Apatride – Pourquoi Ouattara s’y accroche
La question des apatrides demeure encore d’actualité. Mais ce qui étonne plus les observateurs avertis de la politique nationale, c’est que sur les 1o millions de cas d’apatrides recensés dans le monde entier, Abidjan estime pour sa part à 700.000 le nombre d’apatrides sur son territoire. Un nombre paradoxalement important, mais, dit-on, dans les couloirs, vraisemblablement sous-estimés du fait de la non-régularisation des enfants à l’état-civil sur plusieurs générations. De quoi à susciter des interrogations. Puisque sur la base des données disponibles, les 700.000, représentent 7% du nombre total d’apatrides au monde sur le sol ivoirien. Pourquoi ce nombre élevé ? Pourquoi le débat est aussi présent en Côte d’Ivoire. A quelques mois de la présidentielle prévue, en octobre 2015 ? La dernière conférence régionale sur la question de l’apatridie qui a eu lieu à Abidjan, pose le problème de l’attachement du régime actuel à ce débat. Que gagne-t-il à qualifier «d’intoxication politique»ce débat ?
Faut-il aussitôt procéder à la nationalisation de cette frange de la population outre mesure ?Dans la mesure où, jusqu’à preuve du contraire, ces personnes ne sont
pas nées pour la plupart, dans le néant quand même? Car leurs parents sont tout de même originaires de quelque part? A moins d’en faire un bétail électoral, la question de l’apatridie doit impliquer toutes les parties ivoiriennes. Au risque de retomber dans une situation impensable dans un avenir proche. En attendant, Alassane Ouattara a déjà dévoilé son objectif. En parlant plutôt d’une «intoxication»sur la question des apatrides. «Nous avons lancé une grande campagne de sensibilisation et de remise d’actes de naissance aux personnes nées ou vivant sur le sol ivoirien», a-t-il déclaré, à l’occasion d’une conférence régionale sur le sujet le mercredi
25 février 2015, à Abidjan. «Cela n’a pas été chose facile, compte tenu de l’intoxication qui a marqué ce débat dans notre pays», croit-il savoir. Quand on sait
qu’en octobre 2014, seuls 25.000 apatrides avaient entamé des démarches pour obtenir la nationalité ivoirienne. Aucun chiffre plus récent n’est disponible. Un véritable flou qui entoure cette question, pourtant cruciale, à la veille d’une échéance électorale. «Quand on parle de droits fondamentaux, il faut éviter toute politisation. Permettre que les gens puissent avoir une vie normale, ce n’est pas une question qui doit être politisée», a estimé Antonio Guterres, le Haut commissaire
des Nations unies aux réfugiés, interrogé par l’Afp. Pour rappel, les députés ont voté en août 2013, une loi facilitant l’acquisition de la nationalité pour certaines catégories d’individus, qui n’en ont aucune. Cela a courroucé l’opposition qui a indiqué que le pouvoir Ouattara était en train de brader le passeport ivoirien et de se créer du «bétail électoral»en vue de la présidentielle de 2015. A l’évidence, la question de la nationalité reste toujours très polémique. Et celle relative à
l’apatridie n’est pas à ignorer.
Toussaint N’gotta
Le Temps
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