Côte-d’Ivoire « L’appel de Daoukro est une trahison… » selon le porte-parole de Banny, Sran Kouassi Franck

Sran1

Côte d’Ivoire, 5e congrès extraordinaire du Pdci-Rda

« l’appel de Daoukro est la trahison d’un serment »
« Ils ne gagneront pas cette autre bataille »

Le porte-parole et directeur de la communication au sein de la coordination de campagne de Charles Konan Banny répond aux questions de L’inter à quelques heures du 5e congrès extraordinaire du Pdci-Rda.

M. le porte-parole, comment va le candidat Charles Konan Banny ?

Le Premier ministre Charles Konan Banny, candidat à la présidentielle de 2015, se porte bien.

Comment a-t-il réagi à la libération de MM. Arthur Aloco et Sylvain Oka, deux de ses proches soupçonnés de blanchiment d’argent et d’enrichissement illicite ?

Il a été content de la libération de Arthur Aloco et Sylvain Oka. Il ne pouvait en être autrement, au regard du droit. En tout état de cause, Charles Konan Banny est content pour ses proches et pour leurs familles, qui ont vécu des moments difficiles lors de ces procédures judiciaires iniques et controversées.

Que deviennent-ils ?

Arthur et Sylvain vont bien, ils ont retrouvé leurs proches et repris leurs activités professionnelles. Je suis content pour eux, mais j’ai une pensée pour tous les Ivoiriens détenus quelque part, victimes de procédures peu recommandables, d’entraves à leurs droits et libertés…

L’actualité du Pdci nous plonge dans le 5e congrès extraordinaire, dont le premier acte se joue aujourd’hui. Charles Konan Banny ira t-il à ce rendez-vous ?

Peut être serait-il plus indiqué de poser cette question à M. Charles Konan Banny lui-même (rire). Plus sérieusement, pour quelles raisons voudriez-vous que M. Banny se rende à un congrès extraordinaire dont l’objet véritable est de tuer le Pdci-Rda de Félix Houphouët-Boigny ?

Voulez-vous dire que le candidat Banny ne sera pas au Congrès ?

Ce qu’il faut retenir, c’est que la candidature de M. Banny est à la fois une position courageuse et une réponse claire à votre question. La candidature de l’ex-président de la Cdvr est l’expression du désir d’application des résolutions du 12e congrès ordinaire du Pdci-Rda, c’est-à-dire la reconquête du pouvoir d’Etat. Or, à l’évidence, le congrès extraordinaire de février 2015 se définit comme l’autel de sacrifice du Pdci-Rda. C’est la seringue létale que tient Guikahué pour euthanasier le plus grand parti politique de Côte d’Ivoire. La majorité des militants Pdci se sent abusée, trahie et volée. Ces militants n’accepteront pas cette comédie de mauvais aloi. Je considère, sans aucune exagération, que l’appel de Daoukro est un poison mortel, un projet séditieux et vénéneux.

M. Kakou Guikahué, lors d’une récente interview dans la presse, s’est expliqué sur la tenue du 5e congrès extraordinaire. Il s’est aussi prononcé sur le sort de votre mentor…

Je voudrais, d’emblée, rectifier un abus de langage que j’ai noté dans l’interview que vous citez en référence. M. Kakou Guikahué n’a aucun pouvoir de se prononcer sur un soi-disant sort de M. Banny! Il n’en a simplement pas les moyens. Ensuite, je voudrais affirmer que ce monsieur n’est pas crédible. Ce qu’il dit le matin et ce qu’il fait le soir n’est pas cohérent. Beaucoup se souviennent encore de l’histoire récente. Lorsque feu le général Guéi et  »ses jeunes gens » prennent le pouvoir par la force en décembre 1999, et que l’ancien commandant de la 4e région militaire de Korhogo nourrit le secret espoir d’être candidat à la présidentielle de 2000, son vœu initial est de se porter candidat au titre du Pdci. Au grand dam de la majorité des militants. On se rappelle, à ce sujet et à cette époque, la farouche opposition que les doyens comme Jean Konan Banny ont réservée au chef du défunt Comité national de salut public (Cnsp). Pendant ces heures chaudes pour le Pdci, curieusement, des gens comme Guikahué étaient favorables au projet du général de Kabakouma. Plus proche de nous, avant-hier, M. Guikahué faisait le tour du pays en criant sur tous les toits qu’il a été fixé dans le marbre des résolutions du 12e congrès ordinaire que le Pdci présenterait un candidat actif et valable en 2015.
Hier, en réaction aux murmures désapprobateurs de la base militante face à la préférence de l’appel de Daoukro, le même Guikahué se justifiait: «…Mais, on ne voit pas de candidat, où sont-ils? ». Aujourd’hui que les candidats sont bien visibles, le même Maurice Kakou Guikahué et ses copains décident, en violation des résolutions du 12e congrès ordinaire, et unilatéralement, que le Pdci ne doit plus participer à la présidentielle de 2015. Est-ce qu’il peut être pris au sérieux? Je voudrais en douter! Voyez-vous, M. Guikahué et ses coéquipiers savent que ce qu’ils font est faux, qu’ils sont dans le mensonge, mais ils continuent… Au moment où tout le monde parle de réconciliation, eux ils cherchent à mettre de l’huile sur le feu. Ils n’ont pas peur de continuer à semer la division au sein du Pdci, comme au temps de l’ivoirité. Ils n’ont aucun respect pour la mémoire d’Houphouët, ni la moindre des considérations pour les millions de militants.

