LIDER News | 10 avril 2015
L’homme qui, jusqu’à la réélection truquée de Ouattara en octobre 2015, était le directeur général des impôts et s’était investi corps et âme depuis 2014 dans la promotion de l’appel Daoukro (candidature unique), et qui est maintenant ministre de la fonction publique, soutient publiquement que payer la dette éloignera son gouvernement de son soi-disant objectif d’émergence à l’horizon 2020, dans trois ans et demi (!).
Cette doctrine Abinan consiste à multiplier les impôts pour plaire au président de la République, puis à les dépenser pour payer la dette extérieure et des infrastructures surfacturées, pour enfin déclarer l’insolvabilité de l’Etat lorsqu’il s’agit de régler les arriérés de salaires des enseignants, arguant que les sommes dues sont trop anciennes et trop volumineuses (430 milliards de fcfa, selon lui).
Cette assertion du ministre ne signifie qu’une seule chose : Les arriérés de dettes «datant de Mathusalem» ne doivent pas être purgés, mais simplement répudiés. Reste à savoir si l’Etat va accepter d’appliquer ladite doctrine quand les contribuables refuseront de payer leurs arriérés trop anciens et trop volumineux pour leurs portefeuilles.
Les stocks anciens de dettes avant l’arrivée de Ouattara étaient de plus de 6.373,9 milliards de francs cfa. La communauté financière internationale lui a accordé une annulation exceptionnelle de plus de 4.090 milliards de fcfa en 2012. Ouattara a ensuite fait un audit de la dette intérieure, pour refuser d’en payer une bonne partie après une restructuration dont il reste le seul maître. Le paiement de la dette intérieure est relativement peu honoré, comparé à la dette extérieure, qui, elle, est réglée rubis sur l’ongle. Le stock de la dette intérieure en fin 2010 s’élevait à 2.009 milliards fcfa, dont 507 pour le secteur bancaire. Si la dette ancienne et volumineuse se définit comme celle d’avant l’arrivée de Ouattara au pouvoir, ce dernier pourrait-il répudier ces 507 milliards fcfa que l’Etat doit aux banques en Côte d’Ivoire ou se contente-t-il de le faire pour les dettes intérieures de 1.502 milliards fcfa non liées au secteur bancaire (pme-pmi, arriérés de salaires des fonctionnaires etc.) ?
Depuis lors, Ouattara a continué à s’endetter auprès du marché local et international à des taux de 5% à près de 7%, au moment où le même marché international des eurobonds, dopé par le quantitative easing, proposait des taux nuls ou négatifs. Ainsi, le stock de la dette extérieure au 31 décembre 2015 est de 4.303,4 milliards fcfa, tandis que celui de la dette intérieure à la même date est de 3.489,4 milliards fcfa, soit un total d’endettement de 7.792,8 milliards de fcfa. La dette extérieure se répartit entre les créanciers privés à hauteur de 2.547,3 milliards fcfa, les bilatéraux pour 749,9 milliards fcfa et les multilatéraux pour 1.007,9 milliards fcfa.
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Ce que le ministre de la fonction publique dit doit être lu à côté de ce que le ministre de budget [photo] a écrit sur sa page Facebook pour formuler ses vœux de bonheur du week-end. L’Etat serait-il proche de la cessation de paiement, et pour calmer les inquiétudes, créerait des projets de dépenses à l’université (qui induiraient une nouvelle passation de marchés pour des travaux dont on peut anticiper qu’ils seront comme d’habitude surfacturés) et programmerait dans la foulée la répudiation de la dette intérieure ? En effet, comment répudier les dettes salariales sans toucher au reste de la dette intérieure ?
L’on se souvient que le Prof. Mamadou Koulibaly, alors ministre de l’économie et des finances sous la transition, avait fait le choix de privilégier le paiement de la dette intérieure en cessant de payer les créanciers extérieurs. Il lui semblait en effet plus important de s’assurer que les créances de la population et des entrepreneurs locaux soient honorées. Ce n’est cependant pas de sitôt que Ouattara, père des fort nuisibles plans d’ajustement structurel ayant mis les économies africaines à genoux dans les années 80/90, osera refuser de payer la dette extérieure qui finance largement le budget de l’Etat, qu’il augmente de façon dithyrambique d’année en année. Que lui importe les arriérés de salaires des enseignants, les augmentations de taxes et d’impôts, le délabrement des infrastructures de santé et d’éducation, l’explosion du coût de la vie. Il construit des ponts et cela doit bien suffire au bonheur des populations.
Vous vouliez l’émergence ? Eh bien ! Dansez maintenant.
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