Au Mali une présumée attaque djihadiste contre un établissement hôtelier fait 7 morts dont 5 «assaillants »

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Au Mali, une « attaque djihadiste » tue deux personnes, dont une Franco-Gabonaise

Cinq assaillants, qui ont été abattus, ont ciblé, dimanche, un établissement hôtelier de Bamako fréquenté par la bourgeoisie malienne et des occidentaux.

Dimanche 18 juin, une salve de balles traçantes illumine le ciel de Yirimadio, à une quinzaine de kilomètres de Bamako. Les restes du Campement, un espace hôtelier prisé des expatriés, des occidentaux et de la bourgeoisie malienne, brûlent encore ardemment.

Selon le dernier bilan de l’attaque terroriste survenue sur le site, deux personnes sont mortes, dont une Franco-Gabonaise – la seconde est toujours en cours d’identification –, et une dizaine ont été blessées. Au total, 32 personnes ont été secourues mais, selon une bonne source, des clients manqueraient encore à l’appel. Par ailleurs, cinq terroristes ont été tués dans cette « attaque djihadiste » et un complice a été arrêté, a indiqué sur Radio France internationale (RFI) le ministre de la sécurité publique du Mali, le général Salif Traoré. Parmi les blessés figurent huit éléments des forces de sécurité maliennes, précise un proche du ministre.

Plus tôt dans l’après-midi, deux petits groupes d’assaillants, selon des témoignages concordants, ont attaqué l’établissement. « Les premiers assaillants sont arrivés très bien armés à la porte principale, a raconté Karim, un employé. Ils ont tiré en l’air alors avant de grimper vers les piscines. » « Ils cherchaient en réalité des Blancs », précise Sory Ibrahim, un journaliste interrogé par RFI, présent sur les lieux au moment de l’attaque. Un autre employé de l’hôtel, Boubacar Konta, raconte avoir vu les assaillants brandir « leurs armes en l’air, crier “Allah Akhbar”, avant de tirer des rafales dans le ciel ».
Intenses échanges de tirs

Un autre groupe s’est approché par le haut de l’établissement, ouvrant le feu sur les clients. « Par chance, poursuit Karim, il y avait des militaires en permission. » Les soldats présents auraient alors aussitôt saisi leurs armes pour répliquer, parvenant à repousser les assaillants.

Les Forces spéciales antiterroristes du Mali (Forsat) sont ensuite arrivées sur les lieux pour exfiltrer les clients, certains, vêtus de leur seul short de bain, équipés à la hâte par les soldats d’un gilet pare-balles. En fin d’après-midi, les Forsat, appuyées par l’armée, des soldats européens et des éléments de sécurité de l’ONU, ont lancé un assaut sur la colline où les terroristes s’étaient retranchés. D’intenses échanges de tirs et des explosions se sont fait entendre alors que la consigne d’éteindre toute source de lumière avait été donnée afin que les djihadistes ne disposent pas de cibles.

La configuration des lieux, parfaite pour la détente dominicale, a toutefois rendu extrêmement difficile la progression des forces de l’ordre ; la zone est vaste et verdoyante et le Campement ressemble à un petit village dont les maisons sont éparpillées dans les collines. On y trouve une multitude de lieux de détente, trois piscines. La nuit venue, sans aucun moyen de vision nocturne, les forces spéciales ont traqué les assaillants.

Dans une tribune publiée dans le Monde Afrique en janvier, lors du sommet Afrique-France à Bamako, son propriétaire, Hervé Depardieu, s’était insurgé contre les alertes de sécurité des chancelleries occidentales. « Les consignes de sécurité alarmantes émises par le consulat et les “conseils aux voyageurs” dissuasifs du site du ministère (français) des affaires étrangères entament sérieusement notre joie de vivre et nos libertés », déplorait-il.

Moins de dix jours avant ce nouvel attentat, l’ambassade américaine avait lancé une alerte pour informer ses concitoyens d’une « menace d’attaques accrue » sur les chancelleries occidentales, les lieux de culte et les sites fréquentés par les Occidentaux.

Selon une source proche du président malien Ibrahim Boubacar Keïta, jointe par Le Monde, des signaux laissaient présager une attaque djihadiste imminente. « Nous avions eu des alertes récentes, a précisé cette source. Il y a deux jours, en prélude à la marche de l’opposition [qui s’est tenue samedi à Bamako], nous avions découvert une voiture avec des armes. »

Une enquête a été ouverte par le pôle judiciaire antiterroriste. Une arme et un téléphone portable ont été récupérés sur les lieux de l’attaque, a indiqué le ministre de la sécurité publique.
Etat d’urgence

Lundi matin, cet attentat n’avait pas encore été revendiqué. Celui-ci rappelle cependant plusieurs attaques perpétrées dans la capitale malienne, au Burkina Faso ou en Côte d’Ivoire. Toutes portaient la signature d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) ou de mouvements qui lui sont proches.

La dernière attaque djihadiste visant des Occidentaux dans la capitale malienne remonte à mars 2016 ; elle avait visé l’hôtel Nord-Sud de Bamako, abritant la mission de l’Union européenne qui entraîne l’armée malienne (EUTM Mali). Un assaillant avait été tué.

Le 20 novembre 2015, un attentat contre l’hôtel Radisson Blu avait fait vingt morts, outre ses deux auteurs. Il avait été revendiqué par AQMI, en coordination avec le groupe djihadiste de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, Al-Mourabitoune, qui avait scellé à cette occasion son ralliement à AQMI.

L’état d’urgence est en vigueur dans le pays quasiment sans interruption depuis cette attaque. En mars 2015, l’attaque contre le restaurant-bar La Terrasse avait également fait cinq morts, dont deux Occidentaux.

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al-Qaida. Ils ont été en grande partie chassés de cette région par une intervention militaire internationale, lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France, et qui se poursuit actuellement. Mais des zones échappent au contrôle des forces maliennes et étrangères, régulièrement visées par des attaques meurtrières, malgré la signature, en mai-juin 2015, d’un accord de paix, censé isoler définitivement les djihadistes, mais dont la mise en application accumule les retards.

Depuis 2015, ces attaques se sont étendues dans le centre et dans le sud du pays, et le phénomène gagne les pays voisins, en particulier le Burkina Faso et le Niger.

Par Cyril Bensimon et Anthony Fouchard (contributeur Le Monde Afrique, Bamako)

Le Monde.fr avec AFP

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