, du point de vue de l’amélioration de la pédagogie et des résultats scolaires, à la vérité, la gratuité, c’est non !
Non l’école ne peut être entièrement gratuite en l’état actuel des choses. En 2016 et les années précédentes, l’éducation nationale à elle seule, a consommé plus de 45 % du budget national c’est-à-dire plus de 2 mille milliards de FCFA. Les chiffres sont continuellement en progression. Si en 2005 par exemple le pays comptait 522 établissements (avec une prépondérance du privé à hauteur de 70 %) pour 660.152 élèves, 19.892 enseignants, en 2017, nous sommes largement au-dessus des chiffres. Le nombre d’élèves dépasse largement le million et on est encore en-deçà de 50 % de taux de scolarisation pour cet ordre d’enseignement. Malgré tout l’investissement public sus-indiqué, l’école ivoirienne reste une grande malade, minée qu’elle est par de nombreuses difficultés financières. Ces dernières années les enseignants n’ont pas cessé de revendiquer. Dans ce qu’il est convenu d’appeler le stock d’arriérés de 249 milliards de FCFA, plus de la moitié est due aux personnels de l’éducation nationale.
C’est donc une utopie et une démagogie, en tout cas en ce qui concerne le régime Ouattara, de dire que l’école gratuite est possible. Il convient donc pour le ministre de l’éducation nationale de sortir de sa bulle et de s’inscrire dans le devoir de vérité. Il faut quitter la grandiloquence, la manipulation des esprits faibles et dire les choses de façon juste, honnête et pondérée. Il faut adapter la communication et dire aux Ivoiriens la vérité qu’on leur doit sur l’école. Aujourd’hui, il est impossible de supprimer les frais dits annexes dans le public au risque de provoquer de grands déséquilibres financiers. Il faut le dire.
Cependant, ce qu’il reste à faire c’est de les harmoniser sur toute l’étendue du territoire, d’assouplir les modalités de paiement et bien sûr d’améliorer la gestion de tous les frais perçus en rendant démocratiques et transparents les comités en charge de leur gestion.
Les Coges réalisent des choses et prolongent l’action de l’Etat. Il faut alors améliorer leur gestion et ne pas les transformer en structures de collecte d’argent pour les barons d’un régime.
Quand j’ai vu ce qui a été fait au collège moderne de Cocody devenu lycée qui a une clôture et des bâtiments bien repeints pour cette rentrée, je me dis que si c’est une œuvre du Coges de cet établissement, cette action est à saluer et à montrer en exemple.
C’était juste ma contribution !
SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr
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