Il devait rencontrer Emmanuel Macron vendredi pour mettre à plat leurs désaccords, mais il n’aura pas attendu : Pierre de Villiers, le chef d’état-major des armées, a annoncé sa démission mercredi matin dans un communiqué transmis à l’AFP. Le militaire a signifié sa décision au chef de l’Etat – qui l’a acceptée – lors du conseil restreint de Défense qui se tenait à 9 heures à l’Elysée. Le général de Villiers explique dans son communiqué qu’il considère « ne plus être en mesure d’assurer la pérennité du modèle d’armée auquel [il] croit pour garantir la protection de la France et des Français, aujourd’hui et demain, et soutenir les ambitions de notre pays » et avoir « pris ses responsabilités ».
Accepter ou quitter son poste, le dilemme que devait résoudre Pierre de Villiers
L’épisode clôt un bras de fer de plusieurs jours entre le chef d’état-major et le Président. Mercredi dernier, dans un contexte de restrictions budgétaires à tous les niveaux de l’Etat, le général a critiqué devant les députés l’annulation pour 2017 de près de 850 millions d’euros de crédits liés au budget de la Défense. Emmanuel Macron l’a vivement recadré le lendemain, à la veille du défilé militaire du 14-Juillet. « Je suis votre chef », a-t-il lancé devant les militaires qui participaient aux événements de la Fête nationale.
« Si quelque chose m’oppose au chef d’état-major, le chef d’état-major change », a ensuite déclaré le chef de l’Etat dans le JDD. Pierre de Villiers devait donc accepter les choix de l’exécutif ou partir. C’est la seconde option qu’il a choisie.
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Pour Emmanuel Macron, il va désormais falloir trouver un remplaçant compatible avec sa ligne politique parmi les hauts responsables militaires. En marge de ces relations avec l’armée, le chef de l’Etat va devoir aussi s’expliquer avec sa majorité à l’Assemblée. Plusieurs députés La République en marche, à commencer par le président de la commission de Défense Jean-Jacques Bridey, étaient montés au créneau ces derniers jours pour défendre la position de Pierre de Villiers. (Lejdd.fr avec AFP)
Un fait sans précédent depuis 1958
La démission du général Pierre de Villiers, officialisée le 19 juillet, est un événement historique. « Aucun chef d’état-major des armées n’a été amené à démissionner » depuis que le poste a pris sa configuration actuelle de plus haut responsable militaire placé sous l’autorité du ministre de la défense, en juillet 1962, explique l’historien Philippe Vial, chercheur au service historique de la défense. « Seuls des chefs d’état-major d’armée ont démissionné sous la Ve République », précise l’universitaire. Ils sont quatre à ce jour. Le premier est l’amiral André Patou le 28 mars 1970, qui refuse la baisse des moyens de la marine imposée par le ministre de la défense nationale, Michel Debré. Ensuite, ce sont trois chefs de l’armée de terre qui ont choisi de partir prématurément. « Le général Jean Lagarde quitte silencieusement ses fonctions le 30 septembre 1980 pour protester contre l’insuffisance des moyens octroyés », indique Philippe Vial. Il est suivi par son successeur le général Jean Delaunay, le 9 mars 1983, pour les mêmes raisons. Lui s’est opposé au ministre socialiste Charles Hernu qui prévoyait de réduire de 10 % les effectifs, mais « il avait aussi, plus grave, mis en cause l’efficacité de la dissuasion nucléaire ». Le troisième est Bruno Cuche, le 1er juillet 2008. Le général démissionne après un dramatique accident de tir à balles réelles lors d’une démonstration au 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine de Carcassonne, qui a blessé seize personnes dont quatre gravement. « Vous êtes des amateurs ! », s’était emporté le président Nicolas Sarkozy.
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Un bon cas d’école. Moi, je salue ce genre de personnes. Oui, il faut savoir démissionner. La beauté de ce schéma est que chacun est en plein dans ses droits. Le président a le droit à juste titre d’ailleurs de dire « Je suis votre chef ». Et, le CEMA a d’autre part le droit de dire, je ne m’y reconnaît pas dans votre nouvelle ligne, voici mon tablier. Et puis, les choses vont se poursuivre de plus belle avec de nouvelles personnes et politiques. Et la terre continuera de tourner.
Maintenant, le communiqué transmis à l’AFP par le CEMA sortant est plein de sens. Si d’aventure quelque chose arrivait à la France (attaques terroristes ou quelque chose de la sorte), la presse et autres diront De Villiers n’avait-il pas raison ?
Entre autres, Macron dit qu’il compte porter les dépenses sur la défense à 2% du PIB d’ici 2025, comme requis par l’OTAN sur insistance des Américains. Donc, il n’abandonne de facto un certain modèle qui se veut une armée française moderne prête à faire face à toutes les menaces quel que soit le champ.
Mais bon, on ne fait qu’observer…