Le témoin raconte sa version de la marche sur la RTI
Le témoin du jour, un militant du Rassemblement des républicains (RDR) blessé par balle lors de la marche sur la RTI, a répondu aux questions de la défense ce lundi 28 novembre. Il a été question de l’organisation et le déroulement de cette journée du 16 décembre.
Par Camille Dubruelh
Ce sont des détails précis sur la marche du 16 décembre qu’ont cherché à obtenir les avocats de la défense de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé. Monsieur Ben Soumahoro Vaphings, militant du RDR, a donc donné sa version des faits. Le témoin a ainsi raconté comment, étant président de comité de base du parti, il avait relayé « le mot d’ordre » émanant de la direction du RHDP (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix), deux ou trois jours avant la marche. Alors que les cadres du parti étaient confinés à l’Hôtel du Golf, il aurait reçu ces instructions par téléphone de trois porte-paroles, Messieurs Adjoumani et Guy Kaowé et Madame Anne Ouloto. Ainsi, une fois au courant des directives, itinéraire de la marche notamment, le témoin aurait commencé à « mobiliser » sa base, dans son quartier d’Adjamé Marie Thérèse. »
Le témoin nie toute présence des rebelles
« Saviez-vous que cette marche n’était pas autorisée ? », a demandé alors Andreas O’Shea, l’un des avocats de Laurent Gbagbo. « Elle était autorisée par le président élu démocratiquement », a répliqué le témoin, insistant sur le fait que les Forces de défense et de sécurité étaient « dans l’illégalité ». Interrogé sur le processus de sécurité mis en place autour de la marche, le militant a nié toute présence de rebelles. Selon lui, les « gens qui venaient infiltrer les marches » étaient « des partisans au pouvoir » de Laurent Gbagbo. Rebondissant sur le sujet, le témoin a d’ailleurs expliqué que, de son point de vue, « il n’y avait plus de rébellion » à Abidjan à cette époque. Son explication : Guillaume Soro « avait été nommé Premier ministre » et l’armée était scindée en deux camps, les Forces nouvelles cantonnées au Golf contre les Forces de défense et de sécurité.
Revenant au déroulé de la marche, le militant a indiqué que les protestataires de son quartier s’étaient rassemblés dès sept heures du matin à 220 Logements. L’objectif, selon ses dires, était de rejoindre le siège du RPR rue Lepic avant de marcher sur la RTI. Mais les choses ne se sont visiblement pas passées comme prévu. Ben Soumahoro Vaphings a expliqué qu’il avait perdu le contrôle des marcheurs une fois arrivés au quartier général du parti. Alors que les organisateurs voulaient « attendre le feu vert » des dirigeants du RHDP pour se rendre à la RTI, « la tension est montée », a expliqué le témoin. « Les marcheurs ne nous écoutaient plus, c’était impossible de maîtriser cela », a-t-il admis. Ainsi, « un mouvement de foule » s’est déclenché et les contestataires se seraient alors divisés en deux groupes, empruntant deux itinéraires distincts pour se rendre vers la RTI. L’avocat de Laurent Gbagbo a cuisiné le militant pour savoir s’il y avait eu « provocation » de ces marcheurs. Il a notamment été question du frère du témoin, tué ce jour-là. Encore une fois, Ben Soumahoro Vaphings a nié, admettant quand même qu’il « ne maîtrisait pas tout », la marche rassemblant selon ses dires, 5 à 10 000 personnes.
Crédibilité mise à l’épreuve par la défense
Resté aux abords du siège du RDR, le militant aurait pour sa part vu revenir les protestataires et serait parti se réfugier dans un immeuble en construction. « Ils courraient dans tous les sens et ça tirait dans tous les sens », a-t-il attesté, jurant que les contestataires « n’étaient pas armés ».
La défense de Charles Blé Goudé a ensuite réclamé « des précisions » au témoin, notamment sur les lieux précités et les itinéraires qu’auraient emprunté les marcheurs. Jean-Serge Gbougnon, avocat de l’accusé, s’est appliqué à confronter le témoin à ses précédentes déclarations pour tester sa crédibilité. Ainsi, l’avocat a notamment demandé au témoin dans quel groupe était parti son petit frère, obtenant une réponse différente de celle donnée précédemment au bureau de la procureure. « J’oublie de temps en temps mais l’idée générale reste », s’est justifié le militant.
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