PRAO Yao Séraphin
« Le mensonge en a trop longtemps imposé aux hommes il est temps qu’on connaisse le peu de vérités qu’on peut démêler à travers ces nuages de fables qui couvrent l’histoire »
(Voltaire)
Il y a plus de cinquante ans, s’ouvraient, toutes neuves comme celles d’un cahier d’écolier plein de ferveur et d’espoir au moment de la rentrée, les pages de l’Histoire de la Côte d’Ivoire indépendante, encore mal assurée de son avenir mais fermement décidée à assumer, à conquérir, à préserver son indépendance, son unité et son identité conquises après bien des luttes, des sacrifices et des souffrances. En moins de deux décennies, notre pays a connu ses plis belles années de croissance. La production intérieure brute qui était de 130 milliards de FCFA en 1960 atteint 1900 milliards de FCFA en 1979. Le taux de croissance moyen sur cette période avoisinait les 7% l’an. Il est remarquable de noter que cette stabilité économique est certes la résultante de choix judicieux en matière économique mais surtout due à la stabilité politique et la cohésion sociale.
Mais cette stabilité politique et la cohésion sociale ont volé en éclat avec le positionnement des Hommes politiques dans la classe politique. En effet, la recherche effrénée de la démocratie et surtout la lutte egocentrique pour le pouvoir ont conduit notre pays dans un verglas politique. Les crises successives ont entamé notre vivre ensemble et désarçonné l’équilibre politico-social du pays. Nous restons naïfs et amorphes alors que les prédateurs s’abattent sur notre pays en décomposition. Ces prédateurs profitent, non seulement de l’absence de notre engagement patriotique décisif en faveur d’une paix définitive, fondée sur des valeurs démocratiques et de l’Etat de droit. Mais aussi et surtout, ils profitent de l’attitude de compromission et de division politicienne des protagonistes ivoiriens.
Aujourd’hui, la bouée de sauvetage reste la réconciliation des fils et filles de ce pays. Ce qu’il faut à la Côte d’Ivoire, c’est un dialogue inter-ivoirien. Les différents protagonistes doivent être capables d’amorcer un processus de renaissance politique salutaire. Pour ce faire, les parties en belligérance doivent se retrouver et se parler pour mettre définitivement fin aux querelles inutiles qui retardent le développement de notre pays. Pour nous, ce dialogue doit impérativement avoir lieu à l’intérieur des frontières de la République, et constituer le symbole, l’empreinte, l’expression de la réconciliation nationale. Cela suppose que Laurent Gbagbo soit libéré pour participer à ce dialogue politique. Le pays ne sera jamais uni aussi longtemps que Laurent Gbagbo sera à la Haye. La majorité des Ivoiriens considère que le fils du pays est injustement retiré de la vie politique ivoirienne pour que certains dirigent dans la tranquillité. La Côte d’Ivoire profonde n’approuve pas cette façon de traiter l’ex-président comme un vulgaire personnage. Laurent Gbagbo a toujours œuvré pour que les acteurs politiques se retrouvent pour aplanir les contradictions. On se souvient que Bédié avait lancé un mandat d’arrêt contre Ouattara en 1999 pour l’écarter du jeu politique. Quant à Bédié lui-même, le coup d’Etat de 1999 l’avait également éloigné du pays pendant deux années. Et c’est sous Laurent Gbagbo que ces deux acteurs rentrent au pays pour la réconciliation des GRANDS.
Laurent Gbagbo n’a pas cherché à châtier ses adversaires politiques. Au contraire, à la faveur du forum de réconciliation, Bédié et Ouattara sont rentrés de leur exil parisien pour participer à cette messe de la paix. Les ennemis d’Hier devenus des frères au sein du RHDP ont la rancune tenace car ils ont décidé de punir Laurent Gbagbo.
Ouattara et Bédié font déporter Laurent Gbagbo à la Haye. Si Bédié et Ouattara ont bénéficié des largesses de Laurent Gbagbo au nom de la paix, ils n’ont pas hésité à comploter pour que Laurent Gbagbo soit déporté à la Haye. Pourquoi des Ivoiriens peuvent agir de la sorte ? Le cas de Laurent Gbagbo est non seulement une injure à l’intelligence des Africains mais surtout un profond malaise. Une partie de la Côte d’Ivoire se sent en exil avec Laurent Gbagbo. Comment penser que la réconciliation sera possible sans Laurent Gbagbo ? Même si on accepte l’idée que Laurent Gbagbo a eu 47% des voix à l’élection présidentielle de 2010, c’est reconnaitre que c’est 47% des Ivoiriens qui sont en marge de la république. Pour les 47% de ces Ivoiriens-là, la vie s’est arrêtée depuis que Laurent Gbagbo est à La Haye. Aujourd’hui, les Ivoiriens sont en exil partout dans le monde. La Côte d’Ivoire ne peut pas avancer sans tous ces talents.
Dans un pays aussi divisé, il reste à nous interroger sur ce que nous réserve l’avenir. Notre réponse est qu’il sera ce que nous le ferons, en évitant les erreurs passées et en nous attachant avec détermination et amour à aller à la paix, au pardon et à la réconciliation sincère. Notre pays a besoin, pour son développement de tous ses enfants. Chacun de nous possède un trésor qui lui a été légué par ses ancêtres. Il doit le préserver mais pas comme un avare qui le dissimule. Le talent de chaque ivoirien doit profiter au pays c’est pourquoi nous devons œuvrer au rassemblement de toutes les filles et fils de ce pays. Il nous faut revenir aux enseignements du père fondateur afin d’exploiter l’héritage qu’il nous a légué. Notre intime conviction est que les Ivoiriens doivent revenir à leur premier amour. Dans la situation actuelle de notre pays, la libération de Laurent Gbagbo constitue la seule clé qui ouvre les portes de la réconciliation.
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