Que pensez-vous réellement de l’appel de Daoukro ?

L’appel de Daoukro est la trahison d’un serment, celui du 12e congrès ordinaire tenu à un kilomètre seulement de la tombe de Félix Houphouët-Boigny.
Mon grand frère Tiburce Koffi disait de cet appel que c’était un «deal», un «business», une vaste escroquerie. J’ajoute, qu’en vérité, l’appel de Daoukro est une autre forme d’ivoirité…, une autre de ces facettes. Rappelez-vous ce que c’était avant. L’idéologie abjecte de l’ivoirité en 1998, c’était  »Tout sauf Ouattara! ». Eh bien, en 2015, ce que Guikahué et ses commanditaires prônent c’est :  »Tout pour Ouattara! ». Ils sont passés, sans transition aucune, d’un extrême à l’autre. Ce n’est pas comme cela que ça marche, malheureusement! C’est la raison pour laquelle, ils ne gagneront pas cette autre bataille. Ils ont déjà échoué et ils échoueront encore.
Voyez-vous, on ne peut pas, les jours pairs, demander l’application de la démocratie et en être ses fourbes fossoyeurs, les jours impairs. Charles Konan Banny croit en la démocratie. Or, le premier principe de la démocratie, c’est la vérité. C’est sur cette vérité que se fonde la légitimité avant de se vêtir du manteau de la légalité. Et justement, c’est dans cette vérité que se trouvent M. Banny et sa candidature.

Excusez-nous d’y revenir, le secrétaire exécutif du Pdci-Rda a dit que tout le monde, y compris les candidats déclarés à la présidentielle au sein de votre parti, est invité à se prononcer audit congrès extraordinaire…

Tout cela, c’est de l’enfumage. Le Congrès extraordinaire est une grotesque mascarade. Tout le monde le sait. Le Pdci n’a pas besoin de ça. Le pays est confronté à de grands défis: l’insécurité, la violence, la pauvreté, la justice sociale, le chômage, la réconciliation nationale, les droits et libertés, etc. On attend du Pdci qu’il incarne une nouvelle alternative de paix et de progrès, une force de propositions et un puissant vecteur d’espérance puis de renouveau. On attend de ce parti qu’il tienne une convention transparente, ouverte et crédible pour choisir, qui de KKB, Kablan Brou Jérôme, Essy Amara et de Charles Konan Banny, dispose du meilleur profil pour gagner les élections de 2015.

La promesse de l’alternance en 2020 ne semble pas vous rassurer ?

