Meeting de la Cnc à Yopougon – Retour sur les discours caractéristiques de la diversité des leaders de la coalition
Enfin ! Comme le rappelait KKB à la tribune, quatre ans après l’avènement d’Alassane Ouattara, l’opposition significative a pu tenir son premier vrai meeting sur la place publique de Ficgayo, le samedi 20 juin, sans être violentée. Un rassemblement qui a réuni entre 3 mille et 5 mille personnes qui ont grandement ouvert les oreilles pour écouter, une fois n’est pas coutume, leurs leaders. Ces derniers ont été applaudis par leurs militants quand il le faut et chahutés par moment quand ils ne tenaient pas le discours qu’ils voulaient entendre. Sous le soleil de plomb comme sous la menace de la pluie, ils sont restés jusqu’au dernier intervenant Charles Konan Banny.
Les discours entendus ce samedi-là sont allés dans tous les sens. Les uns pour expliquer le bien-fondé de la Cnc, les autres vertement offensifs, diplomatiques et pédagogiques. C’est clair, les leaders de la Cnc, à l’image de leur diversité et de leur différence idéologique n’ont pas encore un discours unique. Mais mieux qu’un handicap, ceci augure de la démocratie interne qui se nourrit de contradictions et d’idées diverses pour faire avancer le combat, nous explique un cadre de la Cnc, interrogé sur les lieux.
Tour à tour, Samba David avec sa légende du piège et de la souris, Soko Waza du Cpdl, Bah Enoch, Rose Koné du Mouvement des verts, ont expliqué à l’auditoire pourquoi la Cnc a été créée et pourquoi elle incarne l’alternative pour la nouvelle Côte d’Ivoire.
Akoun rassure le pouvoir
À son tour, Laurent Akoun du Fpi dont le discours était attendu, a choisi de rassurer le gouvernement Ouattara sur la volonté de la Cnc à s’écarter des voies de la violence dans sa lutte tout en restant attaché au respect des lois de la République. « Qui est violent ? » a-t-il interrogé dès l’entame. Puis de poursuivre en remerciant les forces de sécurité ivoiriennes et onusiennes qui ont été témoin de cette non-violence. Il poursuit : « Pourquoi nous empêche-t-on de parler ? (…) Notre hymne nous dit de bâtir le pays de la vraie fraternité. Mais comment bâtir cette fraternité si on emprisonne à tour de bras ? Oh ! Honte ! Pour bâtir la vraie fraternité il nous faut la paix. Et cette paix commence par le respect de la constitution, le respect de toutes les lois de la République et de tous les règlements. Alors asseyons-nous et discutons ».
Koulibaly appelle à plus de mobilisation pour faire bouger Ouattara
Mamadou Koulibaly qui a succédé à Laurent Akoun s’est voulu pédagogique et pragmatique face aux militants. Pour lui, la Cnc doit incarner l’espoir en recrutant au-delà de la base traditionnelle de ses composantes. Pour lui, il faut aller attaquer Ouattara sur ses bases, alors seulement, la Cnc peut être une force capable de faire reculer Alassane Ouattara et l’amener à discuter. « La deuxième chose à vaincre, c’est la peur et l’objectif de la Cnc c’est de dire ‘’arrêtez d’avoir peur’’. (…) Nous montons par étapes successives. Nous n’avons pas de moyens pour monter une rébellion, nous n’avons pas d’armes. Notre seul moyen, c’est la loi, c’est le droit. Il faut que nous arrivions à montrer à Ouattara qu’en Côte d’Ivoire on peut faire la démocratie sans un seul fusil », explique-t-il. Dans la suite, il ajoute : « le rassemblement qui est ici n’est pas encore assez fort pour faire peur à Ouattara. Il y a Sangaré, il y a Banny, il y a le Pdci mais nous sommes encore loin du compte, très loin même. Il nous faut aller attaquer Ouattara sur ses propres bases. Il a toujours pensé que des gens lui sont dédiés comme des moutons. Il nous faut encore beaucoup d’Ivoiriens, tous les indécis et les déçus pro-Ouattara. Si la Cnc veut devenir encore plus forte, ayons un langage adapté, ayons un langage de séduction envers ces personnes. Sinon, ils vont dire, Ouattara est mauvais mais on choisit quoi ? Nous leur répondrons, voilà ce que nous vous présentons. Si le Rdr est avec nous, si le Pdci est avec nous alors nous irons place de la République ».
