Albert Mabri Toikeusse n’est plus, depuis le vendredi 25 novembre 2016, le ministre des Affaires étrangères de la Côte d’Ivoire. Il a été limogé par le président Ouattara suite à la divergence survenue dans la répartition des candidatures entre les partis du Rhdp pour les législatives du 18 décembre 2016. Le désormais ex-ministre a cependant indiqué que son parti, l’Udpci, demeurera dans la coalition au pouvoir, après une réunion de son Bureau politique tenue le lundi 28 novembre 2016. Mabri a souligné, par la même occasion, qu’il est désormais » dégagé » pour la présidentielle de 2020. Une déclaration qui sonne comme une alerte aux potentiels adversaires du leader de l’Udpci. Mais aura t-il les ressources nécessaires pour aller à cette compétition ? Son limogeage brusque et inattendu du gouvernement ne va-t-il pas casser le leadership qu’il revendiquait, en quelque sorte, dans la région des Montagnes ? Autant de questions qui présagent d’une véritable bataille de positionnement à l’Ouest. On le sait, en Afrique, singulièrement en Côte d’Ivoire, le poste de ministre confère de nombreux avantages à son détenteur. Cela lui donne une influence avérée dans sa région et peut même le positionner comme le leader craint et écouté. A contrario, perdre ce poste peut avoir des conséquences néfastes sur la personnalité, notamment dans sa sphère d’influence. Des exemples surabondent de cadres qui ont perdu leur mainmise sur leur région après avoir été remerciés d’un poste juteux (Président d’institution, ministre, Pca, Dg…). Mabri Toikeusse sera-t-il l’exception qui confirme la règle ? Rien n’est moins sûr. Il faut en effet noter que dans l’Ouest montagneux, des cadres, et non des moindres, sont en opposition ouverte avec l’ex-ministre des Affaires étrangères de Ouattara. Ses adversaires politiques savourent en sourdine son débarquement et peaufinent certainement des stratégies pour combattre le président du conseil régional du Tonpki. Parmi ceux-ci, l’on peut citer Siki Blon Blaise, cadre reconnu de l’Ouest, et rival politique de Mabri depuis la bataille pour le contrôle du parti de Gueï Robert. Député Rdr de Man sous-préfecture, Blon Blaise alias »Bulldozer », mène un farouche combat dans le Tonpki pour « balayer » Mabri Toikeusse. Quand le président de l’Udpci a décidé de partir, sans le Rhdp, aux législatives prochaines, Blon Blaise a été désigné coordonnateur du Rhdp dans le Tonkpi, en remplacement de Mabri Toikeusse. Il en a informé, la semaine dernière, les chefs de communautés du canton Bluno, à Man. Cette promotion lui donne un certain avantage sur l’ex-ministre dans la bataille de leadership dans la région.
Dans le Guemon
Juste à côté du Tonpki, il y a la région du Guemon, avec à sa tête Méambly Tié Evariste. Membre du Bureau politique du Pdci-Rda, coordonnateur de ce parti dans l’Ouest, Méambly a démontré, plus d’une fois, qu’il maîtrise sa région. En tant que candidat indépendant, il a remporté les législatives de 2011, reprises trois fois, face à un candidat du pouvoir. Pour les législatives prochaines, il est candidat à Facobly, Guézon, Koua, Sémien et Tiény-Seably, commune et sous-préfectures. En avril 2013, Méambly s’est fait élire président du conseil régional du Guemon. Il est cependant de notoriété publique qu’entre le président du Conseil régional du Tonpki, Mabri, et celui du Guemon, Méambly, le courant ne passe pas. On se souvient qu’en meeting en faveur d’Alassane Ouattara, samedi 16 mai 2015, à Duékoué, Mabri Toikeusse avait ouvertement accusé Méambly, en présence du Premier ministre Duncan, d’avoir saboté la cérémonie. Il lui était notamment reproché de ne s’être pas associé à l’organisation de ce meeting, de n’avoir pas participé aux réunions et même à la cérémonie. La réplique de Méambly n’a pas tardé. « Je voudrais rappeler à l’illustre ministre d’Etat, Mabri Toikeusse, qu’on ne jette pas à la vindicte populaire celui avec qui on a attaché, dans l’antichambre, des fétiches, et qui a, jusqu’à ce jour, le séquestre des canaris où se trouvent ces fétiches… J’ai été élu par la plus grande région des Wê de Côte d’Ivoire, le Guémon. Je ne pourrais plus accepter, une seconde fois, qu’il me traite de la sorte. Je voudrais vous demander d’aller lui dire que s’il continue de m’attaquer, il ne mettra plus jamais les pieds sur un millimètre carré dans le Guémon. Et il quittera définitivement la scène politique en Côte d’Ivoire… », (Cf, Soir Info du 21 mai 2015). On devine tout de suite, à la lumière de ces propos, le niveau des relations entre ces deux personnalités. En clair, avec le limogeage du ministre des Affaires étrangères, la bataille pour le contrôle de l’Ouest entre lui et Blon Blaise, d’un côté, et lui et Méambly, de l’autre, s’annonce très disputée. « Est-ce que ce fameux canari dont parlait Méambly a-t-il été cassé pour que Mabri soit limogé de la sorte du gouvernement à une période aussi importante et cruciale qu’à la veille des législatives 2016 ? », ironise un cadre de l’ouest montagneux.
Source : L’Inter
Légende : Après le limogeage du ministre des Affaires étrangères, la bataille est plus que jamais engagée entre Mabri, Méambly et Blon à l’Ouest
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