Ben Soumahoro Vaphing, membre du RDR et président du Rassemblement des grins de Côte d’Ivoire se présente comme une « preuve » au procès Gbagbo/Blé Goudé. Le témoin, portant encore une balle dans la cuisse, a expliqué aux juges de la CPI, comment les événements du 16 décembre 2010 avaient « bouleversé sa vie ». Acculé par la défense #Gbagbo, le témoin a nié toute connivence avec la rébellion. Compte rendu.
Un nouveau témoin à la barre, au procès de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, ce jeudi 24 octobre. Il s’agit de Monsieur Ben Soumahoro Vaphings, membre du RDR, blessé par balle lors de la marche sur la RTI du 16 décembre 2010.
Par Camille Dubruelh Source: Ivoirejustice
Une balle dans la cuisse, jamais délogée. Appelé à la barre pour témoigner, Monsieur Ben Soumahoro Vaphings a raconté comment les événements du 16 décembre 2010 avaient « bouleversé sa vie ». Interrogé par le bureau de la procureure sur les conséquences de cette blessure, l’homme n’a pas caché son émotion. « À chaque fois que j’ai des douleurs, j’ai les souvenirs qui me reviennent de la barbarie de cette journée-là », a-t-il raconté. « Je vis avec ça et ça me ronge », a poursuivi le témoin, expliquant avoir perdu son petit frère lors de cette marche.
Le public n’en saura pas plus sur les circonstances de ces drames. L’intégralité du récit du témoin ayant été déposé par écrit et versé au dossier, les parties ne sont pas revenues sur le déroulé des événements. La représentante du bureau de la procureure a seulement présenté quelques documents pour appuyer les dires du témoin, radiographies, certificats médicaux ou encore acte de décès.
Discussion complexe et interventions du juge-président
Très vite, c’est donc la défense de Laurent Gbagbo qui a pris le relai pour interroger Monsieur Ben Soumahoro Vaphings. Andreas O’Shea, l’un des avocats de l’accusé, a voulu en savoir plus sur l’identité du témoin, ses rapports avec le bureau de la procureure ou encore son engagement politique. La discussion a été très complexe, le président de la Chambre ayant dû intervenir à plusieurs reprises pour clarifier les questions ou enjoindre le témoin à répondre. « C’est trop lourd, ça me fatigue », a déploré Monsieur Ben Soumahoro Vaphing.
Sans perdre patience, la défense a longuement questionné le témoin sur son rôle au sein du Rassemblement des républicains (RDR). Monsieur Ben Soumahoro Vaphings a ainsi attesté être membre du parti depuis sa création en 1994. Sa fonction : « président de comité de base ». Au-delà de cet affiliation, le militant est également président du Rassemblement des grins de Côte d’Ivoire. La défense de Laurent Gbagbo en a donc profité pour poser de nombreuses questions sur l’organisation et la fonction de ces grins.
Pas de relations entre rébellion et RDR selon le témoin
Revenant sur la période postélectorale, Andreas O’Shea a ensuite interrogé le témoin sur les rapports entre la formation politique et la rébellion. Mais le militant a fermement nié toute « coopération » avec les rebelles. Il a insisté sur le fait que l’objectif du parti était de « gagner les élections de manière démocratique », non sans provoquer des sourires ironiques de Laurent Gbagbo. À partir de ce moment-là, l’audition a tourné en une tribune politique, malgré les rappels à l’ordre fréquents du président de la Chambre. Le témoin a notamment évoqué la campagne « magnifique » du premier tour des élections et dénoncé le couvre-feu mis en place pour le second tour.
«La démocratie, ce n’est pas ça », a-t-il fustigé, avant d’être interpellé par le juge Cuno Tarfusser qui réclamait «des faits».
Finalement amené à revenir sur le 16 décembre, le témoin a attesté avoir participé à l’organisation de la marche. Il a juré que le seul objectif était de « mobiliser les militants et faire bloc pour dire non à la pensée unique ». Le témoin a assuré que, d’après les consignes qu’il avait reçues à l’époque, le mot d’ordre n’avait jamais été de « prendre la RTI par la force ». Selon ses dires, le but était de « laisser tous les Ivoiriens avoir accès » à cette chaîne publique. L’avocat de la défense n’a pas caché son scepticisme face aux réponses du témoin. Montrant une vidéo de Guillaume Soro qui appelait les troupes rebelles à prendre la RTI, l’avocat a ainsi voulu savoir comment, en ayant un tel engagement politique, le témoin avait pu passer à côté de cette information.
Mesures de protection drastiques pour l’audition d’un « témoin vulnérable »
P 513 va déposer ce mercredi 23 novembre dans le cadre du procès de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Mais comme il s’agit d’un « témoin vulnérable », la Chambre a décidé d’entendre son récit à huis clos. Ce témoignage ne devrait pas durer plus d’une journée.
La décision avait été annoncée dès hier par le président de la Chambre. P513 sera entendu à huis clos. Motif : il s’agit d’une « déposition délicate » par un témoin des faits, un « témoin vulnérable ». Le juge Cuno Tarfusser avait en effet jugé que certains des prochains témoins, dont P513, courent un « risque de retraumatisation s’ils devaient déposer en public ». Eventuellement, des décisions de reclassification de certains passages de la déposition pourront être prises ultérieurement, ce qui signifie que le public aura peut-être accès à ce témoignage plus tard.
Avant que le rideau ne se referme et que ne démarre l’audition du témoin, la Chambre a fourni en public quelques consignes aux parties. Le juge Cuno Tarfusser a ainsi précisé que les interrogatoires ne devront porter que sur « ce jour précis ». « Elle est ici pour parler de ça uniquement », a prévenu le président de la Chambre, informant qu’il interdirait toute question « en dehors de ce cadre ».
Comme tous les prochains témoins de l’accusation amenés à déposer avant la pause du 9 décembre, le témoin va donc évoquer un fait précis. Il s’agit de la marche sur la RTI, le 16 décembre 2010, un événement retenu dans les charges contre les accusés.
P 513 va déposer ce mercredi 23 novembre dans le cadre du procès de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Mais comme il s’agit d’un « témoin vulnérable », la Chambre a décidé d’entendre son récit à huis clos. Ce témoignage ne devrait pas durer plus d’une journée.contre les accusés.
Par Camille Dubruelh
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