PRAO Yao Séraphin
Le vendredi dernier, le marigot politique a enregistré la naissance d’une coalition dénommée : Coalition nationale pour le changement (CNC). Face à la politique morbide du régime actuel, il était urgent que les forces démocratiques se mettent ensemble pour chasser démocratiquement le pouvoir en place. Mais cette coalition a très peu de chance de réussir cette mission. La CNC est morte avant même sa naissance. Trois raisons expliquent fortement l’échec programmé de cette coalition.
En premier lieu, cette coalition est lourde dans son fonctionnement. En effet, dans une maison où tout le monde est chef, cette maison n’avance pas. Le RHDP a son président, il s’appelle Henri Konan Bédié. A quelques mois des élections, il faut faire vite et bien. Pourquoi ne pas gagner en temps en choisissant un leader ? Cette conférence des présidents est une mauvaise chose. La preuve, le clash entre Doumbia Major et Konan Kouadio Bertin (KKB) montre bien que cette coalition ne peut pas prospérer.
En deuxième lieu, certains acteurs sont de simples opportunistes. Au sein de cette coalition, il y’a des opportunistes. Ils sont aujourd’hui nombreux à dire qu’ils souhaitent la libération de Laurent Gbagbo et pourtant hier, ils disaient le contraire. Dans une coalition, le souci majeur doit demeurer la satisfaction des besoins de nos populations. Or, visiblement chacun prêche pour sa chapelle.
En troisième lieu, le manque de consensus. Dans une coalition, il faut écouter et prendre en compte les observations de toutes les parties prenantes. L’intransigeance de certains finira par exacerber les autres. Il est clair que si nous voulons conclure une entente entre divers partis en vue de proposer une alternative à la politique actuelle, c’est le consensus qui doit triompher et non les comportements nombrilistes.
Prao Séraphin
Coalition nationale pour le changement (Cnc) : Voici pourquoi Essy Amara n’a pas signé la charte
Les réserves du ministre d’État, son porte-parole, Kramo Kouassi: «Ce que nous allons faire»
Devrait-on dire déjà que c’est mal parti pour la Coalition nationale pour le changement (Cnc), qui veut affronter le président de la République sortant, Alassane Ouattara adoubé par le Rassemblement des Houphouétistes (Rhdp) aux élections présidentielles de 2015? Le couac survenu à la signature de la charte de cette coalition conduirait à le dire. En effet, tous les leaders concernés ont apposé leur signature au bas du document, sauf le ministre d’État Essy Amara. Absent de la cérémonie, parce qu’en tournée à l’extérieur du pays, l’ancien chef de la diplomatie ivoirienne, candidat déclaré aux joutes présidentielles d’octobre prochain, s’était pourtant fait représenter par l’un des membres de son staff. Il s’agit du doyen, Prosper Kotchi, ancien Consul de Côte d’Ivoire au Liberia. Le représentant d’Essy Amara, assis en bonne place, au côté de l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny, a pris activement part à la cérémonie jusqu’à l’étape de la paraphe et de la signature de la charte. Alors que les autres leaders se succèdent sur le podium, l’on aperçoit M. Kotchi en plein conciliabule avec le président de Liberté et démocratie pour la République (Lider), Mamadou Koulibaly, initiateur de la coalition, objet de la cérémonie du jour. Quand il est appelé, au nom de son candidat, à prendre place sur la table pour la signature du document apprêté, le représentant du ministre Essy Amara simule l’acte sans apposer d’écriture. Ce geste de simulation est confirmé par le porte-parole du candidat, le député Kramo Kouassi qui, dans un communiqué paru dans la presse, a effleuré les raisons pour lesquelles Essy Amara n’a pas signé. Joint hier dimanche 17 mai pour en savoir davantage sur cette abstention, M. Prosper Kotchi n’a fait aucun mystère pour en donner les raisons profondes. «Le ministre Essy Amara a des réserves sur le contenu du document. Nous voulions bien le changement, mais dans la tranquillité, pas dans la violence. Nous savons tous que les élections de 2010 ont laissé beaucoup de séquelles, des morts, des exilés et de nombreux détenus dont le président Gbagbo. Donc, nous avions dit qu’il fallait qu’on reporte la cérémonie, le temps qu’on revoie le contenu du document. Les camarades ont refusé. Puisque la cérémonie était importante, on ne pouvait pas s’absenter. Le ministre Essy Amara nous a demandé d’y aller sans signer de document. Il a dit d’attendre, quand il va arriver, il va revoir ses pairs, les autres leaders, et il va porter sa signature, lui-même», a-t-il confié. Précision utile, selon Prosper Kotchi, il n’a jamais été question que le ministre Essy Amara ne signera pas la charte. Mais, il va d’abord discuter de son contenu avec ses camarades.
A propos, l’ancien délégué départemental du Pdci d’Agboville III, qui a représenté son candidat, dit avoir eu la promesse ferme de l’un des leaders du Cnc pour la révision effective et consensuelle du contenu du document, dès le retour de l’ancien ministre des Affaires étrangères. «On prendra notre place. Mais, on ne veut pas y aller par la violence. On veut le chasser (Ndlr: le président Alassane Ouattara) du pouvoir par les urnes», dira M. Kotchi, dont les propos sont confirmés par le porte-parole du ministre Essy Amara, l’honorable Kramo Kouassi, que nous avons réussi à joindre hier également. Ce dernier a authentifié le communiqué qu’il a remis à la presse et expliqué sans faux-fuyant : «Nous avons fait des propositions, qui n’ont pas été prises en compte. Le ministre Essy Amara avait des réserves. On nous a demandé de signer en espérant que les modifications viendraient ultérieurement. Ce que nous n’avons pas voulu faire, parce qu’une fois signé, ce document engage tous ses signataires. Donc, on a voulu attendre d’avoir les modifications », dira-t-il. Mais, ces modifications seraient-elles encore possibles dès lors que le document a été rendu public page par page à la cérémonie marquant son officialisation? Là- dessus, le proche collaborateur de Essy Amara ne désespère pas. Il pense que tout est encore possible quand son mentor sera de retour. «Le document signé n’est pas gravé dans du marbre. Même la Constitution, ça se touche. Donc, on peut toujours s’entendre», a-t-il lâché, circonspect.
Félix D.BONY
Source: L’Inter N°5079 du Lundi 18 Mai 2015
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