Je ne crois pas aux promesses dans des conditions aussi inégales, déloyales.
Vous connaissez le proverbe espagnol rendu populaire par Jean de La Fontaine, à savoir, «Un tiens vaut mieux que Deux tu l’auras» ? Pour moi, il ne fait aucun doute que le Pdci tient dans le rendez-vous électif de 2015, la seule chance historique de reprendre pacifiquement le pouvoir d’État après la parenthèse sombre de la violence et du sang versé. Savez-vous, en outre, que depuis 1990, les promesses non tenues et les mensonges constituent l’une des causes profondes de la grave crise? Savez-vous, par ailleurs, que la promesse dont vous faites cas ne repose sur aucun fondement juridique, ni politique, qu’elle n’a aucune base légale et qu’elle contrevient gravement au principe même de la République? Au surplus, seriez-vous capable de m’indiquer l’existence d’un protocole d’accord entre le Pdci et le Rdr, au sujet d’une telle entente? Y aurait-il un petit papier signé et lequel, entre M. Ouattara et M. Bédié sur cette question de gouvernance alternée? Si oui, pourquoi ne le voit-on pas? Puisqu’il serait signé pour le bien de tous, pourquoi MM. Bédié et Ouattara se précipitent-ils pour déchirer les bons accords contenus dans l’alliance du Rhdp, lesquels stipulent que chaque partie au sein de l’entente présente son candidat au 1er tour de la présidentielle ? Pourquoi M. Ouattara qui ne voulait pas d’un candidat unique Rhdp face à Laurent Gbagbo en 2009-2010, emploie-t-il aujourd’hui toute son énergie, les moyens de la République et autres pressions pour être seul à  »compétir » en octobre prochain? De quoi a-t-on donc peur ? Voilà quelques raisons pour lesquelles nous ne devons pas nous laisser abuser par le petit groupe qui utilise les moyens de l’Etat et l’argent de tous les Ivoiriens pour dévoyer la chose publique.

Le porte-parole du Pdci, Adjoumani Kobenan, a annoncé, en conférence de presse, une médiation initiée par le président Bédié vers les candidats déclarés. Qu’en pense le candidat Banny ?

C’est la presse qui me l’apprend. En tous cas, mon mentor n’a pas encore reçu lesdits émissaires. Ce serait, de toute évidence, le signe que Guikahué et celui qu’il suit ont conscience des périls qu’ils encourent et du mensonge dans lequel ils sont vautrés. Dans ces conditions, le mieux serait de suspendre le congrès extraordinaire, tel qu’ils l’ont élaboré. De mettre sur pied une nouvelle coordination avec toutes les parties prenantes pour travailler à la fixation des termes d’une convention démocratique, transparente, en vue de choisir le candidat du Pdci-Rda à la présidentielle de 2015. Si ce n’est pas pour cet impératif, alors il faudrait douter de cette médiation. Dans tous les cas de figure, M. Banny ira jusqu’au bout !

Quatre candidats au sein du Pdci, n’est- ce pas beaucoup et, dans le même temps, une faiblesse ?

Non, au contraire, c’est une force extraordinaire. En 2000, il y en avait plus !
Maintenant, si vous faites allusion au candidat Rdr de M. Guikahué, je réponds que nous n’en sommes pas encore là. Le but de la convention crédible que nous exigeons, conformément aux textes en vigueur, c’est d’organiser le choix des militants. Qu’au terme de ce choix, il y ait un seul nom, qui soit automatiquement le chef d’équipe. Les quatre candidats en question sont des responsables, ils ont conscience des enjeux, chacun connaît ses forces mais aussi ses limites. Ils sauront donc, le moment venu, se retrouver. Ils constitueront une grande équipe dans le droit fil des vœux chers à Feu Félix Houphouët-Boigny. J’en ai l’intime conviction.

Et qui voyez-vous comme chef de cette équipe ?

Bien entendu, je souhaite que ce soit mon mentor, le premier ministre Charles Konan Banny, parce que c’est lui qui en a le coffre, l’expérience, le profil. Personne, mieux que lui, ne connaît les problèmes des Ivoiriens, leur soif de réconciliation et de paix. C’est un homme de devoir, qu’on ne peut manipuler. Il est courageux, généreux et sincère. Il n’a pas de sang sur les mains. Chaque fois que le pays court des risques endémiques, M. Banny s’offre en sacrifice. Je pense que c’est l’homme de la situation. Mais, il est clair que cela peut aussi bien être aussi MM. Essy ou Kablan, pour des raisons diverses. Si ça doit se faire, cela se fera dans la concertation, le dialogue fraternel, autour de critères communs et de valeurs partagées. Je voudrais lancer un appel à la mobilisation citoyenne et pacifique pour constituer le front du refus face à l’appel de Daoukro et les fossoyeurs du Pdci-Rda. Je voudrais interpeller nos doyens, les dynamiques jeunes et les braves femmes du Pdci-Rda. Ce qui est en jeu, c’est l’avenir de la Côte d’Ivoire, notre avenir commun. Nous devons nous battre pacifiquement pour reprendre en main notre destin, celui d’un Pdci remobilisé, rassemblé et conquérant autours de valeurs consensuelles et partagées de paix, de vérité et de dialogue constructif. Pour un tel objectif, nous entamerons des consultations dans les jours prochains pour nous mobiliser et agir. Nous ferons barrage à la forfaiture.

Propos recueillis par Kisselminan COULIBALY

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