Par Patrice Allégbé
Les perspectives macroéconomiques de la Côte d’Ivoire « pour 2015-2017 sont positives, compte tenu de l’anticipation d’un taux de croissance vigoureux et d’un faible taux d’inflation » de l’ordre de « 2 à 2,5% en moyenne annuelle » sur cette période, selon le président du Comité normes et méthodes de l’agence de notation WARA, Anouar Hassoune, dans un entretien à ALERTE INFO.
Quelle analyse faites-vous de l’environnement macro-économique de la Côte d’Ivoire ?
La Côte d’Ivoire dispose d’un énorme potentiel économique. C’est la deuxième économie d’Afrique de l’Ouest et elle fait partie des grands exportateurs de cacao et de café, l’économie est en voie de diversification souhaitable, et les avantages compétitifs s’étendent à d’autres spéculations.
La performance économique du pays en 2014 est robuste, avec un taux de croissance réelle de 7,7%. Les perspectives macroéconomiques pour 2015-2017 sont positives, compte tenu de l’anticipation d’un taux de croissance vigoureux et d’un faible taux d’inflation (2 à 2,5% en moyenne annuelle sur la période).
La croissance économique en Côte d’Ivoire à moyen terme sera d’abord alimentée par la dépense publique, la confiance des investisseurs, notamment étrangers. Le secteur du cacao et l’industrie pétrolière, couplés aux aides internationales et aux abandons de créances, devraient chacun apporter leur contribution, ce qui devrait enclencher un effet multiplicateur capable d’amplifier le phénomène de croissance.
La poursuite du rattrapage économique, l’accélération des réformes structurelles et le maintien de la stabilité politique actuelle sont nécessaires à la transition de l’économie ivoirienne vers une économie émergente et à l’amélioration des conditions de vie des populations vulnérables.
En effet, un Ivoirien sur deux vit en-dessous du seuil de pauvreté et les inégalités de revenus sont élevées. Cela dit, l’économie ivoirienne est naturellement sensible aux fluctuations des prix internationaux des matières premières et, dans une moindre mesure, aux conditions climatiques.
Sur le plan sanitaire, la récente épidémie du virus Ebola n’a eu aucun impact notable sur l’économie. Une surveillance des risques sanitaires dans la zone s’impose-t-elle de manière régulière, tout comme l’accélération d’un certain nombre de réformes institutionnelles et d’accords politiques nécessaires susceptibles de ne pas créer des sources d’inquiétudes à mi-mandat de l’actuel président.
Comment jugez-vous le climat des Affaires en côte d’ivoire et qu’est-ce qui selon vous grippe le système ?
La Côte d’Ivoire figure parmi les dix pays les plus réformateurs au monde. Le secteur privé a également une place prépondérante dans le climat des affaires du pays. Mais d’imposants efforts sont à faire au plan de la justice, de l’administration, de la fiscalité en particulier, et des infrastructures industrielles.
WARA entend par là, justice comme institution et justice sociale. Beaucoup d’Ivoiriens pensent qu’il ne suffit pas d’être compétent, de vouloir réussir, pour y arriver. Le mérite seul n’est pas le moteur de l’ascension sociale. L’indépendance et l’efficacité de la justice posent aussi vraiment des soucis. Beaucoup pensent que l’’intensité et l’étendue de la corruption ne peuvent plus se maintenir à ce rythme sans éroder très sensiblement tous les efforts louables faits par ailleurs.
En outre, l’administration qui se modernise et s’étend à l’ensemble du pays doit accélérer son rythme, éviter les goulots d’étranglements, favoriser la lutte contre la fraude héritée des périodes d’instabilité, et ne pas harceler continuellement les industries, qui dans un environnement prometteur pourraient investir et créer de l’emploi.
Malheureusement, nous nous rendons compte que même si elles investissent, l’effet conjugué de la fraude et de l’augmentation de certains facteurs les empêchent de créer de l’emploi. Enfin, il est impérieux de favoriser en Côte d’Ivoire l’émergence d’un tissu de PME (Petites et moyennes entreprises), susceptible de résorber l’immense majorité des jeunes désœuvrés.
En général, les notes financières sont attribuées à de grandes entreprises ou à des institutions, quelles en sont les conditions et est-ce possible qu’une PMI/PME soit notée ?
Toute entreprise ou institution peut se faire noter et il est bon de rappeler que la notation financière est désormais une obligation pour toutes les sociétés cotées à la bourse régionale. Les PME ne sont donc pas exclues et gagneraient à se faire noter car la notation financière peut améliorer la situation de celles qui n’accèdent pas facilement au crédit, en raison de l’absence de garanties.
Toute structure qui fait appel à du financement, a besoin de se faire évaluer selon les critères et standards de son secteur. Pays, institutions, fonds, collectivités territoriales, banques de développement etc… Les PME-PMI n’y échappent donc pas.
La notation financière atténue le problème de l’asymétrie d’information, en communiquant au marché et aux investisseurs des informations fiables. L’enjeu de la notation financière est d’accéder à une information fiable, retraitée, filtrée par un processus analytique et qui puisse faire sens.
Certains préalables doivent être remplies, l’urgence pour les PME de croissance en Côte d’Ivoire est davantage de se formaliser, d’avoir recours à des experts comptables agréés, et de s’astreindre à une discipline de gestion susceptible de leur ouvrir des portes et de grandir. Beaucoup d’entre elles ont des faiblesses en fonds propres, et nécessitent l’arrivée de fonds de capital investissement.
Nous avons été sollicité par certaines d’entre elles, mais elles se sont vite rendues compte qu’il y avait un chemin préalable à faire pour y arriver. Il ne faut pas venir voir l’agence de notation quand on a un besoin plus ou moins urgent de trésorerie, il faut y venir lorsqu’on est prêt à faire un bond qualitatif et quantitatif vers la taille, de grandir, d’investir.
Alerte info/Connectionivoirienne.net
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