KKB dénonce le bilan de Ouattara
Mamadou Koulibaly sera contredit par KKB au sujet de la mobilisation. Pour « l’irréductible » du Pdci qui s’en félicite du reste, la mobilisation est une réussite et avec elle, la Côte d’Ivoire reste un peuple debout. De tous les intervenants, c’est le candidat déclaré KKB qui s’est attaqué au bilan de Ouattara qu’il a jugé négatif à tout point de vue. Pour KKB, Ouattara ne fait qu’inaugurer les œuvres de ses prédécesseurs. A part cela dit-il, Ouattara n’a rien apporté à la Côte d’Ivoire. « N’eut été la chienlit et le coup d’état qualifié de révolution des œillères, on aurait emprunté les ponts depuis 2001 », critique-t-il le chef de l’Etat qu’il a tout de même félicité en introduction de son propos pour avoir permis ‘’enfin’’ ce meeting. Pour le député de Port-Bouët, si Alassane Ouattara avait un bilan satisfaisant, il n’aurait pas débauché autant d’énergie pour être l’unique candidat du Rhdp par la contrainte. Pour finir, KKB a appelé les nouveaux majeurs à aller se faire enrôler et de ne pas laisser les supporters du pouvoir le faire seuls.
L’appel au rassemblement de Banny
Charles Konan Banny a axé son discours sur le thème du rassemblement. Il a invité les Ivoiriens à conjurer le mal et à épouser les vertus du rassemblement autour de la Côte d’Ivoire. « Faisons le serment que nous ne serons jamais divisés par qui que ce soit », a-t-il lancé aux jeunes, se disant favorable à la libération de Laurent Gbagbo. « Il faut que nous agissions pour que Gbagbo soit libre afin que sous la case nous disions qui a fait quoi. Il faut qu’il soit libre. (…) Tous ceux qui divisent doivent savoir que cela n’est plus possible », a fait savoir Banny sous les ovations du public.
Kablan Brou et l’animisme
Le candidat déclaré issu du Pdci, Jérôme Kablan Brou aura créé la surprise en faisant « un peu d’animisme », selon ses propres termes. Muni d’une bouteille de Gin, l’enseignant a invoqué les mannes des ancêtres à commencer par celles des Ebrié, dont la terre a accueilli le meeting. Dans sa libation, il a fait un tour d’horizon de toutes les tribus ou personnes qui sont tombées dans l’histoire de la construction nationale. Le peuple du Sanwi, le Guébié, les peuples de l’ouest à qui, dit-il, on a arraché leurs terres, pour parler de la récente crise dans cette partie du pays. Également, fut invoqué Djéni Kobénan qui selon l’orateur, a créé le Rdr pour servir les intérêts de la Côte d’Ivoire avant que ce parti, toujours selon lui ne serve aujourd’hui les intérêts d’une « omerta qui nous est jetée ». Plus surprenant encore lorsqu’il invoque l’esprit de Siriki Bakayoko, tuteur de Dramane Ouattara (père de l’actuel chef de l’Etat) ou encore l’esprit de Gaoussou Ouattara, frère aîné du chef de l’Etat. Selon Kablan Brou, dans ses documents d’état civil, Alassane Ouattara serait né avant son grand frère, comme pour stigmatiser le faux qui entoure l’histoire d’Alassane Ouattara.
SD à Abidjan
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