PRAO YAO SERAPHIN
« La générosité à l’encontre des gredins est presque une indélicatesse à l’encontre du bien » (Gustave Flaubert)
La Côte d’Ivoire est devenue depuis 2002, un pays où seule, la violence permet de résoudre les problèmes. Même pour accéder à des postes politico-administratifs, point n’est besoin de méninges. Il suffit d’être un amas de muscle et posséder une arme pour gravir les échelons. Les exemples sont légions : la fulgurante ascension des ex-rebelles aux hauts postes en Côte d’Ivoire en est une parfaite illustration. Récemment, pour réclamer des primes issues de contrats privés, les militaires ivoiriens ont tué des civils et troublé l’ordre public. Finalement, ils ont obtenu des millions de FCFA.
Or, la Côte d’Ivoire doit légalement des milliards de FCFA aux fonctionnaires ivoiriens depuis 2009. Le 09 janvier, les fonctionnaires de Côte d’Ivoire ont entamé une grève générale, pour l’amélioration de leurs conditions de travail. Après avoir obtenu satisfaction sur cinq des six points de revendications, ils ont suspendu leur mot d’ordre de grève le 30 janvier pour un mois, afin de « donner une chance aux négociations » avec le gouvernement. Ces fonctionnaires très civilisés, ont montré au monde entier qu’ils sont des républicains, patriotes et responsables. Mais au lieu de résoudre leurs problèmes, le gouvernement a cherché à ruser avec eux. Le ministre de la fonction publique avance aujourd’hui un étrange concept, celui d’une trêve. Et pourtant, quand les FRCI ont pris les armes pour menacer en tirant partout, le Président Ouattara a débloqué rapidement 12 et 17 millions pour donner à chacun sans parler de trêve. Quelle est cette indécence de parler de trêve lorsqu’il s’agit des fonctionnaires ? En se comportant de cette façon, le gouvernement ivoirien donne une mauvaise image d’un pays qui ne respecte que la violence et la barbarie. La Côte d’Ivoire traverse des moments très sensibles de l’Histoire et les comportements irresponsables peuvent conduire le pays dans un chaos indescriptible. Les fonctionnaires ivoiriens ne sont pas certes des guerriers comme les autres mais leurs arrêts de travail causeront un manque à gagner pour le pays.
On se souvient de la paralysie entière de tous les secteurs économiques lors de la dernière grève. Le gouvernement a eu un mois pour discuter avec les fonctionnaires, ce n’est plus l’occasion de ruser avec des honnêtes citoyens par un comité technique qui doit travailler au plus vite et « faire des propositions au Premier ministre » afin que « des décisions soient prises » pour arriver à la trêve. Cette juxtaposition de mots n’a de sens que pour ceux qui en comprennent la trame. Pour les fonctionnaires, cette attitude est une comédie de mauvais aloi qui frise le mépris et le manque de considération pour ceux qui font fonctionner la machine étatique dans un pays qui prétend aller à l’émergence économique.
Il est sage pour le gouvernement de régler le problème des fonctionnaires pour que le pays retrouve une accalmie.
Les fonctionnaires de Côte d’Ivoire ont montré une certaine sagesse et maturité mais ils réclament simplement le paiement intégral de leurs arriérés de salaires. Il est moralement injuste de demander aux uns une trêve et accorder aux autres une attitude bienveillante. C’est une erreur de croire que ceux qui n’ont pas les armes sont moins dangereux que ceux qui en possèdent. Il y a des moments où le silence est plus dangereux que le crépitement des armes.
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