A Abobo les ex-combattants qui squattaient la résidence universitaire ont été délogés. Maintenant il ne reste plus que la réhabilitation des locaux à programmer, l’expérience passée nous ayant enseigné que ces locataires n’étaient pas des plus soigneux. Mais ceci est une autre histoire, et le budget est encore à trouver…
Les ex-combattants ont-ils été indemnisés? L’histoire à nouveau ne nous le dit pas, mais ceux qui étaient délocalisés à l’École forestière de Bouaflé, se sont mutinés ce matin, prenant la ville entière en otage, parce que les promesses faites n’ont toujours pas été honorées. Impossible donc depuis 5h ce matin, de rentrer et sortir de la ville et des localités environnantes. Nous attendons la prochaine promesse du chef de l’Etat, une de plus… Alors que nous comptabilisons soigneusement les sorties aériennes du Président volant, il aurait fallu également comptabiliser les promesses non tenues, certainement plus nombreuses encore. Et pourtant en additionnant tous les détournements, toutes les indélicatesses, toutes les fraudes accumulées des com’zones, du PAN, des ministres, des hauts fonctionnaires rattrapés, il y aurait eu beaucoup de sous à redistribuer…
Nous pouvons nous poser de sérieuses questions sur la personnalité de ce président si prompt au mensonge. Dans la spiritualité chrétienne orthodoxe, il y a ce qu’on appelle la philocalie du cœur : une petite phrase de prière qui est pensée à chaque inspiration, et qui devient tout automatique, empreignant l’homme d’une pensée qui le tourne vers son Créateur et ses exigences. Ouattara lui, semble mentir comme il respire ! Alors, comment avoir confiance en lui si on est un homme d’affaire, un commerçant, un diplomate, un créancier ? Que vaut sa parole sur la scène internationale, lui qui ne cesse d’affirmer que la Côte d’Ivoire est redevenue une actrice importante dans le monde ? Et pourtant combien de fois devons-nous le voir tout de blanc vêtu, ce blanc couleur d’intégrité, de candeur, de pureté? Même lors de l’inauguration du Pont de la Fraternité, il avait trouvé le temps de faire ses ablutions et d’aller avec son compère le chef d’état Guinéen Alpha Condé à la Mosquée du coin, près d’Odienné.
Pourquoi Ouattara tiendrait-il ses promesses, maintenant qu’il n’est plus sûr du tout de la suite harmonieuse de son Agenda? Contesté partout, à la veille des marches programmées du 9 juin, marches de protestation, encouragées par le FPI de Sangaré et la CNC. Les bulletins de salaire des fonctionnaires et des militaires et gendarmes ont fait apparaitre une nouvelle fois les promesses non tenues d’une hausse de salaire. L’électricité augmente dès aujourd’hui, alors que plus que jamais, les Ivoiriens ont souffert de son absence à cause des coupures de courant. Ouattara nous promet un tarif social pour 40% des abonnés. Mais qui a identifié ces 522 mille Ivoiriens exemptés? Comment s’appelle le service social qui aide les pauvres et les démunis? En dehors de la Fondation Children Of Africa dont l’éthique financière n’est pas très transparente, qui fait du social en Côte d’Ivoire? Les agents recenseurs auraient pu avoir une rubrique à cocher sur les revenus des familles recensées, mais ils ne sont pas passés dans tous les foyers, et ce recensement très contesté s’est terminé presque en avortement.
