Source: Ivoirejustice
Des organisations de défense des droits de l’Homme ont annoncé, lundi dernier, leur refus de participer au procès de Simone Gbagbo. Une façon pour elles d’alerter les autorités sur les dysfonctionnements de la justice ivoirienne.
Après quatre années d’une participation active à la procédure, la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (LIDHO) et le Mouvement ivoirien des droits de l’Homme (MIDH) ont tous décidé de ne pas participer au procès de l’ex-première dame. Les motivations principales de ce retrait annoncé le la veille de l’ouverture du procès ? Leur mise à l’écart de la procédure d’une part et d’autre part des insuffisances liées au fond du dossier pénal.
Une mise à l’écart intentionnelle ?
Une façon de « tirer la sonnette d’alarme » selon Antonin Rabecq, représentant de la FIDH en Côte d’Ivoire, pour qui cette décision, prise « à contrecœur », fut d’autant plus difficile à prendre qu’il considère que « la lutte contre l’impunité doit être mené (…) avec la société civile, comme l’a montré le procès d’Hissène Habré ».
L’objectif, explique-t-il, c’est « que le reste des procédures (environ 150 personnes, ndlr) soit organisé de façon transparente et solide ».
Car pour la FIDH, c’est d’abord le manque de concertation avec les ONG et leur mise au ban qui est le moteur de cette décision. « On a été tenu à l’écart de la procédure et on ne peut pas croire que ce soit seulement de la négligence et de l’inattention de la part de la justice » raconte le représentant de la FIDH. « On n’a pas été notifié de quoique ce soit » déplore-t-il concernant l’accélération du calendrier du procès à l’encontre de Simone Gbagbo. Il estime qu’ainsi, il ne leur a plus été permis d’exercer pleinement leur rôle de conseil des parties civiles. « Ça n’augure rien de bon et ça ne permet pas d’envisager un procès inclusif et convaincant » conclut-il sur ce point.
Absence de logique judicaire
Mais en plus de cette critique, les organisations des droits de l’homme ont aussi mis en évidence leur scepticisme quant au fond de la procédure. Antonin Rabecq souligne entre autres la séparation du cas Simone Gbagbo des autres accusés. Car en effet, si l’ex-première dame ait apparue avec d’autres accusés, son procès ne concerne bien qu’elle et elle seule. Une séparation des affaires que la FIDH juge inopportune.
« Simone Gbagbo a participé à une cellule de crise mise en place pour donner des consignes à la fois aux militaires mais aussi aux milices patriotiques (..) mais parmi les gens de cette cellule de crise, certains sont inculpés ou se trouvent à Abidjan » explique Rabecq. Il poursuit : « du coup, juger Simone Gbagbo toute seule c’est un peu aller à l’encontre de la logique judicaire qui voudrait que les complices qui ont participé à l’élaboration de la commission de ces crimes soient jugés ensemble (…) ça aurait dû être un grand moment judiciaire. Avec les principaux responsables, ça aurait eu du sens. »
Pour la défense, confirmation d’une « instruction bâclée »
Dans ces conditions, la FIDH considère difficile de pouvoir juger Simone Gbagbo « de façon satisfaisante ». Des déclarations et un retrait qui confortent l’avocat de l’ancienne première dame, Ange Rodrigue Dadjé : « Leur retrait me conforte dans le fait que l’instruction avait été complètement bâclée (…) la manifestation de la vérité et le respect des victimes n’était pas la préoccupation de la justice mais plutôt rendre un service politique au pouvoir ivoirien. »
Les propos du représentant de la FIDH et de l’avocat de Simone Gbagbo ont été recueillis par téléphone et messagerie instantanée par l’équipe d’Ivoire Justice.
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