Comme chaque trimestre, LIDER analyse les chiffres officiels de l’endettement de l’Etat ivoirien et en informe les populations. Le constat en fin 2014 est déprimant: Chaque habitant est endetté à hauteur de 339.332 fcfa pour financer les dépenses du gouvernement.
LIDER News | 24 février 2015
En fin décembre 2014, la dette de l’Etat de Côte d’Ivoire se situe à 7.804,64 milliards de fcfa. Comparé à fin décembre 2013, où le stock de la dette était à 6.379,53 milliards, c’est un accroissement de plus de 1.425,11 milliards en un an. Il faut noter qu’en septembre 2011, juste avant le Ppte, le stock était de 7.525,84 milliards et en septembre 2012, après les annulations, la dette totale de la Côte d’Ivoire se situait à 6.176,46 milliards de fcfa. Mais si entre 2012 et 2013, ce stock a augmenté de 203 milliards, la hausse a été vertigineuse depuis 2013. Cette dette se répartit entre la dette extérieure de 4.772,74 milliards et la dette intérieure de 3.031,9 milliards. En 2014, l’Etat a remboursé à ses créanciers internationaux 297,43 milliards et a reçu d’eux 574,97 milliards. Il n’y a pas d’arriérés de paiement de la dette extérieure, tandis que la dette intérieure voit ses arriérés s’accumuler.
Selon les résultats secrets du recensement général de la population communiqués par le gouvernement et dont il est le seul détenteur, la population serait de 23 millions d’habitants, ce qui donne un taux d’endettement par habitant de 339.332 francs cfa environ. Ainsi, du fait des dépenses du gouvernement financées par la dette, une famille de quatre personnes doit à l’Etat 1.357.328 fcfa pour le remboursement de ladite dette. Nous avons là une bonne raison d’avoir des familles de petite taille plutôt que le contraire, qui ne ferait qu’augmenter le risque de pauvreté et de précarisation des ménages. Car à supposer que ce que le gouvernement dit soit vrai et que le revenu par tête d’habitant a augmenté de 7%, il faut se poser la question de savoir comment la dette par tête a augmenté, elle aussi, sur la même période. En fin 2013, cette dette par tête était de 277.370 fcfa. Elle a donc subi une hausse de 22,3% en fin d’année 2014.
Malgré cela, la mode est à l’optimisme béat, et il peut être très mal vu de faire montre de scepticisme. La Banque mondiale soutient que l’économie ivoirienne est verdoyante alors que les domaines sur lesquels le succès du pays repose, comme l’agriculture ou les transports, n’ont même pas encore réellement commencé à éclore. Ceci laisse supposer que lorsque ces secteurs verront leur embellie arriver, la Côte d’Ivoire sera propulsée encore plus haut vers les cimes des chiffres de la croissance macroéconomique. De son côté, l’Union européenne estime que nos finances publiques sont hyper bien gérées, sans même que l’on ne lutte contre la corruption, les détournements massifs, les faux marchés publics et les taxes multiples qui frappent les entreprises et les ménages. Ceci permet de penser qu’un début de lutte contre ces fléaux qui tuent les recettes et gonflent les dépenses publiques pourrait envoyer notre pays vers des taux de croissance miraculeux et vertigineux.
L’Etat de Côte d’Ivoire est sur son nuage d’autosatisfaction, encouragé en cela par ses créanciers qui tentent même de nous convaincre que prêter 750 millions de dollars sur le marché financier international au taux de 5,625% est à saluer comme une bonne opération financière, au moment où, sur les mêmes marchés, Apple emprunte sur dix ans au taux de 0,281% et sur quinze ans au taux de 0,74%. Apple, Microsoft etc. qui, comme Ouattara, s’endettent pour payer leurs propres obligations et actions, ont, comme Ouattara, des armées de lobbyistes, d’avocats, d’experts et de consultants pour faciliter leurs opérations. Mais ces entités sont des entreprises privées et sont très rentables car elles font de la valeur ajoutée, ce que ne fait pas Ouattara qui, lui, agit au nom de l’Etat d’un pays pauvre très endetté et dont le remboursement de la dette ne dépend pas de la valeur ajoutée par les sommes empruntées, mais des impôts et taxes nouveaux que les contribuables ivoiriens devraient payer.
De surcroît, le pays qu’il dirige appartient à une union monétaire qui laisse dormir sur un compte d’opérations ouvert au Trésor public français plus de 3.000 milliards de francs cfa rémunérés à un taux tout aussi intéressant de 0,25%, au moment où l’euro, auquel le cfa est arrimé, est en pleine dévaluation compétitive par rapport au dollar qui monte.
Il se trouve, heureusement pour nous, des gens bien-pensants, qui nous expliqueront que cette dévaluation de l’euro est favorable à notre commerce extérieur de café, de cacao, d’hévéa, d’anacarde, d’huile de palme dont les prix, curieusement, baissent. Mais le drame pour nous c’est que personne ne vient nous expliquer ce que cela nous coûte de rembourser notre dette avec un dollar à 576 fcfa, alors qu’au moment où notre Etat s’endettait, le même dollar coûtait 510 francs. Comment se comportera la dette de l’Etat qui a un endettement important en dollars et peu de recettes en dollars? Les entreprises, dans une telle configuration, ont du mal à trouver les dollars qu’il faut pour rembourser leurs dettes mais peut-être que cela ne marche pas de la même façon quand il s’agit de l’Etat de Côte d’Ivoire sous Ouattara? Dans le cas contraire, il faudrait convenir que les échéances futures des coupons de la dette ivoirienne, avec la chute de l’euro et la hausse du dollar, pourraient entraîner de nouveaux impôts et taxes pour les ménages et les entreprises en Côte d’Ivoire. Les perspectives sont donc bonnes pour un surcroît d’endettement, supérieur à celui déjà impressionnant de 2014.
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