Les vraies fausses cartes d’identité se multiplient comme les lapins, alors qu’elles ne correspondent pas à des demandes enregistrées. Selon le journal satirique « l’Éléphant déchainé », voilà plus d’un an que deux mille fausses cartes d’identités sortent chaque jour des imprimeries d’état. Les Ivoiriens ne croient plus à ces élections sécurisées et transparentes promises par le Chef de l’Etat dont on ne voit pas les doigts se croiser quand il parle. Ainsi il y a une semaine, le Guinéen Fodé Camara, maire de Kerala, lors de l’inauguration du pont reliant la Guinée à la Côte d’Ivoire à Gbéléban, avoue dans son discours que les Guinéens ont voté massivement pour Ouattara en 2010; et sans aucune gêne, il va demander à ses compatriotes de franchir ce pont pour rééditer cet « exploit ». Il va sans dire que personne n’a bronché: le chef d’état Guinéen n’a pas repris son élu, Jean-Marc Simon, ancien ambassadeur de France, qui était « de passage », a dû se gratter l’oreille à ce moment là, et Ouattara, le roi des Ponts et Chaussées, très absorbé dans la relecture de ses notes, n’a rien entendu non plus. Même les journalistes patentés n’ont rien entendu. Seul un émissaire du Nouveau Courrier a entendu cette « bourde » et relevé cet aveu involontaire d’un maire guinéen, dont la commune est située à 55 kilomètres du pont frontière. Probablement n’a-t-il pas reçu lui aussi son cadeau promis pour le coup de pouce en 2010; alors avec de gros sabots, il se rappelle au bon souvenir de Ouattara et lui fait comprendre que beaucoup de Guinéens pourraient une fois encore voter pour lui, grâce à ce pont qui reliera ses compatriotes aux bureaux de vote plus rapidement encore qu’en 2010.
Les conflits ruraux à propos du foncier se multiplient. De plus en plus des gens de l’ouest et du Nord sont en conflit avec des étrangers qui ont des titres de propriété falsifiés. Que dire encore des années blanches des élèves et étudiants, des hôpitaux délabrés, du système de santé en faillite, malgré la com sur la nouvelle assurance maladie… Mais tout va bien, l’indice de sécurité en Côte d’Ivoire est proche de l’indice new-yorkais. Et avec Ouattara, nous ne comparons ce qui est comparable.
Trop c’est trop. Ouattara compte-t-il seulement sur les militaires français qui font rentrer ces jours-ci des armes et des véhicules blindés pour remettre au pas ces Ivoiriens opprimés et désespérés ? La route est longue encore vers ces élections pacifiées et harmonieuses, surtout que sa candidature n’est valide et valable que parce qu’il le dit, mais il lui faut faire abstraction de la Constitution qui elle le nie !
Et que dire de la réconciliation, cette réconciliation si chère à ses lèvres ? Elle est totalement en veilleuse. Demain le Professeur Hubert Oulaye comparaitra devant le juge. Arrêté avec Koua Justin et Dano Djédjé après la tenue du congrès de Mama, il serait coupable de déstabilisation du régime, un dossier parait-il de 2013, ressorti des tiroirs. Et pourtant, si ce dossier avait été étoffé, le professeur aurait déjà comparu en février dernier avec Simone Gbagbo et tous les autres ! Ses amis et les jeunes patriotes sont attendus devant le portail de la justice au balancier cassé, dès 6 heures du matin pour le soutenir et manifester leur ras le bol à ce dirigeant qui ne connait rien à la justice, à l’économie, et qui ne sait sourire et déclarer son amour à « son peuple » que sur les médias et lorsqu’il est à l’Étranger.
Hier, 31mai 2015, c’était l’anniversaire du Président Gbagbo, le 70ème. Je ne sais pas si l’avenir proche nous réserve un bilan des années Ouattara, et un jugement en perspective. Mais si Laurent Gbagbo, -ce soit-disant dictateur-, a mérité le déplacement à La Haye de plus de mille personnes, je ne suis pas sûr qu’un Ouattara, l’élu de la Communauté Internationale ébranlerait autant de monde, et je ne crois pas que ses amis français, Jean-Marc Simon ou Nicolas Sarkozy feraient le déplacement une fois par mois comme c’est le cas du fidèle ami Guy Labertit, et de tant d’autres encore.
En attendant, Dame Ouattara fait des affaires avec Mohamed VI du Maroc qui en est déjà à son troisième voyage d’affaire en Côte d’Ivoire. Le business familial marche mieux que le PNB ivoirien. D’un côté des bénéfices colossaux engrangés, de l’autre une dette qui s’apparente à une lourde chaine. « L’indépendance de la Côte d’Ivoire » du 7 août prochain, et qui sera fêtée certainement avec faste et renfort de Com, aura décidément le gout amer d’une servitude sans fin.
Shlomit Abel, 1er Juin 2015
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