Depuis que le groupe islamiste malien Ançar Dine a ouvertement menacé de frapper la Côte d’Ivoire, il y a comme un lever de bouclier sur cette affaire que l’on avait coutume de suivre à travers les médias, loin de chez nous. Que ce soit le gouvernement, que ce soit la presse ou le citoyen ordinaire, tout le monde en parle sans la moindre prudence. La Côte d’Ivoire qui a connu une rébellion et les Ivoiriens qui ont déjà entendu toute sorte de bruit d’armes ne réalisent pas encore la gravité de cet autre danger qui plane. On amuse la galerie comme s’il s’agissait d’une partie de théâtre ou d’une comédie musicale.
Le gouvernement, premier responsable de la sécurité des Ivoiriens et garant de l’intégrité du territoire a du mal à maîtriser sa propre communication sur le sujet en soufflant le chaud et le froid. Tantôt il vante la puissance des troupes envoyées aux frontières avec le Mali, tantôt c’est lui qui minimise la menace en indiquant que celle-ci n’est pas réelle. Ce qu’on oublie ici, c’est qu’il ne s’agit pas d’une guerre conventionnelle dans laquelle l’ennemi est visible et donc cernable. Les stratèges militaires parlent de guerre asymétrique. L’ennemi ici est nulle part et partout en même temps. Il est dans la marée humaine, il est dans les endroits insoupçonnés comme il peut agir à distance. C’est ainsi dans les pays où cette guerre fait des ravages et les armées même les plus puissantes du monde ne parviennent toujours pas à vaincre le terrorisme, le vrai but de cette forme de guerre.
Au Nigeria, le simple fait pour le nouveau président Buari d’avoir fait campagne sur l’éradication de Boko Haram lui vaut à son tour d’être défié par la secte islamiste qui multiplie les attentats dans le nord du puissant Nigeria. Comme pour s’affirmer et finir par effriter le capital-confiance que le peuple nigérian avait placé en son président en le choisissant face à Goodluck Jonathan qui n’a rien pu face à Boko Haram.
Chez nous on aime faire tout dans la propagande là où il aurait fallu plus d’actions dans la discrétion. Ceux qui appellent à la prudence et à la modération face à ce phénomène sont vus comme des traitres, des non-patriotes. Et comme si cela ne suffisait pas, la presse s’en mêle comme à son habitude en donnant dans le sensationnel avec des titres du genre « des dozos ont arrêté des djihadistes », « Les combats font rage à la frontière ivoiro-malienne, 7 djihadistes tués » etc. On n’est pas conscient du danger et on s’attire le danger insidieusement. On ne se dit même pas qu’il y avait des dozos (chasseurs traditionnels) au Mali et ils n’ont rien pu en 2012 face à la percée des islamistes au nord.
En Côte d’Ivoire le temps est venu de cesser cette communication néfaste si nous ne voulons pas en payer le prix. Regardons les ravages de l’Etat islamique au Moyen-Orient et sachons raison garder face au péril djihadiste qui nous guette.
SD à Abidjan
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