Par Michèle Irié
La salle de 200 places d’une église de la ville de Bouaflé (centre-ouest) est bondée. Avec son bébé de 45 jours dans les bras une jeune mère ne cache pas son émotion : ce dimanche elle et son époux viennent présenter leur enfant à la communauté. « Il se prénomme Ebenezer », annoncent-t-ils. Encore un prénom juif comme pour tous leurs précédents.
“Jusqu’ici Dieu nous a secouru“, telle est la signification de ce prénom “découvert dans les pages de l’ancien testament, dans la bible“ affirme le père du nouveau-né.
Ebenezer, Israël, Ephraïm, ou encore kéren, les prénoms juifs, communément appelés “noms bibliques“ en Côte d’Ivoire, sont très en vogue dans le milieu chrétien.
Et ce phénomène ne date pas de la veille à en croire le pasteur Guillaume Goulia, officiant à l’église des Assemblées de Dieu de Vridi (Abidjan sud).
“Les noms bibliques qui sont aussi des prénoms juifs ont toujours été attribués non seulement parce qu’on en connait le sens mais aussi parce que les parents veulent donner une destinée prophétique à leurs enfants“.
L’homme de Dieu affirme par ailleurs que les circonstances de la naissance, ou le contexte orientent le choix de ces prénoms qui marquent souvent “la gratitude à Dieu pour ses bienfaits“.
Selon lui, les parents appelés à convertir leurs enfants à leur religion, donnent ces prénoms qui visent à les influencer dans ce sens“.
Partageant le même avis, docteur Bouaki, sociologue ajoute que “c’est pour rappeler leur foi“ au Dieu d’Israël que les chrétiens donnent des prénoms juifs à leurs enfants.
Arborant une dimension plus spirituelle, Laure Adoulou, mère de “Jael“, espère la voir bénéficier des vibrations positives découlant de ce prénom juif.
“Quand on donne un prénom à quelqu’un, en fonction de l’histoire qui y est liée dans la bible, on souhaite que les ondes que cela dégage imprègnent notre enfant“ avance-t-elle.
Outre cet aspect spirituel, la sonorité des prénoms juifs est aussi à la base de ce choix. En effet Jean-Christian Zahobi considère que l’une des raisons pour lesquelles il a choisi des prénoms juifs (Kyria et Arielle) pour ses filles c’est que “ça sonne exotique“.
Cette dernière raison fait l’unanimité non seulement chez ces croyants, mais aussi chez des parents “non-chrétiens chez qui les prénoms juifs font une percée“ comme l’indique Norbert Aka, un habitant d’Adjamé.
Cependant, ce caractère exotique peut poser problème au niveau de l’administration de l’état civil ivoirien où les “prénoms fantaisistes, anglophones ou lusophones ne sont pas autorisés“ aux dires d’un agent de la mairie de Zuénoula (centre-ouest).
Parfois, les prénoms juifs ne sont pas facilement accepter dans les administrations. Certains parents affirment avoir dû apporter une preuve matérielle du caractère biblique des prénoms qu’ils ont choisis, notamment la photocopie d’une page de la bible où apparaissent ces noms.
“Ce sont les prénoms français que nous reconnaissons en Côte d’Ivoire dans l’établissement des extraits de naissance“ affirme un agent de la mairie de Yopougon, la plus grande commune d’Abidjan. Selon lui, la mairie dispose d’un dictionnaire de noms français à cet effet.
Cette disposition qui ne freine aucunement les chrétiens, relève sans doute des rapports particuliers qui relient la Côte d’Ivoire à la France dont elle est une ancienne colonie.
MIR
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