La défense de Laurent Gbagbo a aujourd’hui posé des questions à Joël Kouadio N’Guessan, le porte-parole du RDR venu témoigner à la CPI dans le cadre du procès de Gbagbo et Blé Goudé. Un interrogatoire qui a repris les propos tenus par le témoin les jours précédents mais qui fut nettement plus tendu.
Le témoin N’Guessan ne veut plus entendre l’expression « rebelles ». Voilà comment la 3ème journée d’audience du témoin P-48 a commencé. Face à Emmanuel Altit, l’avocat de Laurent Gbagbo, N’Guessan affirme que cette expression est péjorative. Il demande à la défense de faire un effort pour ne pas la prononcer. Il fera de même pour le terme de « chef de guerre » qu’il souhaite voir remplacé par « commandant de zone ».
La journée sera rythmée par les réponses parfois offensives du témoin qui n’hésite pas, de temps à autre à donner son avis. Il sera, comme la veille, rappelé à l’ordre à plusieurs reprises.
« Dégager » Gbagbo
Altit l’interroge sur la bataille d’Abidjan. Il lui pose des questions sur le rôle de la France et d’abord sur l’affirmation qu’il avait fait hier selon laquelle « la France, sous mandat onusien, a(vait) reçu pour mission de le (Gbagbo) dégager ». « Comment cette mission a-t-elle été accomplie ? », demande Altit. « L’ONU a demandé à la France de rétablir la légalité constitutionnelle », rétorque le témoin avant d’ajouter : « l’objectif était de détruire les armes dont se servaient les éléments fidèles à Laurent Gbagbo pour pouvoir tirer sur les populations civiles. »
Le témoin est ensuite brièvement interrogé sur ses liens avec la président Laurent Gbagbo. N’Guessan possède en effet un neveu qui s’est marié avec l’une des filles de Gbagbo, Marie-Laurence Gbagbo.
Les sujets s’enchainent et Altit revient sur la marche de 2004, organisée par le « G7 » (un regroupement de partis/mouvements pour demander l’application des accords de Linas-Marcoussis). Altit demande au témoin s’il trouve normal que des mouvements armés ou affiliés à des partis armés aient participé à la marche. Une chose que le témoin dément. « Les Forces Nouvelles à Abidjan n’étaient pas armées », dit-il. Il ajoute que la marche en question n’a jamais pu commencer car « à partir de 6 ou 7h du matin, les hélicoptères avaient déjà tiré (sur les manifestants, ndlr) ».
« On gagne ou on gagne »
Sur les accords de 2003 de Linas-Marcoussis, le témoin est interrogé une nouvelle fois sur le rôle de la France. On apprend notamment que le témoin a dû payer son billet d’avion pour se rendre à Marcoussis mais qu’il s’est fait rembourser via l’ambassade de France. « Je peux imaginer que c’est la France qui a payé les billets d’avion pour tout le monde », dit-il.
Altit demande finalement au témoin de revenir sur sa déclaration selon laquelle le slogan de campagne « on gagne ou on gagne » de Laurent Gbagbo voulait dire « ce que ça veut dire (…) quoi qui se passe on gagnera ». « Avez-vous déjà entendu ça ailleurs ? », demande Altit. Le témoin affirme ne pas se souvenir. La chanson d’Antoinette Allany est alors diffusée . Altit reproche alors au témoin de dire des choses « pas tout à fait exactes » ce à quoi le témoin rétorque : « Je suis là pour parler d’un drame que mon pays a connu, avec des slogans utilisés par des hommes politiques qui ont créé des problèmes ! » Le juge-président Cuno Tarfusser fera lui remarquer que c’est « la 5ème fois » que la Cour entend cette chanson. « On va finir par la connaître par cœur », dit-il amusé.
Finalement c’est Peter O’Shea, l’avocat britannique de Gbagbo, qui conclura cette journée. On peut notamment retenir de ses questions celles portant sur Marcoussis. « Avez-vous entendu que Chirac et de Villepin (l’ancien président français et son ancien Premier ministre, ndlr) ont présenté les accords de Marcoussis à Laurent Gbagbo comme un fait accompli ? » demande l’avocat. Le témoin dit avoir entendu des rumeurs de menaces du Premier ministre français à l’encontre de Gbagbo.
NB: le début de cet article a été modifié car, contrairement à ce que nous avions écrit, la défense de Gbagbo n’avait pas terminé son interrogatoire.
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