Compaoré doit être livré à la justiceb Burkinabè
Pour une raison ou une autre, un Gabonais peut prendre la nationalité française; un Ivoirien, la nationalité britannique; un Ghanéen, la nationalité allemande; un Italien, la nationalité autrichienne, etc. Que Compaoré veuille prendre la nationalité ivoirienne n’est donc pas un problème. Là où il y a problème, c’est, d’une part, comment l’ancien dictateur veut acquérir cette nationalité et, d’autre part, ce qui le pousse à vouloir devenir ivoirien.
Commençons par rappeler la loi portant code de nationalité ivoirienne. L’article 12 nouveau de cette loi déclare ceci: “Conformément aux dispositions des articles 13, 14 et 40, la femme de nationalité étrangère qui épouse un Ivoirien acquiert la nationalité ivoirienne si elle en fait solennellement l’option au moment de la célébration du mariage. Les mêmes dispositions s’appliquent à l’homme de nationalité étrangère qui épouse une Ivoirienne.” (Décision n 2005-09/PR du 29/08/2005). Quand le Burkinabè Blaise Compaoré s’unissait à l’Ivoirienne Chantal Terrasson (il y a plusieurs années, j’imagine, car leur mariage ne peut avoir été célébré en 2014 ou en 2015), avait-il choisi la nationalité ivoirienne? Il semble que non. Sinon, les médias ne nous auraient pas appris que Dramane Ouattara cherche à lui octroyer la nationalité ivoirienne. Par conséquent, le fait que Compaoré attende 2016 pour demander la nationalité ivoirienne alors qu’il a eu la possibilité de le faire au moment de son mariage avec Terrasson est contraire à la loi. Pour le dire autrement, si Dramane fait de son compatriote Compaoré un citoyen ivoirien, l’un et l’autre sont dans le faux et le premier l’aura fait en violation de la loi ivoirienne. Malheureusement, ce ne sera pas la première violation de nos lois par Dramane. L’homme en a l’habitude tout comme il s’est spécialisé dans le faux, le mensonge et la tricherie. Compaoré, lui aussi, est un habitué de la violation des lois. Mais mal lui en prit en 2014 car le peuple burkinabè n’hésita pas à se dresser contre lui pour faire échec à sa honteuse tentative de modifier l’article 37 de la loi fondamentale. Nous, peuple ivoirien, devrions faire de même (nous lever ensemble et occuper la rue jusqu’à ce que nous obtenions gain de cause) au lieu de confier notre sort à Dieu qui, en réalité, a toujours voulu que les hommes prennent leurs responsabilités, c’est-à-dire, après avoir prié, qu’ils s’engagent, mettent les mains dans le cambouis, pour se libérer de l’oppression, de l’exploitation ou de la domination. Mais, si le peuple se comporte de la sorte (ne compter que sur Dieu), c’est peut-être parce qu’il s’apercoit de jour en jour que bon nombre de serviteurs de Dieu sont préoccupés, non par le désir de rendre témoignage à la vérité et à la justice, mais par l’argent (sale) et d’autres avantages matériels éphémères que peut leur fournir un régime sanguinaire et dictatorial. Or, quand les guides religieux sont guidés par les espèces sonnantes et trébuchantes du tyran plutôt que par les valeurs prônées et vécues naguère par le Christ, c’est la porte ouverte à toutes sortes d’abus et de dérives comme l’expulsion par Jean-Pierre Kutwã, le 9 janvier 2016, du Père Julien Sess. Celui-ci est accusé de troubles à l’ordre public. Qu’en est-il vraiment?
Avec Mgr Pierre-Marie Coty, ancien évêque catholique de Daloa, le P. Sess accompagnait spirituellement le Mouvement Marie mère de la charité chrétienne qui se réunit à La Riviera-Palmeraie. C’est là que Chantal Magbi, une Belge convertie à la foi chrétienne en 2005, partage avec la foule les messages qu’elle dit recevoir de la Vierge Marie. Des messages qui n’appellent pas seulement à rejeter le mal et à faire le bien mais annoncent que le moment est venu où Jésus va libérer l’Afrique du néocolonialisme, de la sorcellerie et des criminelles sectes ésotériques (Rose-Croix et Franc-Maçonnerie). Que les nouveaux colonialistes et leurs valets africains refusent d’entendre parler de la libération du continent africain, je peux le comprendre. Car, sans les ressources naturelles de l’Afrique et l’argent des Africains détenu illégalement par le Trésor français, un pays comme la France deviendrait plus pauvre que le Portugal ou la Grèce. Mais peut-on à la fois faire partie d’une conférence épiscopale qui soutient qu’on ne peut avoir un pied dans l’Église et un autre pied dans la Franc-Maçonnerie/la Rose-Croix et persécuter un prêtre qui n’a fait que répercuter un message de la mère de Jésus sur des gens qui nient la divinité du Christ? Peut-on en même temps confesser/professer que Jésus-Christ seul est Seigneur et faire allégeance à de pauvres mortels qui sont des Franc-Maçons notoires? Julien Sess n’a commis aucun crime qui méritât son expulsion de la Côte d’Ivoire. Il est faux de le qualifier de fauteur de troubles. La vérité est que non seulement les messages du Mouvement Mère de la charité chrétienne dérangent ceux qui sont au pouvoir mais c’est l’un des rares mouvements catholiques que le régime n’a pas (encore) réussi à infiltrer. Le P. J. Sess échappant au contrôle du pouvoir, celui-ci a pensé qu’il devait l’expulser pour être tranquille. L’archevêque d’Abidjan n’a fait qu’exécuter une décision du pouvoir, ce qui signifie que l’archidiocèse d’Abidjan est aujourd’hui sous la coupe de Dramane Ouattara. Bernard Yago, qui a tenu plusieurs fois tête à Houphouët, doit se retourner dans sa tombe. En 1996, une heure avant mon ordination diaconale, le cardinal Christian Tumi, ancien archevêque de Douala, m’avait confié qu’un de ses prêtres lui avait avoué, avant sa mort, son appartenance à la Rose-Croix. Chez nous, pourquoi certains pasteurs, prêtres, évêques ou imams ne dénoncent-ils pas les crimes de Dramane Ouattara? Est-ce parce que quelque chose les lie aux cercles ésotériques? C’est le temps qui nous le dira car tout finit par se savoir.
Je referme la parenthèse sur l’injuste expulsion de Julien Sess qui soutint en février 2013, à Berkeley (Californie), une brillante thèse en Théologie dogmatique (il me fit l’honneur de siéger dans le jury chargé de se prononcer sur son travail) et je reviens à mes moutons avec cette question: Pourquoi Compaoré est-il subitement intéressé par la nationalité ivoirienne? Parce qu’il veut éviter de retourner au Burkina où il doit répondre de crimes économiques et de crimes contre l’humanité. Le criminel Compaoré n’a pas vocation à se cacher dans notre pays. Les leaders de l’opposition doivent exiger et obtenir l’extradition de Compaoré car on ne fait pas la politiquement uniquement quand on a besoin des voix des électeurs. Ouattara, qui disait être contre l’impunité et n’hésita pas à envoyer Laurent Gbagbo et Blé Goudé à la Haye alors que les vrais criminels se pavanent à Abidjan, s’il est cohérent et s’il a du respect pour le Burkina, doit livrer, à la justice burkinabè, les criminels Soro et Compaoré en attendant que lui-même soit arrêté et jugé un jour par la justice ivoirienne. Car, tôt ou tard, il devra nous expliquer pourquoi il a fait du faux avant de faire massacrer les Ivoiriens.
Jean-Claude Djereke
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