Camille Dubruelh Source: Ivoirejustice de Radio Pays-Bas Internationale
L’audition de l’ancien chef du camp commando Abobo s’est poursuivie ce jeudi 1er septembre. Barthelémy Obiénéré Ouattara, qui témoigne à visage découvert dans le procès de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé à la Cour pénale internationale, a été longuement interrogé. Parmi les sujets abordés, le renforcement du dispositif sécuritaire à Abobo et la marche sur la RTI.
Par Camille Dubruelh
Deuxième journée de témoignage pour Barthélémy Obiénéré Ouattara. L’ancien chef du camp commando d’ Abobo a répondu pendant plusieurs heures aux questions du substitut de la procureure, Eric McDonald, ce jeudi 1er septembre. Evolution du dispositif de sécurité à Abobo, incidents dans la commune lors de l’élection présidentielle, organisation hiérarchique du camp commando, de nombreux thèmes ont été abordés.
En ce qui concerne la situation sécuritaire dans la commune avant le premier tour du scrutin, « je ne peux pas dire qu’elle était normale car nous étions en guerre depuis 2002, ce qui a poussé nos chefs à mettre en place un plan pour éviter les infiltrations », a expliqué le témoin. Ce dernier a notamment évoqué la mise en place de check points pour rechercher des armes et le déploiement de nouvelles unités de forces de l’ordre en vue du premier tour de l’élection : militaires, police et gendarmerie.
Ce dispositif sécuritaire a été renforcé au fil des semaines, notamment en réponse à des incidents, a indiqué Barthélémy Obiénéré Ouattara. Parmi ces incidents : des attaques de civils contre les forces de l’ordre jugées trop proches de Laurent Gbagbo lors du convoyage des urnes au premier tour, ou la présence d’hommes encagoulés qui tentaient d’empêcher les électeurs d’accéder aux bureaux de vote.
Marche sur la RTI, l’ ancien chef du camp commando d’Abobo fait ses comptes
La discussion s’est ensuite concentrée sur la journée du 16 décembre, la marche des manifestants sur la RTI. Un événement qui figure parmi les quatre retenus dans les charges qui pèsent contre les accusés. Le témoin a donc donné sa version des faits de cette journée, non sans quelques confusions. Il a tout d’abord assuré n’avoir reçu « aucune instruction » en amont quant à cette marche. C’est donc par des coups de téléphone qu’il aurait été informé des débordements en cours.
Tôt dans la matinée, le chef du camp commando Abobo décide donc de partir en ronde pour vérifier ces informations. C’est là qu’il croise des forces de l’ordre tirant des bombes lacrymogènes et arborant des armes lourdes, avant de tomber sur deux policiers blessés. Apprenant qu’il y avait « des mouvements aux alentours du carrefour PK18 », le témoin envoie ensuite une patrouille qui lui rapporte une « confusion totale », un « barrage humain » formé par des militaires pour empêcher les manifestants de passer. Militaires « qui ont riposté aux coups de feu » des manifestants, selon le témoin. « Nous avons la certitude que les premiers coups ont été tirés des civils », s’explique-t-il.
Sur place, Barthélémy Obiénéré Ouattara observe « beaucoup de morts qui jonchaient le sol », une cinquantaine d’hommes âgés d’une trentaine d’années. « J’ai rendu compte de morts de part et d’autres » (manifestants et forces de l’ordre), a-t-il affirmé, mais « sans préciser le nombre ».
Le substitut de la procureure interrompt alors le témoin, pour lui rappeler sa déposition initiale. « De par mes origines, je ne pouvais pas faire leur affaire. Si je disais que j’avais vu une cinquantaine de corps (de manifestants), ils n’allaient pas prendre ça au sérieux. C’est comme si je discréditais les forces de l’ordre ». « Je n’ai pas donné le nombre à cause de mes origines », a attesté ce jeudi le témoin. Il avait plus tôt dans la journée, évoqué le manque de confiance à son égard au sein du camp commando Abobo, du fait de son nom, Ouattara.
Le compte-rendu par notre reporter à la CPI, Camille Dubruelh
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